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POUR RÉDUIRE LA PÉNIBILITÉ, huit entreprises de la logistique s’unissent

Pratiques | publié le : 20.12.2011 | VIOLETTE QUEUNIET

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POUR RÉDUIRE LA PÉNIBILITÉ, huit entreprises de la logistique s’unissent

Crédit photo VIOLETTE QUEUNIET

Huit grands acteurs de la logistique ont trouvé ensemble des solutions pour améliorer les conditions de travail de leurs préparateurs de commandes. Elles ont été mises en œuvre sur des sites pilotes dans six entreprises et sont en train d’être déployées dans de multiples entrepôts.

Un préparateur de commandes travaillant en entrepôt pour la grande distribution manipule en moyenne entre 1 000 et 1 500 colis par jour, soit environ 8 tonnes quotidiennes de marchandises. « Il s’agit d’un des métiers les plus particulièrement exposés en termes de pénibilité et de risques d’accidents du travail », indique Hélène Lebeau, ingénieure conseil chez CPV Associés, cabinet conseil spécialisé dans la logistique. Les arrêts de travail pour lombalgies, chutes, contusions ou coupures sont fréquents. Or il s’agit du métier majoritaire (près de 60 % des effectifs) d’une plate-forme logistique.

C’est pour cette raison que les membres du Club Déméter Environnement et Logistique (lire l’encadré p. 14) ont décidé de consacrer cette année un atelier à l’amélioration des conditions de travail des préparateurs de commandes. Huit entreprises y ont participé : Auchan, Carrefour, DHL, FM Logistic, LR services, L’Oréal, Samada (groupe Monoprix), STEF TFE.

Trente-quatre actions mises en œuvre

L’atelier, animé par Hélène Lebeau, s’est déroulé de janvier à septembre 2011. Les trois premiers mois ont été consacrés à la préparation des expérimentations : échanges de solutions et de bonnes pratiques entre les membres, choix des sites pilotes, identification des actions à mener. La phase d’application s’est déroulée d’avril à septembre avec 34 actions mises en œuvre par six entreprises sur huit sites – Carrefour en avait déjà mené et a été un fort contributeur de solutions. L’Oréal a souhaité participer sans mener d’actions.

Les actions se sont réparties essentiellement dans trois catégories : l’équipement du bâtiment, les solutions techniques facilitant la manutention, la formation et la sensibilisation du personnel à la prévention des risques. Une seule entreprise, FM Logistic, a élaboré des solutions liées à l’organisation du travail en supprimant le port manuel.

L’éducation à la prévention est allée parfois jusqu’à l’entraînement physique. Les salariés du site d’Auchan à Trappes ont été formés par un kinésithérapeute à 17 gestes et postures qu’ils reproduisent tous les jours. « La DRH avait constaté qu’une grande proportion des accidents du travail se produisait dans la première heure de travail. Dé-sormais, les cinq premières minutes de la prise de poste sont consacrées à un échauffement », indique André Pinson, responsable logistique d’Auchan Île-de-France.

Chez DHL, ce sont des ostéopathes qui viennent effectuer des consultations gratuites dans l’entrepôt de textile de Croissy-Beaubourg. Coût pour l’entreprise : 640 euros par mois. Mais DHL s’y retrouve : « Nous avons constaté une diminution du nombre d’accidents du travail dus à des maux de dos, soit 16 jours d’arrêt en moins ces six derniers mois – un gain de 7 200 euros – par rapport à la même période en 2010 », indique Jean du Perray, responsable QHSE et infrastructures chez DHL.

Des solutions techniques simples

Pour ce qui est de l’équipement du bâtiment et solutions techniques, les entreprises ont souvent trouvé des idées faciles à mettre en œuvre. Sur son site de Beauvais, LR Services, la société logistique de McDonald’s, a transformé des palettes en supports de produits lourds, évitant ainsi aux préparateurs de trop se pencher pour les saisir. Auchan a généralisé la hauteur des palettes à 1,80 m maximum. DHL a acquis des “diables” (chariots) pour limiter la manutention des colis.

