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Seuls 20 % des DRH votent pour les accords compétitivité-emploi

Actualités | publié le : 17.04.2012 | EMMANUEL FRANCK

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Seuls 20 % des DRH votent pour les accords compétitivité-emploi

Crédit photo EMMANUEL FRANCK

Les DRH apprécient les baisses de charges ; ils rejettent le quota de CDD ; sont très sceptiques face aux accords de compétitivité ; n’ont rien contre un label social. Telles sont leurs principales réactions aux propositions des candidats à l’élection présidentielle concernant le travail. Un sondage exclusif ANDRH-Inergie* pour Entreprise & Carrières.

Lorsque Nicolas Sarkozy veut réduire le coût du travail par une baisse des charges, les DRH votent pour ; lorsque le même veut baisser le coût du travail par une réduction des salaires, ils sont contre. Interrogés en marge de notre baromètre annuel Défis RH sur ce qu’ils pensent des propositions des candidats à l’élection présidentielle, les DRH réagissent en praticiens du droit social et non en idéologues.

Sur 14 propositions phares émises par les cinq principaux candidats, les DRH placent les baisses de charges sociales en tête de leurs préférences. La mesure la plus pertinente selon eux (62 % de cet avis) est celle de François Bayrou de créer un emploi sans charges pendant deux ans pour les jeunes ou les chômeurs dans les entreprises de moins de 50 salariés. Une proposition proche de celle de Nicolas Sarkozy d’exonérer de charges sociales l’embauche des plus de 55 ans, formulée après notre sondage. Vient ensuite la TVA sociale du président sortant, une mesure déjà en partie mise en œuvre et que 56 % jugent pertinente.

Label social : des employeurs responsables

Plus étonnant, le label social, une idée de François Hollande qui a fait peu de bruit et qui n’a pas vocation à produire d’effets à court terme, est jugé pertinent par la moitié des DRH. « Alors que la pression économique augmente et que les risques psychosociaux sont de moins en moins acceptés, les entreprises veulent démon­trer qu’elles sont des employeurs responsables, au-delà des effets d’annonces », analyse Luc Vidal, directeur général adjoint d’Inergie, en charge du pôle opinion.

Mesure contre-productive

Mais la vraie surprise se trouve en queue de peloton, dans laquelle les DRH placent… les accords de compétitivité-emploi de Nicolas Sarkozy. Seuls 19 % pensent que cette mesure, dont le but est d’autoriser une baisse temporaire des rémunérations par accord collectif et sans avenant au contrat de travail, est pertinente. Pire : 49 % estiment que cette proposition phare du président-candidat, objet d’une négociation interprofessionnelle, est contre-productive.

« Les DRH appréhendent de négocier ce type d’accord avec les syndicats, explique Jean-Christophe Sciberras, président de l’ANDRH et DRH France de Rhodia. Ils savent qu’en France, il est très difficile de baisser les salaires sauf à passer par le chômage partiel. J’interprète donc leur réponse ainsi : ils trouvent que la mesure est intéressante, mais ils savent par expérience qu’elle sera compliquée à mettre en œuvre. » Une crainte que ne partagent pas les DRH de l’automobile, qui soutiennent (63 %) les accords de compétitivité. « Ce secteur, très sensible aux écarts de compétitivité, est en ce moment dans une situation difficile. Par ailleurs, les DRH y ont une grande pratique de la négociation », explique Jean-Christophe Sciberras.

Reste que, dans l’esprit des DRH, les accords de compétitivité sont à peine plus pertinents que le smic à 1 700 euros de Jean-Luc Mélenchon (15 % des répondants y sont favorables) et la priorité à l’embauche de personnes de nationalité française de Marine Le Pen (9 %). Des scores à rapprocher des intentions de vote que recueillent les candidats du Front national et du Front de gauche au premier tour des élections, et qui font dire à Luc Vidal que « toutes les tendances politiques sont représentées au sein du corps des DRH ». Le citoyen pointe sous le praticien.

Des idées qui laissent sceptiques

Les propositions de Jean-Luc Mélenchon et de Marine Le Pen sont en outre celles qui suscitent le plus de rejet de la part des DRH. Lorsque le premier propose un quota maximal de CDD et d’intérim, 68 % pensent que cela sera contre-productif. Ils sont 63 % à penser la même chose du smic à 1 700 euros, et 58 % de la préférence nationale. Le pouvoir de négociation aux comités d’entreprise, de François Bayrou, suscite également le scepticisme (57 %), de même que la retraite à 60 ans pour les salariés ayant cotisé 41,5 ans promise par François Hollande (54 %).

