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Enquête

LA HAUSSE DES COTISATIONS SOCIALES FAIT GRINCER DES DENTS

Enquête | publié le : 10.07.2012 | C. F.

Rigueur oblige, le forfait social qui s’applique à l’épargne salariale va passer de 8 % à 20 % dès cet été. Le projet de loi de finances rectificative qui sera examiné à partir du 16 juillet par les députés renchérit en effet de 12 % les cotisations sociales qui s’appliquent aux abondements des PEE et Perco, à l’intéressement, à la participation, aux retraites supplémentaires d’entreprise et aux primes de partage des dividendes. Les entreprises distribuant plus de 18 milliards d’euros par an, la mesure rapportera 2,3 milliards d’euros en année pleine et 500 millions d’euros dès 2012 au budget de la sécurité sociale. Elle s’appliquera au 1er septembre. « Cette forte hausse nous obligera certainement à revoir notre politique d’épargne salariale », prévient Laure Boutinet, directrice rémunération et avantages sociaux de Vinci. De fait, l’entreprise, qui verse 273 millions d’euros, dont 94 millions pour l’actionnariat salarié, verra sa facture s’alourdir de 33 000 euros.

« Toutes les entreprises vont revoir leur politique, c’est inévitable, commente Gilles Briens, avocat associé du cabinet Fromont-Briens. Pour payer la facture, le salarié percevra moins d’abondement et moins d’intéressement. » La majeure partie des accords signés prévoient des clauses dites de « législation constante », qui protègent l’employeur contre les modifications législatives postérieures à la signature de l’accord.

Pour d’autres, c’est quasi automatique, ajoute Hubert Clerbois, président du cabinet EPS Partenaires. Elles ont indiqué dans l’accord d’intéressement que toute hausse de charges se déduira du montant accordé : « D’ici à un ou deux ans, les entreprises auront réduit la voilure pour que cette hausse devienne indolore. Trop d’impôt tue l’impôt ! »

Avec ce taux de 20 %, les prélèvements de cotisations sont désormais à mi-chemin de ce qui se pratique sur les salaires (entre 45 % et 50 %). « Mais, quand les prélèvements sur les salaires donnent des droits sociaux à la retraite, au chômage, à la maladie, etc., cette hausse ne donne droit à rien et vise juste à combler les dettes », ajoute-t-il.

L’association Fondact espère que le gouvernement renoncera à une mesure « gravement dommageable pour l’épargne salariale » de 12 millions de Français. Elle propose de procurer des ressources à l’État, notamment en étendant les mécanismes de partage des profits aux petites entreprises et au secteur public et en modernisant la formule de calcul de la participation pour renforcer la motivation des salariés.

Pierre Havet, président du groupe épargne salariale de l’Association nationale des DRH, rappelle pour sa part la nécessité de fixer définitivement les règles du jeu. « Taxer l’épargne salariale comme du salaire, cela peut se défendre. Ce qui est essentiel, c’est qu’on le dise d’emblée et qu’on arrête de modifier les règles du jeu chaque année », commente-t-il.

L’ANDRH avait plaidé pendant la campagne présidentielle (lire Entreprise & Carrières n° 1091) pour que le forfait social soit progressif afin de moins pénaliser l’épargne bloquée destinée à compléter les retraites.

Parallèlement à ces annonces, une nouvelle hausse de la CGS-CRDS s’appliquera à la sortie du dispositif à partir du 1er juillet. La CSG-CRDS prélevée au moment du déblocage des fonds passe de 13,5 % à 15,5 %.

Particularité française

« L’épargne salariale est une particularité française, sa réussite est liée à sa fiscalité avantageuse. Cette hausse va perturber son essor et les salariés risquent d’y perdre », indique Philippe Bernheim, secrétaire général de la Fédération française des associations d’actionnaires salariés et d’anciens salariés (FAS).

Ce n’est pas l’avis des syndicats, qui considéraient anormal que l’épargne salariale échappe aux cotisations sociales. « Ces placements étant un peu moins incitatifs, les entreprises pourront peut-être redéployer des moyens nouveaux pour les salaires », commente-t-on ainsi à la CGT. Stanislas de Germay, directeur conseil chez Assembly Conseil, ne craint pas un coup d’arrêt de l’épargne salariale : « Il ne faut pas trop s’inquiéter et regarder l’environnement global. La fiscalité des plans d’épargne d’entreprise va rester très compétitive au moment où les autres placements vont être tous plus fortement taxés. »

Auteur

  • C. F.