logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Pratiques

Des candidats plus nombreux mais des recruteurs plus exigeants

Pratiques | publié le : 26.12.2012 | FRÉDÉRIC BRILLET

Image

Des candidats plus nombreux mais des recruteurs plus exigeants

Crédit photo FRÉDÉRIC BRILLET

Paradoxe de la dernière enquête Apec-ANDRH : les candidats à la fonction RH sont souvent plus nombreux sur chaque poste, mais les recruteurs peinent davantage à trouver l’oiseau rare.

Depuis quelques mois, les signes attestant que le marché de l’emploi devient moins favorable à la fonction RH se multiplient. En septembre 2012, le nombre d’offres sur Internet concernant cette fonction et transitant par l’Apec n’augmentait plus que de 6 % par rapport à la même période de l’année précédente, alors qu’en cumul sur douze mois glissants, la progression affichait encore 11 % à 19093 offres.

Le baromètre trimestriel Apec-ANDRH portant sur les prévisions de recrutement confirme ce tassement : seulement 5 % des entreprises interrogées prévoyaient de recruter au moins un cadre en ressources humaines au quatrième trimestre 2012, contre 7 % au quatrième trimestre 2011. Autre signe de ralentissement, la croissance des offres d’emploi diffusées par l’Apec passe sur la même période de + 42 % à + 8 %, soit un niveau proche de la moyenne de l’ensemble des cadres. Avec 4830 offres publiées sur le site de l’Apec au troisième trimestre 2012, les RH préservent leur part relative (3 %) dans l’ensemble des offres d’emploi transitant par l’Apec, même si le nombre de recrutements dans cette fonction recule en 2012.

Les différentes composantes de la famille RH connaissent des évolutions contrastées. Ainsi, le nombre d’offres dans la fonction formation initiale et continue s’envole de + 26 %, à l’inverse des offres de postes d’administration et développement des ressources humaines (+ 5 %) et de DRH (+ 3 %), qui affichent une faible croissance. Mais si l’on considère les DRH de grands groupes, la perception peut être différente. Ainsi Jean-Pierre Catu, partner du cabinet de chasseur de têtes Spencer Stuart, qui recrute chaque année une vingtaine de DRH appelés à intégrer des groupes internationaux, a l’impression que le turnover chez ces cadres dirigeants s’accélère avec la crise : « Les DRH sont mis à rude épreuve, leur métier devenant plus intéressant mais plus exigeant. À l’instar des directeurs administratifs et financiers, ils intègrent les comités de direction où on leur demande d’apporter des solutions RH au business plan, d’être proactifs, de prendre des décisions difficiles. »

Managers de transition

Autre conséquence du turnover dans la fonction RH, le développement du management de transition dans cette population. « La crise accroît le nombre de candidats RH quinquagénaires acceptant de travailler dans cette configuration, et nous n’avons pas de difficulté à trouver les profils adéquats pour remplir les missions. Dans les short-lists, ça se joue plus sur la personnalité que sur les compétences », estime Anthony Baron, cofondateur de Delville Management, spécialiste du management de transition. Une partie des professionnels gèrent leur fin de carrière tandis que d’autres s’en servent comme d’un tremplin pour rebondir professionnellement, sachant qu’une mission sur cinq débouche sur un CDI. Ces managers RH de transition font d’autant plus facilement leurs preuves que les cabinets spécialisés sélectionnent des candidats légèrement surdimensionnés afin qu’ils puissent être immédiatement opérationnels. « Aujourd’hui, un professionnel RH peut attendre huit mois entre deux CDI. Durant ce laps de temps, il a tout intérêt à accepter des missions temporaires. C’est toujours mieux que de demeurer inactif », assure Anthony Baron.

Le baromètre Apec-ANDRH se penche par ailleurs sur l’évolution du nombre de candidats par offre. À l’inverse de la tendance générale, la fonction RH attire davantage de postulants au premier trimestre 2012 (69 candidatures en moyenne par offre) que sur la même période de l’année précédente (62). Et ce ratio demeure très supérieur à l’ensemble des fonctions, qui s’établit à 37 candidatures par offre au premier trimestre 2012. Les recruteurs disposent donc d’un vivier de candidats cadres deux fois plus nombreux dans les RH que dans les autres fonctions et ce vivier s’est encore élargi récemment.

Et pourtant, les entreprises se plaignent davantage qu’avant lorsqu’il s’agit de recruter pour des fonctions RH. Au premier trimestre 2012, 59 % affirmaient qu’elles avaient trouvé « plutôt ou très difficilement des candidats adaptés à cette fonction », contre 43 % au premier trimestre 2011. Ce paradoxe s’explique par les fortes exigences associées aux postes à pourvoir. Ceux-ci nécessiteraient un niveau d’expérience élevé, une combinaison de compétences ou des compétences pointues, difficiles à trouver. La connaissance du secteur d’activité de l’entreprise, de ses activités et métiers, la maîtrise de logiciels spécifiques et de langues étrangères sont des critères qui semblent primordiaux aux yeux des recruteurs. Ainsi, pour montrer aux candidats étrangers de valeur qu’ils pourront grimper jusqu’au plus haut niveau s’ils postulent, les grands groupes prennent soin d’internationaliser leur équipe dirigeante, et cela vaut désormais pour les DRH monde. « On nous demande de plus en plus de présenter des candidats étrangers connaissant la France », constate Jean-Pierre Catu chez Spencer Stuart.

Fonctions porteuses

Les difficultés de recrutement dont se plaignent les recruteurs résultent d’abord d’un déséquilibre entre l’offre et la demande de profils rares ou en tension. Cela vaut pour les postes de formateurs, qui nécessitent des compétences techniques et pédagogiques, de gestionnaires de formation pour lesquels est attendue une connaissance précise des métiers de l’entreprise, des spécialistes des rémunérations toujours très convoités. « Les responsables Compensation & Benefits ne sont pas touchés par la crise, car ils détiennent une expertise aussi rare que recherchée, ce qui leur vaut de toucher des rémunérations attractives allant jusqu’à 150000 euros par an », explique Vanessa Sonigo-Rozenbaumas, senior manager du cabinet Robert Walters. Autre fonction porteuse, le directeur des relations sociales, historiquement campé dans l’industrie, étend son domaine à tous les secteurs d’activité, avec pour mission de prévenir les conflits, alors même que le climat social se dégrade.

Mais au-delà de la rareté des profils, les difficultés de recrutement tiennent aussi au manque d’attractivité de l’offre, qui peut être liée à la situation géographique de l’entreprise (milieu rural), aux conditions d’emploi (temps partiel, CDD…), à la rémunération insuffisante au regard du niveau de diplôme exigé.

L’ESSENTIEL

1 Le marché de l’emploi dans la fonction RH semble être proche du point de retournement : le nombre d’offres progresse de moins en moins vite tandis qu’il y a de plus en plus de candidats.

2 Paradoxalement, les recruteurs se plaignent de ne pas trouver les candidats ad hoc : certains profils rares sont très convoités et, dans le même temps, les exigences des recruteurs s’accroissent.

3 La crise économique accélère le turnover des DRH de grands groupes et développe le management de transition.

Auteur

  • FRÉDÉRIC BRILLET