Les deux mesures les plus clivantes sont la modification de la durée du travail par la révision des accords 35 heures et le contrat de travail unique : ce sont celles qui suscitent le plus d’approbation et d’opposition, et le moins d’indifférence. La révision des accords 35 heures est une proposition de l’UMP que le président-candidat a partiellement reprise à son compte (via la loi Warsmann et les accords de compétitivité), mais sans appeler à la renégociation générale des accords de RTT. « Peu de DRH sont enthousiasmés par les 35 heures, qui pénalisent la compétitivité des entreprises ; c’est pourquoi près de la moitié trouvent pertinents de modifier la durée du travail. Mais, d’un autre côté, certains, dont moi, se souviennent comme il a été difficile de parvenir à un compromis incluant une modération salariale et la flexibilité ; 35 % ne trouvent donc pas pertinent de revenir dessus », explique Jean-Christophe Sciberras.

Contrat unique

Le contrat de travail unique (CTU), de François Bayrou, soutenu par 43 % des DRH, est rejeté par 29 % d’entre eux. Cette mesure structurelle, dont l’objet est d’annuler la dualité du marché du travail entre le CDI et les autres contrats, suscite à la fois de l’intérêt et du scepticisme. Jean-Christophe Sciberras, dont l’association défend le CTU, estime pour sa part que cette proposition n’est rejetée “que” par 29 % des DRH, ce qui ménage des marges de soutien.

C’est le label social de François Hollande qui arrive en tête des propositions les plus consensuelles : seuls 5 % des DRH la trouvent contre-productive, 42 % sans effet.

L’emploi sans charge pour les jeunes et les chômeurs, de François Bayrou, n’est rejeté que par 9 % des DRH – 26 % pensent que cette mesure n’aura pas de conséquences particulières. La négociation nationale sur le climat social, du même candidat, ne suscite l’opposition que de 13 % des DRH – 46 % pensent qu’elle sera sans conséquence.

Enfin, le contrat de génération de François Hollande, n’est jugé contre-productif que par 15 % des DRH, tandis que 35 % pensent qu’il n’aura pas d’effet.

* Étude réalisée par Internet du 13 au 30 mars auprès d’un échantillon répondant de 213 professionnels de la fonction RH, membres de l’ANDRH.

LA PROPOSITION

LA PLUS PERTINENTE

L’exonération de charges pour l’embauche d’un jeune ou d’un chômeur dans les entreprises de moins de 50 salariés.

LA PROPOSITION

LA PLUS REJETÉE

Le quota de CDD et d’intérimaires.

LA PROPOSITION

LA PLUS CLIVANTE

La remise en cause des 35 heures.

LA PROPOSITION

LA PLUS CONSENSUELLE

Le label social.

Bilan 2007-2012 : les DRH plébiscitent la rupture conventionnelle

→ De toutes les réformes sociales entreprises au cours de la mandature, celle qui emporte l’adhésion la plus massive des DRH est la rupture conventionnelle : 81 % jugent pertinent cet outil négocié jusqu’en 2008 par les partenaires sociaux et utilisé 811 000 fois depuis lors. A contrario, la prime de partage des profits, imposée par le gouvernement en 2011, n’est appréciée que par 9 % des DRH. « Les DRH ont jugé sur la méthode ; il faut en finir avec le top-down », estime Jean-Christophe Sciberras.

→ Entreprise & Carrières a également demandé aux DRH comment ils utilisaient la rupture conventionnelle. Dans 44 % des cas, c’est le salarié qui en est à l’initiative, répondent-ils ; dans 39 % des cas, l’initiative revient aux deux parties et dans 16 % des cas, à l’entreprise. Luc Vidal se demande donc si les ruptures conventionnelles n’ont pas tendance à se substituer à des démissions : « Dès lors, quels sont leurs coûts pour la collectivité ? », s’interroge-t-il.

→ Les autres réformes pertinentes du quinquennat sont, du point du vue des DRH, celle des retraites ; le service minimum dans les transports ; la réforme de la représentativité syndicale ; la défiscalisation des heures supplémentaires et les pénalités sociales (seniors, égalité professionnelle, pénibilité).

Parmi les mesures suivantes, prises au cours du dernier quinquennat, lesquelles vous ont semblé les plus pertinentes ? (3 choix possibles)

Auteur

  • EMMANUEL FRANCK