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Enquête

JURIDIQUE : DES CRITÈRES À BALISER

Enquête | publié le : 09.10.2012 | E. S.

Prendre acte de la rupture de son contrat de travail et faire reconnaître un licenciement sans cause réelle et sérieuse parce que son départ n’a pas été accepté dans le plan de départs volontaires : tel est, constatent les avocats, le contentieux qui monte. « Les salariés dans ce cas essayent de faire reconnaître une inégalité de traitement ou une application non conforme des dispositions du plan », précise Déborah David, avocate chez Jeantet Associés.

Conditions d’éligibilité

Pour éviter ces situations, Pascale Lagesse, avocate chez Bredin Prat recommande d’abord de définir précisément le périmètre du volontariat, en prévoyant un nombre de départs possibles dans des catégories professionnelles préalablement délimitées : « Celles où les postes sont supprimés et les catégories proches qui laissent supposer qu’un reclassement sera possible », détaille-t-elle.

Dans ce cadre, l’entreprise peut négocier ensuite des critères d’éligibilité, qui devront être « objectifs, pertinents, vérifiables et non discriminatoires ». La loi n’impose pas de critères, mais, pour Déborah David, « le critère d’ancienneté est fondamental, selon que l’entreprise veut inciter à partir les plus hauts salaires ou, au contraire, retenir ceux qui détiennent les savoirs. En revanche, je déconseille de favoriser les critères fondés sur les compétences professionnelles, trop subjectifs, et qui ouvrent la voie à des contentieux ingérables, comme des salariés comparant leur évaluation avec celle de leurs collègues acceptés dans le plan ».

Compétences clés

Les entreprises peuvent aussi introduire une clause sur les “compétences clés”, rendant inéligibles au départ ceux qui les détiennent. Mais ce critère est sujet à caution. Il doit donc être, là encore, objectif et bien motivé. « Certes, la Cour de cassation a admis qu’une entreprise puisse écarter du volontariat tout salarié dont le départ entraînerait un recrutement externe, indique Pascal Lokiec, professeur de droit à l’université Paris Ouest Nanterre-La Défense. Cependant, s’opposer au départ volontaire d’un salarié au seul prétexte que, compte tenu de son expérience, il est “important pour la bonne marche de l’entreprise” a été jugé irrecevable. En tout état de cause, les motifs de refus doivent être inscrits dans le plan. »

Ajoutons que l’administration ne voit pas toujours d’un bon œil le filtrage des candidatures : « L’entreprise n’a pas vocation à verrouiller les départs dans les catégories d’emplois concernées par les mutations, estime Pierre Ramain, en charge de la sous-direction Mutations de l’emploi à la DGEFP. Mais elle peut s’opposer à des départs dans d’autres catégories, ouvertes pour permettre le reclassement de salariés dont le poste est supprimé. »

Projet professionnel

Parmi les critères d’éligibilité figure bien souvent la présentation par le candidat au départ d’un projet professionnel, voire personnel, soumis à la validation d’une commission de suivi. Mais, en la matière, la loi n’impose pas de procédure spécifique. L’administration toutefois « passe des messages de rigueur dans la validation des projets et la qualité de l’accompagnement, souligne Pierre Ramain. Nous élevons notre degré d’exigence si une entreprise a déjà mis en œuvre un plan qui a conduit les partants au chômage ». Il arrive en effet que la DGEFP mène, dans le cas de grands plans, des enquêtes ponctuelles sur le devenir des personnes parties volontairement.

Consentement du salarié

Mais le caractère volontaire du départ est-il toujours incontestable ? Si le salarié à qui d’importantes indemnités de départ ont été accordées est réticent à demander la nullité de la rupture, il n’en reste pas moins que le consentement des salariés est peu protégé, insiste Pascal Lokiec. « La volonté du salarié ne fait l’objet d’aucun contrôle autre que celui, modeste, des vices du consentement. Même les ruptures conventionnelles sont plus cadrées, puisque la procédure prévoit un entretien, un délai de rétractation, l’homologation de l’administration ». Il estime « indispensable de prévoir une procédure d’acceptation formalisée, d’autant que le salarié qui part à l’occasion d’un volontariat ne pourra pas contester le motif de son licenciement, le contrat étant rompu d’un commun accord ».

Auteur

  • E. S.