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Enquête

LES SALARIÉS SONT DAVANTAGE À L’INITIATIVE DE LEUR DÉPART

Enquête | publié le : 22.05.2012 | E. F.

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LES SALARIÉS SONT DAVANTAGE À L’INITIATIVE DE LEUR DÉPART

Crédit photo E. F.

Les ruptures conventionnelles, plébiscitées par les DRH, sont également très demandées par les salariés. Et, dans de nombreux cas, l’initiative est conjointe.

S’il y a bien une réforme du précédent quinquennat que les DRH soutiennent, c’est la rupture conventionnelle. Cette modalité nouvelle de rupture d’un contrat de travail, créée par les partenaires sociaux et utilisée plus de 800 000 fois depuis 2008, est jugée pertinente par 81 % des DRH que nous avons interrogés. Pratiquement tous (83 %) l’ont utilisée. Que les DRH approuvent un assouplissement sécurisé de la séparation, que François Hollande n’a de fait pas prévu de supprimer, n’a rien de surprenant. Ce qui l’est davantage, c’est leur réponse à la question, posée pour la première fois, de savoir qui en est à l’initiative : « les salariés » répondent-ils à 44 % ; « l’entreprise », selon 16 % ; « les deux parties », selon 39 %.

Faut-il en déduire que les ruptures conventionnelles se substituent majoritairement aux démissions ? « Cela pose la question du coût de cette réforme pour la collectivité », estime Luc Vidal, directeur général adjoint d’Inergie, en charge du pôle opinion. Contrairement à une démission, une rupture conventionnelle ouvre en effet des droits à l’assurance chômage. La réponse n’est pas si simple. « Il est étonnant que les DRH soient aussi nombreux à répondre que la rupture vient des deux parties ; peut-être n’ont-ils pas voulu dire que l’entreprise en est l’initiatrice », avance Camille Signoretto, doctorante en sciences économiques à l’université Panthéon-Sorbonne, coauteure d’un article sur la rupture conventionnelle*. « Je pense que les DRH sont de bonne foi, estime Jean-Christophe Sciberras, président de l’ANDRH et DRH France de Rhodia. Beaucoup de salariés qui voulaient quitter l’entreprise ne démissionnaient pas. Avec la rupture conventionnelle, ils sautent le pas. »

Hausse des licenciements économiques

Les statistiques nationales donneraient définitivement raison à Jean-Christophe Sciberras si la crise économique ne venait perturber l’analyse. Camille Signoretto rappelle qu’en 2008, les démissions représentaient 70 % des modalités de ruptures, le licenciement pour raisons personnelles 23 % et le licenciement économique 6,5 %. En 2010, les démissions ne pèsent plus que 60 %, les licenciements pour raisons personnelles 20 %, les licenciements économiques 7,6 % et les ruptures conventionnelles 11,4 %. L’arrivée de ce mode de rupture coïncide donc avec une baisse de la part des démissions, une hausse de celle des licenciements économiques et une baisse des licenciements personnels.

Mais la crise aussi est passée par là. « Or, dans ces circonstances, on constate toujours une baisse significative des démissions, car les gens hésitent à partir. C’est pourquoi il est difficile d’isoler l’effet de la rupture conventionnelle », estime la doctorante. Selon elle, « les ruptures conventionnelles se substituent un peu à chaque modalité de rupture. De plus, elles donnent lieu à des départs qui ne se seraient pas produits autrement ».

La surreprésentation des salariés âgés dans les ruptures conventionnelles en 2009 laisse supposer que des entreprises ont profité de l’aubaine. « Mais cette surreprésentation des seniors disparaît en 2010 et 2011 », constate Camille Signoretto.

Peu de contentieux

A contrario, le faible contentieux généré par les ruptures conventionnelles laisse penser qu’elles sont plutôt à l’initiative des salariés. Une idée que ne partage pas Camille Signoretto, qui estime qu’« il est difficile de revenir sur un accord et en particulier, pour le salarié, de prouver qu’il y a eu un vice de consentement. En outre, les salariés ne disposent que de douze mois pour envisager d’aller au contentieux ».

* Avec N. Berta et J. Valentin, “La rupture conventionnelle : objectifs officiels versus enjeux implicites », in Revue française de socio-économie, n° 9, avril 2012.

Graphes : p. 19, slides 13 et 15.

Auteur

  • E. F.