Les solutions les plus coûteuses ont concerné l’acquisition de filmeuses automatiques, un appareil qui évite au préparateur des gestes entraînant une accélération du rythme cardiaque plusieurs fois dans la journée (il faut tourner très vite autour d’une palette en tendant aux maximum le film). Ces solutions ont été optimisées grâce au benchmark avec les autres membres du club. Auchan, par exemple, a acquis des filmeuses dans un premier temps, mais envisage de les louer, sur certains sites, à l’instar de LR Services. Cette société, de son côté, s’est inspirée des curseurs de hauteur maximale de palettes installés par Auchan pour ses propres entrepôts. « Le club nous ouvre un horizon plus large que celui de notre seule entreprise et permet un gain de temps appréciable dans la recherche de solutions », estime Christophe Mathon, responsable de la sécurité et des conditions de travail de LR Services.

En octobre, un questionnaire de satisfaction a été administré à l’ensemble du personnel des sites pilotes. Résultat : une large satisfaction puisque 73 % des actions menées seront poursuivies et éventuellement déployées vers d’autres sites. Seules 12 % n’étaient pas adaptées et 15 % étaient encore en cours lors de la diffusion du questionnaire.

Le CHSCT impliqué

Ce succès s’explique notamment par l’association systématique de la direction, du CHSCT et des salariés du site. Dès l’amont, le choix du site s’est fait à partir d’un autodiagnostic de la pénibilité au travail des préparateurs. Dans le déroulement des actions, les salariés ont testé les solutions. « Les préparateurs ont été contents qu’on leur demande leur avis et sont fiers d’avoir participé à une action qui a amélioré leurs conditions de travail », constate Manuel Douzinel, secrétaire du CHSCT du site de Beauvais de LR Services. Lui-même est à l’origine d’une amélioration du picking en fabriquant une tige permettant d’aller chercher plus facilement des produits au fond d’une palette.

Autre raison de la bonne appropriation des actions : même si elles ont bénéficié de l’apport des membres du club, elles correspondent au contexte de chaque entreprise et même de chaque entrepôt. D’ailleurs, leur déploiement actuel dans d’autres sites se fait souvent avec quelques adaptations. « C’est une démarche porteuse de sens et de résultats », se félicite André Pinson.

Décidée en octobre 2010, donc avant la loi sur les retraites, cette expérimentation s’est pourtant retrouvée en phase avec l’obligation de mettre en place un plan d’action sur la pénibilité. « L’expérience de l’entrepôt de Croissy entre dans le plan d’action que nous sommes en train de préparer avec un groupe de travail et un cabinet d’ergonomie », témoigne Jean du Perray. Au total, l’atelier social du Club Déméter a permis d’améliorer les conditions de travail de près de 500 préparateurs de commandes. Avec le déploiement à d’autres sites, 2 000 salariés devraient être concernés.

Pour en savoir plus : <www.club-demeter.fr>

L’ESSENTIEL

1 Le club d’entreprises Déméter, réunissant les plus grands acteurs de la chaîne logistique, a consacré cette année un atelier à l’amélioration des conditions de travail des préparateurs de commandes.

2 Des solutions, issues des échanges de bonnes pratiques et de l’implication des salariés des entreprises, ont été expérimentées avec succès dans huit sites pilotes.

3 Ces actions seront déployées et ont été utilisées, dans certaines entreprises, pour nourrir le plan d’action pénibilité.

LE CLUB DÉMÉTER
Concilier environnement et logistique

Créée en mars 2005, l’association Club Déméter Environnement et Logistique a pour objectif de promouvoir et de mettre en œuvre des actions concrètes, mesurables et respectueuses des trois sphères du développement durable : l’économique, le social et l’environnemental. Elle réunit plus d’une trentaine d’entreprises de la chaîne logistique globale, du producteur au transporteur en passant par le distributeur, parmi lesquels L’Oréal, Danone, Nestlé, Coca-Cola, Carrefour, Auchan, Casino, Monoprix, STEF TFE, DHL, FM Logistic, Geodis, etc. Des acteurs publics en sont également membres comme la région Île-de-France, l’Ademe, Ports de Paris. Chaque année, le club détermine un thème prioritaire qui donne lieu à des expérimentations dans quelques entreprises. Des actions ont ainsi été menées sur les livraisons silencieuses, les emballages réutilisables et sur l’association des collaborateurs à la RSE.

Auteur

  • VIOLETTE QUEUNIET