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À ENTREPRISES DIFFÉRENTES, OPCA DIFFÉRENTS

Enquête | publié le : 23.10.2012 | L. G.

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À ENTREPRISES DIFFÉRENTES, OPCA DIFFÉRENTS

Crédit photo L. G.

Les entreprises et les branches professionnelles entretiennent des relations très diverses avec leur Opca.

Comment les entreprises et les branches professionnelles utilisent-elles leur Opca ? Certaines sont très regroupées et actives autour de cet outil (pour des raisons aussi bien pédagogiques que financières ou politiques), d’autres l’utilisent a minima (gérer la professionnalisation). C’est ce qu’illustre le tableau ci-contre, qui mérite quelques explications.

Indicateur complexe

En bleu, les Opca de branche du champ des trois organisations patronales Medef, CGPME et UPA ; en jaune, les Opca de branche hors champ, dépendant d’autres organisations patronales ; en orange, l’Opca interprofessionnel-interrégional-interbranches du Medef et des cinq confédérations syndicales de salariés (Opcalia) ; en vert, l’Opca interprofessionnel-interrégional-interbranches de la CGPME et des cinq confédérations syndicales de salariés (Agefos-PME) ; en gris, les collecteurs de branches dont certaines sont du champ des trois organisations patronales Medef, CGPME, UPA, et dont d’autres sont du champ d’autres organisations patronales, Opcalim et Opca PL.

Comment y sont classés les Opca ? Tels qu’ils apparaissent dans la dernière colonne de droite : rapport collecte plan par rapport à la collecte professionnalisation. Pourquoi ? Parce que la collecte “professionnalisation” est obligatoire, que ses taux sont définis par la loi, et qu’ils ne dépendent pas de la volonté des partenaires sociaux de chaque Opca. Le niveau de collecte professionnalisation est fixe et encadré, seul son usage dépend de leurs choix. D’où la multitude de débats dans tous les Opca sur la ventilation du 0,5 % professionnalisation entre DIF, DIF portable, période et contrat de professionnalisation, voire financement de l’apprentissage.

La collecte “plan”, en revanche, dépend de la capacité d’initiatives des partenaires sociaux qui gèrent l’Opca (mais aussi des techniciens des équipes internes): part d’entreprises de moins de 10 salariés devant verser obligatoirement leur plan de formation ; accords de branche fixant des montants de collecte conventionnelle obligatoire pour les entreprises de plus de 10 ou de plus de 20 salariés ; pratiques des entreprises versant des parts libres de leur plan, voire au-delà ; qualité des prestations et services offerts par l’Opca… Ainsi, la collecte plan dépend, pour partie, de l’intensité de la construction paritaire de l’Opca (signature d’accords, rôle de la Commission paritaire nationale de l’emploi et la formation – CPNEF –, volonté de se forger un destin commun…), et, pour l’autre, de la qualité des services rendus par l’Opca auprès des entreprises (niveau des prestations, capacité à trouver des cofinancements État ou région, services dématérialisés facilitant les échanges…).

Le rapport plan/professionnalisation exprime donc une forme « d’intensité d’engagement financier et paritaire » des entreprises et des partenaires sociaux des branches vis-à-vis de leur Opca, et témoigne ainsi d’une culture, d’un historique et d’habitudes spécifiques. Plus les entreprises d’une branche et les partenaires sociaux qui l’animent construisent des politiques communes via leur outil Opca, et/ou plus les entreprises y trouvent des services répondant à leurs besoins, plus le rapport plan/professionnalisation s’élève.

Pour compléter la lecture : la première colonne rappelle le montant de collecte totale 2012/2011 et son classement ; la deuxième exprime le rapport plan/total et son classement. Ce rapport plan/total est également un témoin de l’engagement d’une branche autour de son Opca, mais il peut être parasité par la collecte CIF : plus la collecte CIF est importante, plus le total augmente et plus le rapport plan/total est faussé.

