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Les Scop, miracle ou mirage ?

Actualités | publié le : 19.06.2012 | ÉLODIE SARFATI

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Les Scop, miracle ou mirage ?

Crédit photo ÉLODIE SARFATI

À SeaFrance ou à Fralib, les salariés s’organisent pour reprendre leur activité en société coopérative. Ce modèle, qui rencontre un écho favorable dans les projets gouvernementaux, n’est pourtant pas simple à mettre en place et demande aux salariés un engagement important.

A Seafrance, le projet de Scop refait surface. Le tribunal de commerce de Paris a en effet validé le 11 juin la reprise des navires par Eurotunnel, relançant par là le projet de reprise formé par d’anciens marins de la compagnie (lire ci-contre).

À l’autre bout de la France, un autre projet de Scop attire les regards. C’est celui des Fralib, l’usine de production de sachets de thé de Gémenos, promise à la fermeture par Unilever. Un groupe de travail – qui réunit notamment des syndicalistes (CGT et CFE-CGC), l’Union régionale des Scop, des représentants des collectivités locales, des services de l’État et de quatre ministères (agriculture, emploi, redressement productif, économie sociale et solidaire) – étudie depuis le 1er juin les contours de ce projet alternatif. Lequel nécessite d’obtenir l’appui d’Unilever pour que la Scop puisse monter ses circuits d’approvisionnement et de commercialisation, ou encore qu’elle récupère la marque Éléphant. Olivier Leberquier, délégué CGT, se veut confiant : « Depuis la nomination d’un médiateur par Arnaud Montebourg le 25 mai dernier, et le retour d’Unilever à la table des discussions, les lignes ont bougé et Unilever va devoir négocier. »

Le projet des Fralib prévoit de reprendre la totalité des 100 salariés encore à l’effectif, dont la motivation ne fait guère de doute, souligne Olivier Leberquier, après plus de 600 jours de mobilisation. Toutefois, aussi séduisante soit-elle sur le papier, la reprise d’une entreprise par ses salariés est loin d’être évidente, malgré ces quelques cas médiatisés. Seulement 33 des 406 Scop créées en 2010 et 2011 sont des “réanimations” d’entreprises défaillantes. Les freins sont d’ordre divers : le refus d’un groupe de céder son activité ou encore des délais trop courts.

Examen des mesures alternatives

« Il faut en général attendre la mise en redressement judiciaire d’un site pour entamer la recherche de repreneurs, ce qui ne laisse que peu de temps aux salariés pour élaborer un projet », explique Gilles Véron, consultant au cabinet d’expertise Syndex. Il plaide pour que la recherche d’un repreneur puisse se tenir dès l’annonce des restructurations, dans le cadre de l’examen des mesures alternatives discutées en comité d’entreprise. « Lorsqu’il y a un projet de cession, il faudrait informer les salariés en amont », abonde Patrick Lenancker, président de la Confédération générale des Scop.

Le projet de loi que projette de déposer Arnaud Montebourg, et qui vise à contraindre les groupes à céder leurs sites viables au lieu de les fermer, pourrait lever ces freins. D’autant que, dans les rangs du gouvernement, la formule des Scop rencontre un écho favorable. Le ministre du Redressement productif, comme Benoît Hamon, ministre de l’Économie sociale et solidaire, se sont prononcés en faveur de ce type de projets. Pendant la campagne présidentielle, François Hollande s’était dit « favorable à l’instauration d’un droit de priorité bénéficiant aux salariés, à égalité d’offre, pour reprendre leur entreprise en coopérative ». En amont, ajoutait-il, « les représentants du personnel et le dirigeant de l’entreprise devraient disposer d’un droit d’audit de la valeur de l’entreprise, cofinancé par l’entreprise et la collectivité ».

Pour Patrick Lenancker, ces signes positifs, qui restent à traduire dans la loi et à compléter par des circuits de financement, pourront favoriser l’émergence de projets coopératifs de reprise, mais n’entraîneront pas de « raz-de-marée ». Certaines entreprises défaillantes ne sont pas « rattrapables, et on ne peut pas engager les salariés, leur argent et leur famille dans une aventure de courte durée ».

Et, dans les cas où la rentabilité de l’entreprise existe, « il n’est pas évident de passer du statut de salarié à celui d’entrepreneur, souligne Gilles Véron. Il faut des porteurs de projet, des leaders. C’est ce qui a manqué chez Chomarat, en Ardèche, où le projet de Scop pour reprendre l’activité d’impression et sauver 25 emplois n’a finalement pas vu le jour ». Reprendre son entreprise ne garantit pas non plus la sauvegarde de tous les emplois.

Malgré tout, lorsque les projets se concrétisent, ils ont tendance à durer. Le taux de pérennité des Scop à cinq ans est de 56 % et de 53 % pour les Scop issues de reprises de sociétés en difficulté, contre 52 % pour l’ensemble des entreprises françaises.

Comment fonctionnent les Scop ?

Dans les sociétés coopératives et participatives, nouvelle appellation des Scop (sociétés coopératives et participatives) depuis 2010, les salariés détiennent au moins 51 % du capital et 65 % des droits de vote, basé sur le principe « un homme, une voix ». Les salariés désignent leurs dirigeants, décident des orientations stratégiques de la Scop et du partage des bénéfices entre la participation, les dividendes et la réserve, impartageable et non incorporée dans les parts sociales pour garantir la préservation de l’emploi et le réinvestissement dans l’entreprise. En 2010, 40,7 % des excédents nets ont été mis en réserve dans les Scop, 46,5 % distribués sous forme de participation et 13,8 % ont rémunéré le capital investi.

La CG-Scop compte, à fin 2011, 2 046 coopératives adhérentes, qui emploient 42 200 salariés dans tous les secteurs. La plus importante, Acome, employait 1 350 salariés en 2010, pour un chiffre d’affaires de 359 millions d’euros.

Auteur

  • ÉLODIE SARFATI