logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION

L’inévitable complexité du futur compte individuel de formation

LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION | Enjeu | publié le : 15.01.2013 | VALÉRIE GRASSET-MOREL

La création d’un compte individuel de formation utilisable par tout citoyen tout au long de sa vie professionnelle est une promesse de campagne de François Hollande. C’est aussi un des thèmes de négociation des partenaires sociaux sur la sécurisation de l’emploi, négociations qui devaient se conclure le 11 janvier.

Cette idée de compte individuel a toujours buté sur des problèmes de financement et de gouvernance. Les résultats des travaux du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFP-TLV, qui réunit État, partenaires économiques et sociaux, régions) sont donc attendus avec impatience. Il doit jeter les bases d’un tel compte, « réceptacle de différents droits ». Dans le prolongement de la Conférence sociale de juillet dernier, le CNFPTLV a en effet été chargé par le Premier ministre d’étudier la faisabilité d’un tel compte articulé avec un mécanisme de formation initiale différée. Le rapport final doit être remis début mars 2013 au ministre délégué à la Formation professionnelle.

Mais, depuis le 18 décembre, un document d’étape d’un groupe de travail du conseil national donne des pistes. Premier point : « À ce stade, ce groupe valide l’hypothèse d’un compte individuel, réceptacle de différents droits », ce qui n’était pas évident vu les obstacles énoncés précédemment et les exemples étrangers peu probants.

Deuxième point : il estime que le compte individuel doit être vu comme « un dispositif complémentaire » n’ayant pas vocation à remplacer ceux qui existent : CIF, VAE, DIF, chèques formation des régions, l’Aide individuelle à la formation de Pôle emploi… Ces dispositifs méritent cependant « un réexamen progressif » dans un souci de « bonne gestion des fonds de la formation et de lisibilité du système français ». Une option combinant les trois mécanismes d’épargne, de dotation et de mutualisation semble privilégiée pour « la mise en place d’un compte soutenu par des garanties collectives : conseil et accompagnement, financement, information et qualité de l’offre ». Ce dispositif pourrait être financé par les pouvoirs publics (dotation et/ou crédit d’impôt), les entreprises (DIF et compte épargne-temps), les salariés (compte épargne-temps) et les entreprises via les Opacif-Fongecif (contribution CIF). Il serait ainsi en effet le « réceptacle de différents droits ». Et, si les modalités de gestion des comptes ne sont pas encore précisées, « le savoir-faire des Fongecif a été évoqué ».

Troisième parti pris : le groupe de travail écarte l’hypothèse d’une « démarche de capitalisation individuelle » sur le modèle anglo-saxon (chèques, bons de formation). Il doute de l’effet véritablement incitatif des droits individuels de se former, au regard des exemples étrangers de comptes. Il souhaite en outre « éviter de transférer vers l’individu ou la collectivité tout ou partie de la responsabilité de l’entreprise dans le maintien de l’employabilité des actifs », ce qui pourrait entraîner un accroissement des inégalités éducatives.

Enfin, quatrième constat, en guise d’avertissement : le groupe de travail du CNFPTLV prévient que « la création d’un compte individuel aux objectifs multi– ples (compensation des inégalités éducatives initiales, accès à la formation continue…), et donc la combinaison de plusieurs logiques, peut déboucher sur des solutions complexes, éventuellement antinomiques de son souhait de lisibilité accrue du système pour l’individu ».

Reste la question de l’opposabilité du droit que le groupe de travail s’est gardé de trancher. Mais si ce droit à la formation n’est pas opposable aux employeurs, à l’État, aux régions…, quel est l’intérêt de créer un compte individuel ?

Auteur

  • VALÉRIE GRASSET-MOREL