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De jeunes décrocheurs remis dans le circuit

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 20.11.2012 | AURORE DOHY

En 2010, la Web@cadémie initiait une formation au métier de développeur informatique à l’intention d’une quinzaine de jeunes sans diplôme. Son ambition est aujourd’hui d’en former 1 000 par an. Dans le cadre de son programme mondial YouthSpark, Microsoft France vient de lui apporter son soutien.

Depuis 2010, l’école d’ingénieurs Epitech, située sur le campus numérique Paris-Sud au Kremlin-Bicêtre (94), accueille parmi ses élèves une promotion de jeunes sortis des rails du système scolaire avant d’y avoir décroché une qualification ou un diplôme, et leur propose une formation gratuite en deux ans aux débouchés 100 % garantis. Science-fiction ? Pas si l’on en croit le premier bilan de cette Web@cadémie : à leur sortie du cursus, cette année, les deux tiers de la promotion d’une quinzaine de jeunes ont été recrutés en CDI afin d’y exercer le métier de développeur intégrateur Web pour lequel ils ont été formés. « Chacun ayant auparavant reçu pas moins de quatre ou cinq autres propositions », se réjouit François Benthanane, fondateur de la structure d’accompagnement scolaire de jeunes issus de familles défavorisées Zup de Co, et initiateur de la Web@cadémie avec Nicolas Sadirac, directeur de l’Epitech. Et, heureuse surprise pour des jeunes que rien ne prédisposait à un tel parcours, le dernier tiers a décidé de poursuivre ses études.

Côté pédagogie, le modèle Epitech, fondé sur l’apprentissage de l’apprentissage plutôt que sur l’acquisition de savoirs, semble avoir prouvé sa pertinence à s’adapter à des jeunes qui n’étaient pas taillés pour le système scolaire traditionnel. « Ces jeunes formés dans un environnement collaboratif sont aujourd’hui des professionnels aptes à mettre au point des solutions plus innovantes par leur usage que par leur contenu scientifique, explique Nicolas Sadirac. C’est ce que les entreprises attendent d’eux. »

Un fort besoin de techniciens qualifiés

« Aujourd’hui en France, 140 000 élèves quittent le système scolaire sans aucun diplôme et 22 % des jeunes sont au chômage », rappelle François Benthanane. À ce gâchis humain s’en ajoute un autre, économique cette fois. L’explosion du Web a suscité un fort besoin de techniciens qualifiés pour lesquels les entreprises ne trouvent pas de candidats. Le nombre de postes de développeurs informatiques laissés vacants est estimé à 30 000 en France. Résultat : de nombreux ingénieurs sont affectés à ces tâches, ce qui accroît encore la pénurie dans leur propre niveau de compétences et affecte la rentabilité des entreprises, qui finissent par se laisser tenter par une sous-traitance dans les pays “low-cost”.

Pour intégrer la Web@cadémie, les prérequis sont volontairement limités : ne pas avoir son bac, être âgé de 18 à 25 ans et passionné par l’informatique. Alors que la seconde promotion – une cinquantaine de jeunes, dont six filles, identifiés par les missions locales ou le cabinet de recrutement Mozaïk RH spécialisé dans la promotion de l’égalité des chances – a fait sa rentrée en mars dernier, Web@cadémie ambitionne de former 1 000 jeunes chaque année, en s’appuyant sur les onze antennes régionales d’Epitech. « Nous réfléchissons à la possibilité de créer pour cela une section d’apprentissage, explique Nicolas Sadirac. Notre principale difficulté est qu’il n’existe aujourd’hui aucun modèle adapté à des jeunes qui ne relèvent pas de l’enseignement secondaire – ils n’ont pas le diplôme pour cela – tout en étant sortis du secondaire. »

Mécénat

Si la seconde année de formation est prise en charge par les entreprises qui accueillent le “web@cadémicien” en contrat de professionnalisation, la première est jusqu’à présent financée par quelques “mécènes”, en particulier le site en ligne Vente-privée. com. Un modèle économique difficile à dupliquer à grande échelle.

Dans sa forme actuelle, le projet Web@cadémie continue cependant de séduire : en témoigne le soutien qu’a décidé d’apporter à l’initiative la société Microsoft France, dans le cadre du programme mondial d’accompagnement de la jeunesse de l’éditeur de logiciels, baptisé YouthSpark et lancé le 20 septembre dernier. Mis en œuvre dans plus de 100 pays, YouthSpark s’engage à aider 300 millions de jeunes à « acquérir les compétences, les outils et le réseau nécessaires à la révélation de leur potentiel ». En France, la Web@cadémie fait donc partie – avec UnisCité, un programme d’accompagnement de jeunes entrepreneurs sociaux – des deux initiatives sélectionnées par la filiale française de l’éditeur.

« Un bon coup de pouce au bon moment »

« Microsoft France a été sensible à l’aspect vertueux de cette initiative qui donne une chance à des jeunes déscolarisés et passionnés par les nouvelles technologies d’accéder à une formation innovante puis à un métier recherché, souligne Constance Parodi, la directrice de la politique de citoyenneté. Les jeunes qui bénéficieront de ces programmes en sortiront transformés pour la vie. Nous sommes fiers de contribuer à ce bon coup de pouce au bon moment. »

Outre un soutien financier à hauteur de « plusieurs milliers d’euros », Microsoft entend donner de la visibilité au projet, en particulier au sein son “éco-système” de plus de 10 000 partenaires (et recruteurs potentiels). Un volet expertise technique devrait également être mis en place, ainsi qu’un programme de coaching des web@cadémiciens par les salariés de l’éditeur.

Auteur

  • AURORE DOHY