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Enquête

LE CHOIX D’UNE CELLULE EXTERNE

Enquête | publié le : 16.10.2012 | MARIETTE KAMMERER

Au sortir d’une grave crise sociale, France Télécom a ouvert une cellule d’écoute externalisée sur les discriminations. Elle sert surtout aux salariés à confier leur mal-être et leur mécontentement.

Pour offrir une voie supplémentaire d’expression au malaise de ses salariés, France Télécom a créé en 2010 un système d’écoute anti-discriminations. L’opérateur a choisi d’externaliser ce service en faisant appel au prestataire Allodiscrim, créé par l’avocat Max Mamou. « Nous avions déjà des cellules d’écoute psychologique en interne, mais nous voulions offrir aux salariés un canal supplémentaire, externe et anonyme, pour exprimer leurs difficultés, avec une garantie de neutralité et d’impartialité dans les réponses », explique Laurent Depond, directeur diversité du groupe.

La direction a présenté l’outil en comité d’entreprise, informé les délégués syndicaux et communiqué auprès des salariés via l’intranet et les panneaux d’affichage. Ce service est accessible par téléphone aux salariés en poste, à ceux ayant quitté l’entreprise et aux candidats non retenus, le numéro d’appel étant indiqué sur les lettres de refus d’embauche. Les personnes qui appellent ne sont pas obligées de donner leur identité mais doivent s’identifier par un code. Des avocats spécialisés entendent leur récit détaillé et établissent si, en droit, la situation dont ils sont victimes relève de la discrimination. « Par exemple, quand une différence de traitement repose sur une différence de statut entre fonctionnaires et contractuels, ce n’est pas une discrimination. Le dispositif permet de l’expliquer », précise le directeur diversité.

Des cas de détresse

Professionnels de l’écoute, ces avocats détectent aussi, derrière le prétexte de la discrimination, une éventuelle détresse psychologique. Dans ce cas, ils peuvent orienter le salarié vers d’autres cellules d’écoute en interne.

Quand il y a bien présomption de discrimination, le juriste conseille au salarié de lever l’anonymat et d’interpeller la direction de l’entreprise via le directeur diversité ou de saisir le Défenseur des droits. « La première année, 90 % des appels concernaient le système de classification instauré vingt ans auparavant et toujours pas accepté par quelques fonctionnaires », rapporte Laurent Depond. Sur 177 personnes ayant utilisé le dispositif depuis son ouverture, seules 19 ont poursuivi leur démarche devant le directeur diversité de France Télécom et quatre devant le Défenseur des droits. Pour les autres, il s’est avéré que la situation qu’ils ont soumise aux juristes ne relevait pas de la discrimination selon la définition en droit.

Sur les 19 cas traités, 12 concernaient des refus d’embauche de candidats évoquant leur origine, les autres, provenant de salariés en poste, portaient sur le handicap, l’âge, le sexe. « Pour chaque cas, étudié avec le service concerné et notre agence interne de recrutement, nous avons pu prouver qu’il n’y avait pas eu de discrimination avérée. » En revanche, les réclamations révèlent souvent des problèmes de communication avec le management. « Pour éviter ces malentendus, nous avons formé tous nos managers, et nous leur demandons d’être très transparents dans leurs décisions. » Côté syndical, la CFDT voit plutôt d’un bon œil ce dispositif : « C’est une bonne chose qu’il soit externalisé, mais il faudrait que son fonctionnement soit encadré par un accord d’entreprise, cela nous permettrait d’avoir davantage de contrôle et de suivi, et de rappeler le rôle des OS en matière de lutte contre les discriminations », indique Catherine Dupuy-Borel, déléguée syndicale centrale. L’année dernière, le canal syndical a fait remonter dix réclamations.

FRANCE TÉLÉCOM

• Activités : télécommunications, Internet, téléphonie mobile, présent dans 33 pays.

• Effectif : 105 000 salariés en France.

• Chiffre d’affaires : 45,3 milliards d’euros en 2011.

Auteur

  • MARIETTE KAMMERER