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Enquête

« L’entreprise doit s’interroger sur son propre rôle dans les violences externes »

Enquête | publié le : 20.03.2012 | V. L.

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« L’entreprise doit s’interroger sur son propre rôle dans les violences externes »

Crédit photo V. L.

E & C : Quelles sont les principales causes de la violence externe à laquelle sont confrontées les entreprises ?

S. G : La violence externe s’inscrit dans une évolution d’ensemble de la société, avec une individualisation plus marquée des comportements, la mise à mal des normes de civilité et des codes du « savoir-vivre ensemble », la montée des précarités, de l’insécurité… Pour autant, les modes de gestion commerciale adoptés par les entreprises depuis une vingtaine d’années sont pour partie responsables de certaines des violences externes. Orientés vers la recherche d’une satisfaction totale du client, ils ont profondément transformé la relation de service. Les clients sont également devenus plus exigeants, voire intransigeants. Lorsque l’entreprise ne répond pas à ses propres promesses, leur mécontentement peut s’exprimer de manière agressive envers les salariés. De même quand les clients sont confrontés à des dysfonctionnements organisationnels de l’entreprise : effectifs insuffisants, surcharge de travail des salariés, absence de communication entre les services, interlocuteurs multiples pour traiter d’une demande.

E & C : Les entreprises ne sont-elles pas réticentes à agir sur l’organisation du travail et à reconnaître leur propre responsabilité dans le déclenchement des incivilités ?

S. G : Ce n’est généralement qu’après avoir expérimenté les limites des actions de protection des salariés à l’égard de ces violences et des mesures de dissuasion que les entreprises en viennent à s’interroger sur leur propre organisation du travail et leur gestion de la relation de service au client. Lorsque nous accompagnons les entreprises dans la mise en place d’une démarche de prévention des risques de violence externe, nous insistons tout particulièrement sur l’importance d’intégrer d’emblée une réflexion sur ces aspects organisationnels. Ce n’est souvent qu’à cette condition qu’une politique de prévention efficace peut être menée. Analyser les situations qui ont engendré ces violences est la première étape pour mieux comprendre ce qui, dans l’organisation, a pu éventuellement être à l’origine de l’agressivité de la clientèle. Cela suppose de porter un autre regard sur ces violences. Le client et le salarié ne sont-ils pas parfois tous deux “victimes” d’une organisation qui ne tient pas ses engagements, qui propose plus qu’elle ne peut réellement disposer… ?

E & C : De quels leviers disposent les entreprises pour aider leurs salariés à faire face ?

S. G : Il s’agit surtout pour l’entreprise, en premier lieu, de mettre en place une politique volontariste sur le sujet. Il est nécessaire qu’elle reconnaisse le caractère inacceptable des violences, quelles qu’en soient les formes. Ces violences ne doivent être ni minimisées ni banalisées dans leur ampleur et leurs effets, notamment sur la santé physique et mentale des salariés. Elle doit clairement afficher sa volonté d’analyser les causes de ces violences et accepter d’intervenir sur les aspects de sa propre organisation. Les moyens nécessaires doivent être mis en place pour prévenir ces violences, en protéger les salariés et poursuivre juridiquement les auteurs de ces faits. Il ne faut pas oublier aussi que les chocs vécus par les salariés peuvent conduire à des états de stress post-traumatiques. Prise en charge médico-psychologique mais également soutien social du management et des collègues sont essentiels pour surmonter de telles épreuves. Beaucoup d’entreprises inscrivent à leur plan de formation des cursus spécifiques à la gestion de la violence pour leurs salariés en contact avec le public. Leur intérêt est évident dès lors qu’ils ne traitent pas essentiellement d’aspects comportementaux mais permettent aux salariés de s’exprimer sur les situations et les contextes de travail qui engendrent ces violences externes, sur lesquels il faudra agir en priorité.

Auteur

  • V. L.