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Des DRH en temps partiel à la disposition des PME

Pratiques | publié le : 27.11.2012 | HUBERT HEULOT

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Des DRH en temps partiel à la disposition des PME

Crédit photo HUBERT HEULOT

Pour répondre aux besoins en gestion des ressources humaines des PME, un groupement d’employeurs bretons leur propose notamment des DRH à temps partiel, tout en assurant un emploi stable à ces professionnels expérimentés.

Vénétis, groupement d’employeurs né à Vannes, dans le Morbihan, il y a quinze ans, a pris pied en septembre dernier à Nantes. Alors que les TPE et PME, désormais priorités nationales, abondent dans la grande métropole de l’Ouest, Vénétis s’estime en bonne position pour y faire prospérer son « modèle nouveau de création d’emplois » : des compétences indispensables, dont celles de DRH, à temps partiel dans les PME et employés à temps plein chez lui. « Ce qui mériterait bien une exonération d’impôts spécifique comme solution de flexisécurité adaptée à la France ! », lance en plaisantant Franck Delalande, le directeur général.

Tous en CDI

Dans le monde des groupements d’employeurs, Vénétis n’a rien de banal. Créé en 1997 par seize entreprises – dont des groupes nationaux comme Michelin et TFE, spécialiste du transport frigorifique –, et installé à Vannes, il compte aujourd’hui 260 adhérents, pour un chiffre d’affaires de 4,5 millions d’euros en 2011. Première spécificité, Vénétis n’embauche ses salariés qu’en CDI. « Ainsi, nous apportons une certaine sécurité à nos 260 adhérents. Les salariés leur restent plus fidèles. Ils ont moins envie de partir à la moindre proposition extérieure que s’ils travaillaient en CDD ou en mission d’intérim. »

Autre particularité, Vénétis s’est spécialisé dans la gestion des ressources humaines. En partie parce que son directeur général est un ancien DRH. Le groupe en a embauché au fil du temps pas loin d’une centaine, qui ont introduit la GRH dans 42 entreprises. Il en emploie seize actuellement (sur un total de 130 salariés). Aucun autre groupement d’employeurs ne possède une telle “coloration”.

Certaines PME “utilisent” leur DRH Vénétis un jour par semaine depuis des années. D’autres, parce qu’ils sont devenus le bras droit du chef d’entreprise, leur proposent vite – au bout de deux ou trois ans – d’intégrer l’entreprise : 70 % acceptent, 30 % refusent. Ces DRH, âgés de plus de 35 ans et ayant occupé des postes de DRH ou de RRH dans un groupe, sont en mission au prix de leur salaire brut multiplié par 1,8. « C’est 7 % à 8 % plus cher qu’en embauchant en direct mais sans assumer les risques de l’embauche, de l’emploi à temps plein – gestion du personnel –, ni ceux de l’emploi partiel – départs intempestifs », explique Franck Delalande.

Les DRH Vénétis travaillent dans au moins deux secteurs différents, souvent dans une petite et une moyenne entreprises, quelquefois dans une communauté d’agglomération et une petite société. « Notre atout, c’est le temps partiel. Les PME peuvent bénéficier d’une compétence plutôt réservée aux groupes, à proportion exacte de leur besoin. C’est pourquoi je leur conseille d’y penser bien avant de pouvoir recruter à temps plein, ce qui est loin d’être un réflexe en France », indique le directeur général. Vénétis constate sur le terrain une demande croissante des PME. Deux demandes de PME suffisent pour recruter un DRH. À Nantes, l’agence a dû en engager un en quelques semaines. Le plus souvent, la “structuration” d’une fonction ressources humaines s’impose dans l’urgence. Lorsque les contentieux s’accumulent ou que les amendes atteignent de coquettes sommes pour non-signature d’accords d’entreprises, exigés en nombre ces dernières années, sur l’égalité hommes-femmes, les seniors, le handicap, la pénibilité. « Ceux-ci nécessitent une mobilisation en interne qui ne peut guère être assumée autrement que par une personne dédiée », constate Thierry Andrin, 37 ans, DRH Vénétis, un ancien de L’Oréal et de Daher, un équipementier américain dans l’aéronautique.

Une mission de coordination

Il travaille dans une ébénisterie de 60 personnes qui forme en permanence des apprentis. Elle lui demande déjà d’examiner les nouveaux contrats de génération. Il mène sa seconde mission chez un spécialiste en matériel de climatisation (430 salariés) qui employait quatre personnes dans des fonctions RH : gestion des absences, des contrats, de la paie, des mutuelles et de la participation. Une part du travail était confiée à un avocat extérieur mais personne ne coordonnait. En un an, à raison de deux jours par semaine, Thierry Andrin a lancé le plan de formation, structuré le recrutement et le départ des salariés (il a introduit la rupture conventionnelle). Il a également jeté les bases d’une GPEC. « Les jeunes sont très demandeurs. Ils viennent me voir sitôt leur contrat d’apprentissage terminé avec des attentes sur l’évolution de leurs compétences, de leur carrière. Ils surveillent de près le nombre d’heures de droit individuel à la formation (DIF) inscrit au bas de leur bulletin de salaire. »

Pour Franck Delalande, l’origine des patrons de PME amplifie encore la « niche énorme » sur laquelle Vénétis est positionnée. Anciens ingénieurs pour la plupart ou diplômés d’écoles de commerce, ils finissent débordés par cette gestion des ressources humaines, technique et chronophage. « Combien d’ex-start-up ont conservé la même structure pour se gérer à 80 comme à trois salariés ? Mais ceux qui adoptent la gestion de l’entreprise par les compétences s’en sortent plutôt bien aujourd’hui », constate Franck Delalande.

L’ESSENTIEL

1 Créés en 1985 pour répondre aux besoins de TPE agricoles, les groupements d’employeurs ont vu leurs secteurs d’activité se multiplier au fil du temps.

2 Dans le domaine des RH, ils permettent aux PME de bénéficier des services d’un DRH confirmé, qui pourra assurer l’organisation des NAO ou la mise en place d’une GPEC.

3 Employés en CDI par le groupement, les DRH interviennent à temps partiel dans plusieurs sociétés et peuvent envisager une collaboration de longue durée.

LE GROUPEMENT D’EMPLOYEURS
Une institution jeune et sous-estimée

Créés en 1985 pour l’agriculture et pour des entreprises de moins de dix salariés, les groupements d’employeurs ont le statut d’association loi 1901. Ils ont été ouverts aux entreprises de moins de 100 salariés, toujours dans l’agriculture, par la “loi quinquennale pour l’emploi” de 1993. Dans ce secteur, le ministère de l’Agriculture en recense 3 683 employant 17 882 salariés.

En 1995, les groupements d’employeurs sont devenus multisectoriels. Depuis 2005, ils sont également accessibles au secteur public.

En 2011, la loi Cherpion a supprimé l’obligation faite aux entreprises de plus de 300 salariés d’un accord d’entreprise pour en faire partie. Dans le seul secteur privé, l’Union des groupements d’employeurs de France a dénombré 300 membres en 2010, regroupant 10 000 entreprises et ayant créé 12 000 emplois.

Le milieu associatif et l’économie sociale et solidaire se sont aussi saisis de l’outil pour salarier des permanents. Le nombre de groupements d’employeurs augmente donc en France, mais les promoteurs de cette formule dans le monde économique la considérent encore souvent comme une anomalie juridique, peu appréciée également par les partenaires sociaux. Ce qui les empêche de jouer vraiment un rôle de levier dans la création d’emplois à temps plein à partir de besoins à temps partiel.

Auteur

  • HUBERT HEULOT