A l’abattoir municipal d’Alès, qui emploie 30 salariés, les clignotants étaient au rouge : non seulement les accidents du travail ont augmenté (13 en 2006, 15 en 2007, 17 en 2008, 19 en 2009), mais 3 maladies professionnelles liées aux troubles musculo-squelettiques (TMS) ont été déclarées à partir de 2005. Or, selon l’INRS, c’est dans la filière viande que le nombre de maladies liées aux TMS est le plus élevé. « La qualité des produits baissait, parce que l’outil était vieillissant, mais aussi à cause des arrêts de travail. Et quand les gens avaient mal aux bras ou au dos, ils compensaient en ralentissant le rythme », rappelle Éric Pocher, responsable de la prévention à la ville d’Alès.

À deux reprises, le service régional de santé au travail (Carsat) a alerté la régie de l’abattoir. Fin 2007, le consultant qui a établi le document unique d’évaluation des risques a souligné la multiplicité des dangers : blessures dues aux couteaux ou aux machines, glissades sur le sol mouillé, heurts, port de charges lourdes, gestes répétitifs, bruit…

La ville d’Alès a alors décidé de profiter de la rénovation de l’abattoir municipal, prévue en 2010, pour réduire les risques professionnels. Le premier outil utilisé, la méthode RITHMS, destinée à la prévention des troubles musculo-squelettiques, a permis une approche globale des conditions de travail. « Avec le médecin du travail et le responsable de la qualité, nous avons observé les gestes des opérateurs et interrogé chacun d’eux sur ses difficultés, les douleurs ressenties et ce qui le stressait, explique aussi Éric Pocher. « Par exemple, les couteaux étant mal aiguisés, les gens forçaient sur le poignet et se blessaient plus facilement. Autre problème : pour se protéger du bruit, ils portaient des casques qui les isolaient, ils ne pouvaient pas communiquer entre eux. »

Un ingénieur en prévention des risques professionnels a dressé une cartographie des nuisances sonores, tandis qu’Éric Pocher engageait une procédure d’analyse des accidents du travail par “l’arbre des causes”. « Cette démarche a eu l’intérêt d’être vraiment pluridisciplinaire », indique Frédéric Dabek, conseiller de la Carsat Languedoc-Roussillon.

En plus du médecin du travail et du responsable de la qualité, Éric Pocher a associé à la définition du plan d’action un conseiller municipal, l’équipe dirigeant l’abattoir, le service du patrimoine chargé de conduire la rénovation, le service vétérinaire du Gard et le conseiller de la Carsat. Selon celle-ci et la médecine du travail, le bilan est positif. Lors de la rénovation en 2010, l’abattoir a bénéficié d’aménagements adaptés : un sol antidérapant, un meilleur éclairage, des rails moins bruyants, la mécanisation des tâches les plus pénibles, la réorganisation de la chaîne des ovins ainsi que de nouveaux équipements individuels protecteurs (bottes de sécurité, gants de maille et gants en nitrile, protections auditives moulées). Tous les ouvriers sont désormais formés à l’affûtage des couteaux. Résultats : les accidents du travail ont diminué (12 en 2010, 7 en 2011), la pénibilité également, tandis que la production a augmenté.

Depuis 2010, cette démarche globale et collective est étendue aux services de la ville et de l’agglomération d’Alès. Elle a démarré par la mise au point du document unique d’évaluation des risques et d’un règlement intérieur.

Actuellement, des groupes transversaux, associant les agents chargés de la prévention des risques à des cadres issus de différents services, travaillent sur plusieurs projets, dont l’ergonomie des postes, l’aménagement des locaux, une charte vestimentaire, et un plan de formation santé et sécurité au travail.