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Grande-BretagneBAE SYSTEMS ET UNITE PARIENT SUR LES COMPÉTENCES

Pratiques | International | publié le : 29.05.2012 | STÉPHANIE SALTI

Grâce à une politique négociée avec le syndicat Unite sur la gestion et l’acquisition de compétences, l’entreprise de défense britannique a gagné en productivité dans un climat social apaisé.

Pour Military Air & Information (MAI), la division du géant de la défense britannique Bae Systems spécialisée dans l’aérien, les cinq dernières années ont marqué un changement d’orientation : alors que cette entité de 16 000 salariés s’était largement concentrée sur le marché de l’aviation militaire britannique par le passé, l’urgence a été de donner une dimension mondiale à l’entreprise en se focalisant davantage sur les exportations.

Or, la culture maison ne le permettait pas : la division, qui possède les sites de production de Warton et Samlesbury, s’était heurtée à de nombreux conflits sur les questions liant compétences et rémunérations, provoquant un malaise entre salariés, partenaires sociaux et direction.

Les processus opérationnels n’étaient pas non plus au point pour des marchés internationaux : certains salariés devaient attendre que d’autres finissent leurs tâches pour pouvoir commencer la leur, ce qui causait de nombreux retards dans la chaîne de production.

Changement de culture

2008 marque un tournant : « Il y a eu un changement de culture dans la mesure où l’on a pris conscience que les salariés n’utilisaient pas pleinement leurs compétences et on a cherché à leur donner plus de responsabilités », explique Phil Entwistle, responsable syndical Unite.

Après dix-huit mois de négociations serrées, l’entreprise se lance dans une cartographie des compétences utilisées par l’ensemble des 13 métiers présents dans les deux usines. Cette analyse conduit à réaliser un certain nombre de portefeuilles de compétences : chaque salarié se voit confier l’un d’eux, précisant notamment pour chacun une technique supplémentaire qu’il est susceptible d’apprendre. Sous le nom de Working Practice Change, ce dispositif sur trois ans est proposé sur la base du volontariat : si 97 % des salariés ont souhaité rejoindre ce plan dès sa mise en place, la totalité d’entre eux – soit 4 000, l’effectif de production des deux usines – étaient inscrits dans le programme dès la deuxième année. C’est que, dans la négociation, le syndicat n’a pas négligé les contreparties : le projet s’accompagne d’une augmentation de salaire de 2,5 % par an. Le salarié est ainsi encouragé à utiliser ses nouvelles compétences, qui lui sont dispensées par le biais d’une formation interne.

Le schéma est graduel : une seule nouvelle compétence est acquise par an et les salariés se voient offrir la possibilité de devenir à leur tour formateur (improvement practitioner). L’entreprise perçoit très vite les bénéfices du dispositif. Outre une amélioration notable des relations sociales, un véritable rééquilibrage des forces s’opère : en lieu et place d’une approche directive par laquelle un responsable d’équipe impose ses vues, des équipes sont élaborées pour résoudre les problèmes et concevoir des solutions.

Des comités mixtes, impliquant à la fois des représentants syndicaux et la direction, sont également mis sur pied afin de passer en revue l’utilisation des compétences dans chaque domaine, une fois par an. La productivité de l’entreprise s’améliore : deux ans après la mise en place du programme, le nombre d’heures salariées nécessaires à la finalisation d’une unité de l’EuroFighter a été réduit de 20 % et les économies se comptent en millions de livres, selon BAE Systems.

Le rôle déterminant des organisations de salariés dans le succès de cette initiative est mis en lumière dans une étude réalisée par Unionlearn, l’organisme de formation dépendant de la vaste confédération Trade Union Congress (TUC).

« La productivité et l’efficacité organisationnelle sont d’autant plus améliorées que la politique de formation d’une entreprise a été négociée avec un syndicat reconnu, plaide l’auteur de l’étude, qui détaille trois cas d’entreprise. Chez BAE Systems, les syndicats ont été très impliqués dans la redéfinition des postes de travail de façon à mieux utiliser les compétences. Le principe selon lequel les personnes effectuant le travail étaient aussi les mieux placées pour l’améliorer a conféré aux syndicats une légitimité pour travailler avec les salariés et redessiner leurs postes. »

Auteur

  • STÉPHANIE SALTI