Analyse des résultats

Au final, le croisement de ces variables aboutit à l’identification de quatre familles d’Opca selon leur rapport plan/professionnalisation.

Famille 1 : ceux dont la collecte plan vaut plus de trois fois celle de la professionnalisation (Fafsea, Unifaf, Constructys).

Famille 2 : ceux dont le montant de la collecte plan atteint entre deux et trois fois celui de la collecte professionnalisation (de Opca PL à Opca 3 +).

Famille 3 : ceux dont le montant de la collecte plan atteint entre une et deux fois celui de la collecte professionnalisation (d’Uniformation à Opcaim).

Famille 4 : ceux dont la collecte plan est inférieure à la collecte professionnalisation (d’Opca Défi à Opcabaia).

Vu la récente restructuration des Opca en termes de champs couverts et de masse financière gérée, il est difficile de donner des éléments sur les variations de ce classement par rapport à l’année dernière. Cependant, il permet de constater que le mot Opca n’a pas partout le même sens.

Premier constat : entre celui atteignant plus de 195 millions d’euros de collecte, mais ayant un rapport plan/professionnalisation de moins de 90 %, et un Opca frôlant les 194 millions d’euros de collecte, mais affichant un rapport plan/professionnalisation de 257 %, il existe bien des différences de politiques internes et de nature de réponses aux entreprises adhérentes et, par conséquent, aux salariés de ces entreprises. Il faut cependant se méfier de ces grands chiffres, car, à l’intérieur même de la plupart des Opca, les pratiques (notamment de versement du plan) sont très disparates. Le mercato des Opca étant récent, nombre de pratiques anciennes persistent. Bertrand Martinot, ex-délégué à l’emploi et à la formation professionnelle depuis la toute récente nomination d’Emmanuelle Wargon, a toujours fermement tenu le discours suivant : « Il n’y aura pas d’Opca à l’intérieur des Opca ». De fait, il y en a ; et on est loin d’une situation homogène dans le même collecteur.

Deuxième constat : les Opca « hors champ », c’est-à-dire ceux dont les fédérations patronales créatrices et gestionnaires ne sont pas adhérentes du Medef, de la CGPME ou de l’UPA, sont très majoritairement dans le haut du tableau. On trouve dans ce “hors-champ” l’agriculture ; le sanitaire, social et médico-social privé à but non lucratif ; les professions libérales ; le spectacle-audio-visuel-presse… Pour ces secteurs, l’Opca est très structurant des relations sociales ; bien que, là aussi, le bémol précisé au premier constat sur l’absence d’homogénéité des pratiques soit constaté.

Place du “hors-champ”

Le paradoxe veut pourtant que le “hors-champ” n’ait pas la place qu’il mérite et revendique dans les débats sur les Opca, et notamment dans celui sur le versement qu’ils doivent faire au FPSPP. Cette année, ce taux est fixé à 13 % (lire ci-dessous), le hors champ est actuellement consulté par le champ et l’État, mais sa marge de manœuvre est inexistante. Ce constat pose la question de la représentativité des organisations patronales, un autre très gros dossier de la question sociale en France.

Troisième constat : la grande majorité des grosses branches industrielles et de services (métallurgie, plasturgie, chimie, banque, assurance, travail temporaire, ingénierie…) sont dans le bas du tableau. Pour elles, l’Opca n’est pas majeur dans la gestion de leurs plans de formation. Ce qui ne signifie pas qu’elles restent inactives en matière de formation : souvent, les grosses entreprises de ces secteurs ont des plans de formation internes copieux et ce depuis fort longtemps. Mais la situation des PME de ces gros secteurs industriels et de services n’est pas identique.

La dernière réforme et restructuration des Opca est largement passée à côté de ces problématiques spécifiques et qualitatives, c’est ce que lui reprochent ses détracteurs.

Auteur

  • L. G.