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Enquête

« Le dialogue social est un axe majeur pour faire des plans socialement responsables »

Enquête | publié le : 09.10.2012 | ÉLODIE SARFATI

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« Le dialogue social est un axe majeur pour faire des plans socialement responsables »

Crédit photo ÉLODIE SARFATI

E & C : Quelle place occupent les plans de départs volontaires dans les procédures de suppression d’emplois ?

M. R. : Ils ont incontestablement trouvé leur place. Certes, il faut pour cela que l’entreprise ait une taille critique, car leur mise en œuvre nécessite une ingénierie RH et des moyens que les PME n’ont pas forcément – un plan de départs volontaires coûte plus cher qu’un PSE classique. Mais, dans les grandes entreprises, ils deviennent parfois un moyen d’ajustement quasi permanent des effectifs. Alcatel-Lucent a mis en œuvre près d’une dizaine de plans depuis 2005. Et lorsqu’une entreprise s’est restructurée plusieurs fois par des départs volontaires, il n’est plus question de revenir à des licenciements contraints.

E & C : Vu la dégradation du marché du travail, les entreprises vont-elles continuer à trouver autant de volontaires qu’avant ?

M. R. : Rien n’est moins sûr. Pour décider ou non d’être volontaire, les salariés prennent en compte trois paramètres : leur employabilité, réelle ou supposée, l’attractivité du bassin d’emploi et leur perception du projet d’entreprise. Vont-ils y trouver leur place après la restructuration ? En fonction de l’équilibre de ces facteurs, les volontaires seront plus ou moins nombreux. Mais aujourd’hui, la situation est tellement dégradée que je pense que les entreprises trouveront moins de candidats au départ qu’il y a six mois ou un an. Air France ou PSA risquent d’avoir des difficultés, car ces groupes ont déjà mis en œuvre des plans par le passé, et risquent d’être arrivés au bout de leur réservoir de personnes mobiles. Constatant l’augmentation de la durée du chômage, les salariés deviennent plus attentistes.

E & C : Certains plans de départs volontaires favorisent le départ des salariés proches de la retraite. Doit-on y voir un nouveau levier pour organiser des départs anticipés ?

M. R. : Deux populations sont plus particulièrement attirées par les départs volontaires : les jeunes, mobiles et très employables, et les plus âgés, qui n’en peuvent plus et se disent qu’ils tiendront jusqu’à la retraite avec leurs indemnités. Pour ces derniers, on remarque d’ailleurs le même phénomène avec les ruptures conventionnelles. Mais donner la prime aux volontaires seniors, c’est, sauf dispositif de préretraite maison, reporter vers Pôle emploi le coût d’une mauvaise gestion de la main-d’œuvre. Car cet attrait vers le départ est à mettre en lien avec le déficit de prévention, en France, de l’usure professionnelle. Même si l’on manque de statistiques, cela vient sans doute contrecarrer les ambitions de maintien dans l’emploi des seniors. D’ailleurs, les Direccte sont plus vigilantes sur ce point.

E & C : Les plans de départs volontaires peuvent-ils créer du dialogue social autour des restructurations ?

M. R. : Ils sont davantage propices au dialogue social que les PSE classiques, car ils génèrent moins de tension et s’inscrivent dans un processus de changement qui se fait dans le temps. À qui ouvre-t-on le volontariat ? Quels sont les métiers en tension et ceux en difficulté ? Rentrer dans cette négociation incite à réfléchir sur les dispositifs de formation et de mobilité interne mis en place en parallèle des départs. Le dialogue social est donc un axe majeur pour faire des plans socialement responsables. Mais, dans la pratique, il n’est pas toujours au rendez-vous. Faute de réflexion et de perspectives sur l’avenir de l’entreprise, beaucoup de plans de départs volontaires anesthésient le dialogue social, réduisant le rôle des syndicats à relever les compteurs des départs, ce qui est, pour eux, destructeur.

Auteur

  • ÉLODIE SARFATI