Les “vieux” (les plus de 40 ans) tendent à penser les jeunes comme un groupe homogène d’égoïstes dilettantes qui n’ont intégré aucune contrainte de la vie sociale et professionnelle. L’auteur, jeune sociologue spécialiste des relations intergénérationnelles, veut tordre le cou à cette idée reçue. La jeunesse est de plus en plus longue puisque l’âge de l’indépendance économique recule. Et ce phénomène accroît la visibilité d’un groupe d’âge toujours plus nombreux.

Cependant, cette unité sociologique est un fantasme de “vieux”. Les jeunes sont ceux qu’on ne comprend plus ou ne veut plus comprendr,e parce que la jeunesse est l’héritière d’un monde en marche dont elle accentue les aspérités : société de consommation individualiste qui va, de crise en crise, sous l’apparence d’un progrès technologique ininterrompu, mais sur fond de chômage de masse, de retour de la pauvreté et de peur du sida. Les “jeunes” ont un portable greffé dans la main, passent beaucoup de temps sur Facebook, mais sont surtout pris dans le flux montant d’une désillusion politique globale et d’une situation économique difficile.

Il est faux, selon l’auteur, de mettre en cause leur engagement professionnel. Si les jeunes ne veulent pas passer leur vie à la gagner, ils sont cependant hantés par la peur de l’échec et prêts à s’investir à fond dans leur job pour peu que le jeu en vaille la chandelle, c’est-à-dire qu’ils puissent s’exprimer dans l’entreprise et être reconnus par leur travail. Parler de la jeunesse, c’est donc peut-être aussi parler des vieux qui, aujourd’hui, ont largement tendance à tirer à eux la couverture d’une croissance en voie de rétrécissement. En tout cas, cela revient à parler de notre société dans son ensemble.

Les jeunes expliqués aux vieux

Denis Monneuse, L’Harmattan, 220 pages, 23 euros.