Le CQP (certificat de qualification professionnelle) de formateur-consultant, créé en 2006 par la branche des organismes de formation privés (FFP/Fédération de la formation professionnelle, CFDT, FO, CFTC et CFE-CGC) dans le cadre de la CPNEF (Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation) prend peu à peu sa place dans le paysage des certifications professionnelles. Il est le résultat d’une longue gestation commencée à la fin des années 1990 et qui fut interrompue à plusieurs reprises en raison de “fâcheries” paritaires : le blocage en 2005 de la négociation de l’accord de branche sur la formation à la suite de la loi du 4 mai 2004, puis une longue suspension des travaux paritaires entre 2009 et 2011 qui a considérablement ralenti tous les chantiers de la branche, et en particulier la création des CQP.

Le 21 avril 2006, le CQP de formateur-consultant, premier CQP de la branche, voit enfin le jour. En 2008, c’est la reconnaissance : il est inscrit au RNCP (Répertoire national des certifications professionnelles). Il s’articule autour de trois blocs de compétences constituant le référentiel de compétences : “commercial et communication”, “ingénierie de formation” (construction d’un projet de formation, animation et évaluation d’une action de formation), “gestion des ressources” (humaines, intellectuelles, matérielles et financières).

Dans un premier temps, jusqu’à l’accord du 27 mars 2012 qui a permis l’accès à ce CQP par la formation, celui-ci n’était possible que par la VAE pour des candidats justifiant de trois ans d’activité professionnelle dans le domaine de la formation, dont deux en tant que formateur. « Il n’existait pas de formations suffisamment complètes préparant aux trois blocs de compétences, notamment aux compétences commerciales et de gestion », précise Michel Allix, secrétaire général du Synafor CFDT. On trouve sur le marché plusieurs centaines de formations de formateurs, mais « elles sont trop centrées sur l’acte pédagogique et pas suffisamment sur les fonctions commerciales et de gestion. Or, les organismes de formation travaillant sur fonds publics sont à la recherche de formateurs maîtrisant les compétences proposées par le CQP ».

Pour un organisme de formation, « le fait d’avoir dans ses équipes pédagogiques des formateurs détenteurs de ce certificat est un atout supplémentaire lorsqu’il répond à un appel d’offres », note Marie-Christine Papin, coprésidente (FFP) de la CPNEF, par ailleurs DRH du groupe Cesi. « On demande désor ? mais aux formateurs de réaliser du face-à-face pédagogique, mais aussi d’être très actifs sur le terrain commercial, de négocier avec les entreprises et d’être en capacité de leur proposer des offres intra-entreprises. Le formateur doit avoir le souci de la rentabilité d’une action de formation. » Or, un bon pédagogue n’est pas forcément un bon commercial ni/ou un bon consultant, et vice versa.

Un formateur peut également être un consultant qui s’ignore… Recevoir de ses pairs le CQP de formateur-consultant au terme d’une démarche de VAE revêt une valeur particulière, comme en témoigne Joël Rancœur, responsable du développement des formations industrielles du groupe IMT (Institut des métiers et des technologies dans le secteur des industries pharmaceutiques et cosmétiques), qui l’a obtenu ainsi en 2009 : « J’ai retrouvé dans le référentiel les grandes lignes de mon métier. J’ai pu traduire en compétences des activités que j’exerçais au quotidien depuis des années. La démarche de certification m’a permis de valider mes pratiques et d’être en veille sur le maintien de certaines compétences. »

Même constat d’Afif Medjahed, directeur pédagogique adjoint à l’IMT (CQP 2009 par la VAE): « J’exerçais déjà cette fonction depuis dix ans. Le CQP m’a permis de mettre du sens et des mots sur mon activité et d’obtenir une reconnaissance officielle de mon employeur. » Le certificat permet d’accéder au premier niveau cadre (F) de la convention collective des organismes de formation privés. C’est une démarche promotionnelle – dans le cas de l’IMT, fortement encouragée par l’organisme lui-même –, mais c’est aussi « un passeport pour évoluer dans un autre organisme de la branche », souligne Afif Medjahed.

Depuis le 27 mars 2012, ce CQP est accessible par la formation (professionnalisation, CIF, DIF, plan de formation, etc.) sur la base du même référentiel de compétences que pour la VAE. En revanche, l’organisme de formation est souverain pour adapter son référentiel de formation à chaque candidat en fonction de son parcours de formateur. « Il est conseillé aux organismes de ne retenir que les candidats qui ont de fortes chances de réussir la formation. Ce conseil est aussi valable pour la VAE », précise Marie-Christine Papin. L’objectif du CQP est en effet de permettre aux formateurs d’évoluer positivement. Il ne s’agit pas de les mettre en difficulté par rapport à leur employeur en cas d’échec aux épreuves.

Les candidats doivent être issus du milieu de la formation professionnelle (formateurs salariés ou indépendants), justifier d’une expérience de deux ans dans ce secteur et d’un niveau III de formation (initiale et continue) ou d’une expérience d’au moins cinq ans sans exigence de niveau.

Les formations sont dispensées sous forme modulaire ou en continu et comportent des stages pratiques dans un organisme d’accueil. L’évaluation de la formation est basée sur des rapports d’expériences portant sur les activités antérieures, des travaux réalisés en formation, des stages en entreprise, des études et recherches dans le domaine de la formation professionnelle. Un jury examine les dossiers de présentation, similaires à ceux utilisés pour la VAE.

« L’accès au CQP par la formation était attendu par de nombreux formateurs qui n’osaient pas se lancer dans la démarche de VAE », remarque Joël Rancœur. En revanche, d’autres n’ont pas envie de retourner en apprentissage face à un… formateur. « Je ne me voyais pas intégrer à 40 ans une formation, après quinze ans d’expérience professionnelle de formateur-consultant », confirme Afif Medjahed.

L’ouverture du CQP à la formation va-t-elle lui permettre de prendre son envol ? Une cinquantaine de dossiers ont en effet été traités depuis 2008 en raison de la suspension des travaux paritaires au sein de la branche pendant près de deux ans. Pour Michel Allix (CFDT), la dynamique CQP est lancée et les esprits sont désormais mûrs pour faire aboutir deux autres certificats en préparation : celui d’assistant de formation (suivi technique des formations en amont et aval, relations avec les Opca, etc.) et celui de formateur commun à tout secteur professionnel, beaucoup plus difficile à élaborer, d’autant plus qu’il existe déjà sur le marché des titres de formateurs d’adultes cotés, comme celui de l’Afpa.

« Il va falloir trouver les points communs entre un formateur d’auto-école et un formateur en anglais, par exemple. Nous nous préparons à de beaux débats dans la bataille interne récurrente sur le ratio face-à-face/temps de préparation », souligne Michel Allix. Rendez-vous fin juin pour une nouvelle réunion paritaire qui doit acter la mise en place d’un groupe de travail sur ces nouveaux CQP.

1 La certification des compétences des formateurs-consultants est un des enjeux majeurs de la branche de la formation professionnelle, notamment pour répondre aux appels d’offres publics.

2 L’accès à ce CQP via la formation, et plus seulement par la VAE, devrait lui permettre de décoller.

3 Dans la foulée, de nouveaux CQP de formateur et d’assistant de formation pourraient être créés grâce à un renouveau du dialogue paritaire dans la branche.