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« L’entretien annuel d’évaluation : un acte vital de management »

Enquête | publié le : 10.01.2012 | V. L.

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« L’entretien annuel d’évaluation : un acte vital de management »

Crédit photo V. L.

E & C : Pourquoi les entretiens annuels d’évaluation sont-ils aujourd’hui omniprésents dans les entreprises ?

F. A. : Parce qu’ils répondent à un ensemble d’intentions et d’attentes légitimes de la part de plusieurs parties prenantes. Les directions générales et les DRH ont besoin de piloter les activités de leurs salariés de façon dynamique. Les fiches de postes statiques ne suffisent plus. Elles ont besoin de faire le point, une fois par an, sur ce qui a été réalisé et sur ce qui s’annonce pour l’année à venir. C’est également un outil très utile pour les managers. Il leur permet une prise de recul et une meilleure orientation des activités de leurs collaborateurs, c’est un acte vital de management. Pour les salariés enfin, ce dispositif permet d’obtenir du feedback sur leur travail : l’entretien annuel est un moment précieux d’échange et un vecteur fort de reconnaissance.

E & C : Pour autant, les systèmes d’évaluation sont de plus en plus décriés, et même contestés en justice. Comment expliquer ce phénomène ?

F. A. : De multiples raisons expliquent ce mouvement de contestation. Les DG et DRH imposent des formulaires de plus en plus compliqués et multidimensionnels. Alors qu’à l’origine, ils étaient focalisés sur la performance, ils pouvaient tenir en 3 pages. Aujourd’hui, on voit parfois des supports de 20 pages où l’on demande de formaliser des objectifs multiples, de les pondérer avec des notes et d’utiliser des référentiels de compétences compliqués. Petit à petit, les DRH ont imposé aux managers un diagnostic de compétences et parfois de valeurs, ainsi qu’une estimation du potentiel de progression. Trop de dimensions sont appréhendées. De plus, des notions comme le courage, l’éthique, la loyauté sont difficiles à évaluer… À cela s’ajoute le coût émotionnel élevé pour les managers, d’autant plus s’ils ne sont pas formés à cet exercice. Beaucoup d’entre eux disent également qu’ils n’ont pas le temps de mener correctement cette mission car leurs responsabilités opérationnelles n’ont pas été réduites en contrepartie du rôle croissant qu’ils ont à jouer dans l’évaluation de leurs collaborateurs. En outre, de façon paradoxale, ils ne sont pas évalués sur cette action. Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que des tensions surgissent. Les directions mésestiment l’impact psychologique d’une évaluation ultra-formalisée où le manager est davantage préoccupé par la conformité de sa réponse à la DRH que par les attentes de ses collaborateurs. Les organisations syndicales dénoncent le stress engendré par ces dispositifs : le vécu peut être difficile s’il n’y a pas de sens donné aux résultats de l’entretien.

E & C : Il semble également que le manager soit démuni en ce qui concerne les contreparties à offrir à son collaborateur…

F. A. : En effet, l’individualisation de l’évaluation portée par le dispositif est en tension avec le fait qu’un nombre croissant d’entreprises n’ont plus de contrepartie à offrir à cette évaluation – réduction, voire gel des enveloppes d’augmentation et de variable. Dans les années à venir, il risque d’y avoir de plus en plus de tensions sur ce point. Sans compter l’écrasement des pyramides hiérarchiques qui ne facilite pas non plus la tâche pour offrir des perspectives d’évolution. Certains managers en arrivent à envisager une grève de l’entretien d’évaluation.

E & C : Que préconiser pour établir une meilleure pratique de ces entretiens ?

F. A. : Les DRH doivent évidemment proscrire la distribution forcée de notes, qui existe encore. Il faudrait revenir à des formulaires simples, comme les PME les pratiquent, avec l’exposé du déroulé de l’année passée et les objectifs à venir. Surtout, l’entretien devrait être centré sur le travail réel, et les critères d’appréciation être les plus concrets possibles. Il est aussi important de limiter le nombre d’objectifs et de se mettre d’accord sur les indicateurs intégrés derrière eux. Enfin, 2 enjeux doivent être pris en compte de façon équilibrée : l’évaluation de la performance et le développement des individus.

Auteur

  • V. L.