logo Info-Social RH
Se connecter
Newsletter

Enquête

LES ENTREPRISES EN RECHERCHE DE CONFORMITÉ

Enquête | publié le : 22.05.2012 | E. F.

Image

LES ENTREPRISES EN RECHERCHE DE CONFORMITÉ

Crédit photo E. F.

Confrontées à des obligations légales pour prévenir la pénibilité, les entreprises cherchent d’abord à être en règle. Mais les négociations buttent sur les demandes de compensation.

Depuis le 1er janvier 2012, les entreprises de plus de 300 salariés dont plus de la moitié d’entre eux sont exposés à des facteurs de pénibilité doivent négocier un accord ou produire un plan unilatéral. Elles risquent, sinon, une sanction financière d’au plus 1 % de la masse salariale. Malgré cela, la pénibilité n’est un sujet de mobilisation que pour 29 % des DRH, loin derrière le dialogue social, la GPEC, les rémunérations, la fidélisation des talents et les risques psychosociaux. « Compte tenu de l’échéance légale, on aurait pu s’attendre à ce que la pénibilité soit davantage une priorité », estime Ludovic Bugand, chargé de mission au département santé-travail de l’Anact. Il faut cependant noter que, depuis notre dernier baromètre Défis RH 2011, la mobilisation sur ce sujet a quand même progressé de 10 points.

Éviter les risques juridiques

À la question de savoir si elles sont soumises à l’obligation légale, 51 % des entreprises que nous avons interrogées ont répondu positivement. « Cela fait beaucoup », estime Ludovic Bugand. Il est vrai que celles de plus de 300 salariés sont surreprésentées dans notre échantillon. Mais, a contrario, seules sont concernées les entreprises dont plus de la moitié des salariés sont exposés. Or « ce critère est difficile à objectiver : le législateur n’a pas donné le mode d’emploi. Dans le doute, les entreprises préfèrent donc peut-être se déclarer éligibles afin d’éviter les risques juridiques ». Prudence louable mais excessive, car l’inspection du travail n’a pas de mandat pour vérifier les déclarations de l’entreprise sur la proportion de salariés exposés.

Difficultés à négocier

Alors que les premières sanctions financières pourraient (très) théoriquement tomber au mois de juin, un peu plus de la moitié des entreprises se déclarant concernées par l’obligation légale s’en sont acquittées : 23 % ont signé un accord (67 % dans l’industrie de l’énergie), 31 % ont mis en place un plan unilatéral, mais 45 % n’ont encore rien engagé.

« Cela ne veut pas dire que ces entreprises ne font rien, mais qu’elles éprouvent des difficultés à négocier, explique Ludovic Bugand. Elles ont en effet face à elles des syndicats qui demandent que la pénibilité débouche sur des compensations – aménagement de fin de carrières voire départs anticipés – et/ou des changements structurels dans l’organisation, ce qui n’est pas simple. »

Selon lui, il n’est pas étonnant que ce soient les industries de l’énergie qui signent des accords, « car elles ont les moyens de financer les compensations ». Dans le cas inverse, les entreprises optent plutôt pour un plan unilatéral. Restent ensuite toutes celles qui sont perdues dans le traitement des fiches individuelles d’exposition et le calcul de la proportion de salariés exposés. « On est loin de la question centrale qui est de connaître, non pas le pourcentage de salariés exposés, mais les causes de la pénibilité et de la prévenir », analyse le chargé de mission.

Apparition de débat et sensibilisation

Pour l’heure, les entreprises semblent donc être plus en recherche de conformité que d’efficacité. « Dans mes missions en entreprise, je rencontre davantage de juristes que de préventeurs », confirme Ludovic Bugand. Pour autant, l’action des pouvoirs publics n’est pas inutile selon lui : « La pénalité financière n’est pas un épouvantail pour les entreprises, mais cela peut être un argument pour les DRH vis-à-vis de leur direction générale. Cela ne débouche pas encore sur de l’action efficace, mais crée du débat et de la sensibilisation. Je pense qu’au bout d’un moment, cela va déboucher sur un engagement. C’est de cette façon que les entreprises ont commencé à bouger sur les seniors ».

DES ACTIONS PLUS CURATIVES QUE PRÉVENTIVES

L’accord ou le plan d’action doit couvrir trois thèmes parmi six décidés par les pouvoirs publics. Les 55 % d’entreprises qui se sont mises en conformité se sont d’abord concentrées sur l’adaptation des postes de travail, donc sur des actions curatives et ciblées. « Il faut en passer par là, estime Ludovic Bugand, chargé de mission à l’Anact. Car beaucoup de salariés sont soumis à des facteurs de pénibilité. Cela dit, l’entreprise ne doit pas s’exonérer d’une réflexion sur la totalité du parcours professionnel. » Les entreprises ont ensuite traité du développement des compétences. « Ce n’est pas très impliquant si on en reste à de la formation sécurité, alors que ce domaine a toute son importance », estime-t-il.

Les mesures plus structurelles relatives à l’amélioration des conditions de travail – aménagement d’horaires, répartition de la charge de travail – arrivent en 3e position. « C’est une bonne chose, se réjouit Ludovic Bugand. Ces questions devraient se négocier avec les opérationnels, or ce n’est jamais le cas. »

Les DRH se sont ensuite intéressés à l’aménagement des fins de carrière, que Ludovic Bugand s’étonne de ne pas voir plus haut dans les priorités. Ce « classique » de la lutte contre la pénibilité peut inclure des entretiens de seconde partie de carrière ou des congés supplémentaires.

Viennent ensuite la suppression des facteurs d’exposition et le maintien en activité, visant plus particulièrement les personnes inaptes ou handicapées.

EF

Graphes n° 31 et 33.

Auteur

  • E. F.