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ITALIE : PREMIÈRE VICTOIRE AU PÉNAL POUR LES VICTIMES DE L’AMIANTE

Actualités | publié le : 21.02.2012 | ANNE LE NIR

Seize ans de réclusion et le versement d’une somme de 95 millions d’euros à titre de dédommagement : le verdict prononcé à Turin à l’égard des 2 dirigeants d’Eternit Italie, autant que la procédure péna­le qui y a conduit, apparaissent exemplaires. Condamnés par contumace, le Suisse Stephan Schmidheiny et le baron belge Jean-Louis De Cartier de Marchienne devaient répondre de désastre sanitaire et environnemental pour le non-respect des règles de sécurité qui a provoqué la mort de 3 000 personnes, ouvriers ou habitants de Casale Monferrato où était implantée la plus grande usine, et qui ont inhalé des particules d’amiante pendant des années.

Selon le procureur du parquet de Turin, Raffaele Guariniello, célèbre pour ses batailles sur le droit à la sécurité au travail, Eternit est « le plus grand procès au niveau mondial, dans l’histoire, sur la sécurité au travail ». Ce tout premier procès au pénal contre des industriels de l’amiante, avec plus de 6 000 parties civiles, concernait les agissements de la filiale italienne de la multinationale suisse Eternit, active entre 1972 et 1986.

Indépendance des procureurs

Dès 1961, la nocivité mortelle de l’amiante était établie en Italie. Mais les 2 dirigeants savaient aussi que les temps d’incubation sont très lents. Ils n’ont donc pris aucune mesure de sécurité : pas de scaphandre, pas de masque, pas de gants pour les salariés. Pas plus de précautions pour les riverains.

Des médecins lancent l’alarme en 1984 sur le nombre de cas de mésothéliomes à Casale Monferrato, supérieur à tout autre endroit d’Italie. En 1986, Eternit fait faillite. Six ans après, une loi interdit l’extraction, le travail, la commercialisation et l’exportation de l’amiante. Grâce au système judiciaire italien qui prévoit l’indépendance des procureurs de la République par rapport au pouvoir politique, le juge Raffaele Guariniello va pouvoir entreprendre, en 2003, avec une quarantaine de collaborateurs (médecins, psychologues, experts juridiques de la santé au travail…), la plus grande enquête sur le drame de l’amiante et poursuivre les dirigeants. La démarche aboutira en 2009 à l’ouverture du procès à Turin.

À l’issue du verdict, le procureur a caressé l’espoir que ce procès puisse faire jurisprudence au niveau mondial, avant d’appeler de ses vœux la création en Italie « d’un parquet national spécialisé dans les enquêtes sur la sécurité au travail, ce qui permettrait d’intervenir non seulement après une catastrophe mais de façon préventive, systématique ».

Auteur

  • ANNE LE NIR