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CanadaLES COOPÉRATIVES QUÉBÉCOISES, UN MODÈLE POUR LA FRANCE ?

Pratiques | International | publié le : 30.10.2012 | LUDOVIC HIRTZMANN

Le sommet international des coopératives a accueilli en octobre le ministre français de l’Économie solidaire Benoît Hamon, et témoigné de l’importance et de la bonne santé du modèle coopératif québécois au cœur de la crise.

Alors que 2012 a été déclarée Année internationale des coopératives, du 8 au 11 octobre, des centaines d’experts et de dirigeants mondiaux ont échangé leur expertise au Sommet international des coopératives de Québec. Le ministre délégué à l’Économie sociale et solidaire français, Benoît Hamon, y a vanté le système coopératif québécois : « Le Québec est un exemple dont la France doit s’inspirer […] Ce modèle d’économie (NDLR : les coopératives), d’entreprises, est une réponse à la crise et un moyen de créer de l’emploi et de l’activité. » Une convention d’intention a d’ailleurs été signée entre les deux gouvernements, visant à partager les meilleures pratiques dans ce domaine et à promouvoir le modèle au sein de la francophonie.

Faciliter le financement

De part et d’autre, une banque d’investissement doit aider en partie à financer l’économie solidaire et le gouvernement français prévoit un projet de loi au printemps prochain visant à élargir les possibilités de financement des entreprises de l’économie sociale. Depuis maintenant un siècle, les coopératives occupent une place de choix dans la Belle province. Elles sont présentes dans les secteurs des services financiers et des assurances, de l’industrie agroalimentaire, de l’alimentation, de l’habitation, de l’industrie forestière, des services funéraires et en milieu scolaire, pour n’en nommer que quelques-uns. Le principal employeur du Québec, le Mouvement Desjardins, “banque des Québécois”, est une coopérative qui emploie 44 000 personnes.

Plus intéressant, les coopératives résistent mieux à la crise que les entreprises traditionnelles. Le professeur Michel Lafleur, directeur de l’Institut de recherche et d’éducation pour les coopératives et les mutuelles, à l’université de Sherbrooke, confie : « Entre 1999 et 2008, les coopératives du Québec ont eu un taux de survie deux fois supérieur aux entreprises traditionnelles. Les coopératives sont basées sur les besoins réels de la population : l’agriculture, la distribution d’électricité, l’alimentaire. Elles ne vivent pas dans le monde de la spéculation. » La coordonnatrice de la veille stratégique du Chantier de l’économie sociale du Québec, Geneviève Huot, explique : « Les coops ne recherchent pas les profits maximum. Elles créent proportionnellement plus d’emplois que les entreprises traditionnelles. Entre 2000 et 2009, le nombre d’emplois a augmenté de 25 % dans les coops contre 13 % dans les sociétés classiques. Si l’on prend la période 1995-2009, c’est 85 % contre 23 %. » Mieux, en pleine crise, entre 2006 et 2011, le modèle coopératif s’est payé le luxe de créer 200 coopératives.

Solidarité active

Ces sociétés sont moins touchées par la crise parce qu’elles n’ont pas à répondre aux actionnaires, mais uniquement à leurs membres. Les salaires des dirigeants sont moins élevés et il n’y a pas de stock-options. Surtout, la solidarité joue beaucoup. Par exemple, certains secteurs, comme le forestier, ont beaucoup décliné ces dernières années dans la Belle province, notamment avec le départ des grandes multinationales. « Il ne reste plus que les coops forestières. Elles n’ont pas mis de personnel à pied, mais elles ont réduit les salaires et cherché d’autres pistes de développement. Il y a toujours une forme de solidarité », dit Michel Lafleur. Les coopératives forestières ont ainsi développé des activités touristiques pour contourner la crise. Autre exemple avec Agropur, une coopérative laitière, propriété de 3 300 producteurs de lait, qui emploie 5 500 salariés. « Elle a créé des postes de conseillers coopératifs qui multiplient les assemblées régionales avec les producteurs laitiers pour prendre le pouls du milieu […] La direction générale rencontre les employés entre six et dix fois par an », souligne le professeur de l’université de Sherbrooke.

La dernière raison du succès du mouvement coopératif québécois est son unité. « Il y a une cohérence. Nous parlons d’une seule voix au Québec », dit Michel Lafleur. Les scops françaises, qui tiennent leur congrès national les 15 et 16 novembre prochains, ont bien l’intention de faire de même.

Auteur

  • LUDOVIC HIRTZMANN