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LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION

« Le législateur n’a pas prévu de publicité des conventions d’objectifs et de moyens »

LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION | Interview | publié le : 13.12.2011 | VALÉRIE GRASSET-MOREL

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« Le législateur n’a pas prévu de publicité des conventions d’objectifs et de moyens »

Crédit photo VALÉRIE GRASSET-MOREL

E & C : Pourquoi une clause de confidentialité est-elle imposée aux Opca sur la période triennale des Conventions d’objectifs et de moyens (COM) qu’ils doivent signer avec l’État ?

M. M. : Il me semble utile de rappeler quelques éléments sur ce point. Tout d’abord, l’article 41 de la loi du 24 novembre 2009 a prévu la conclusion d’une convention d’objectifs et de moyens (COM) entre l’État et chaque Opca-Fongecif. Elle a pour objet de déterminer les taux plafonds des frais d’information, de gestion et de mission ainsi que des principaux objectifs dédiés à l’offre de services définie par l’organisme pour mettre en œuvre sa politique de formation.

C’est dans cette perspective que nous avons arrêté, dans le cadre d’un groupe de travail réunissant les partenaires sociaux et les directeurs des principaux organismes, le contenu de la convention. Ce qui n’est en principe pas l’usage, mais qui était important à deux titres : objectiver les situations et arrêter une base de discussion homogène en vertu du principe d’égalité de traitement.

Le législateur n’a pas prévu de publicité des taux et des objectifs fixés dans les COM. La loi a simplement prévu un suivi et une évaluation à l’échéance de la convention, soit au début de l’année 2015, par les parties signataires de la convention. Les conclusions de cette évaluation seront transmises au CNFPTLV (Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie) par la DGEFP.

C’est dans ce cadre qu’une clause de confidentialité a été instaurée, comme c’est généralement le cas dans les conventions conclues entre l’État et un organisme de droit privé ayant des incidences financières. Naturellement, cette clause pourrait être levée pour des justifications légales ou réglementaires ou concernant les experts comptables et les commissaires aux comptes, ceux-ci étant soumis au secret professionnel à l’égard de leurs clients en vertu de l’article L. 226-13 du Code pénal. J’imagine toutefois que les signataires communiqueront les taux fixés aux administrateurs en temps utile.

Pour l’heure, il est normal d’assurer une certaine discrétion sur cette question. A priori, dès lors que la convention est conclue par le président, le vice-président et le directeur de l’Opca, qui ont reçu en principe mandat de leur conseil d’administration pour cela, on peut penser que son contenu convient aux administrateurs.

Par ailleurs, il faut être prudent et comparer ce qui l’est. Le contenu des annexes des COM, rendu public, permet d’aller suffisamment loin dans l’analyse pour bien prendre en compte les spécificités des branches couvertes et, surtout, leur traduction en termes de cohérence de l’offre de service et de frais. L’État, pour sa part, respectera, comme pour toute convention, ce principe de confidentialité auquel tiennent nos interlocuteurs.

E & C : Les premières COM signées avec les Opca correspondent-elles aux objectifs poursuivis ?

M. M. : L’élaboration de la COM conduit les représentants de l’organisme agréé à passer en revue les frais liés à son offre de services. Elle leur permet donc d’évaluer les progrès à faire sur certains types de dépenses et/ou de mesurer la bonne adéquation entre les coûts et les résultats obtenus. Dès lors que des données objectivées sont partagées, le diagnostic l’est généralement avec l’organisme. La question est ensuite de savoir où se situe le bon curseur.

Comme l’a rappelé le délégué général, l’idée est d’amener les organismes à maîtriser les dépenses qu’on peut qualifier d’administratives, de type frais de collecte, gestion administrative…, au profit de celles permettant véritablement l’expression des besoins des salariés (service de proximité, accompagnement), en particulier ceux des TPE-PME, et ainsi de les conduire à gagner en efficience. L’objectif est de produire un meilleur service rendu à l’adhérent.

Les premières COM nous permettent de constater une parfaite compréhension de la part de nos interlocuteurs des problématiques formation des branches couvertes, de l’objectif poursuivi par la convention et de la nécessité d’instaurer un contrôle de gestion de qualité quand ce n’est pas déjà le cas. Nos interlocuteurs ont le souci de bien utiliser les contributions de leurs adhérents et ont parfaitement compris que la COM leur offrait la possibilité de mieux maîtriser le processus dans la durée.

E & C : Comment les Opca s’approprient-ils ce nouvel exercice ?

M. M. : Le premier temps de la discussion porte sur le diagnostic des frais observés sur l’année de référence, en l’espèce 2010 : volume de collecte, typologie des adhérents, taux de rotation des entreprises, nombre de branches…

Ce premier exercice démontre que, pour chaque type de frais, il faut se méfier des amalgames : les éléments s’apprécient au cas par cas, et deux COM à 10 % de frais au total n’ont pas la même traduction en termes d’offres de services et ne répondent pas à la même problématique de formation. Des taux a priori attractifs, à la lueur de certaines données, révèlent des pratiques dont la performance peut être améliorée.

Dans un second temps, il est important de comprendre la politique de formation définie par les partenaires sociaux. Cette phase permet de mieux saisir les évolutions souhaitées de l’offre de services. Une discussion s’engage ensuite sur les niveaux de taux fixés. Il faut ici rassurer les dirigeants d’Opca : si nous étudions leur dossier de façon approfondie et déterminons des taux cibles, nous savons les écouter et modifier nos positions dès lors qu’ils sont convaincants et précis sur la nature des besoins à développer. Cette discussion doit s’effectuer dans les deux sens : il arrive que des Opca proposent une COM avec des taux qui ne correspondent pas à l’esprit de la loi. Nous en avons rencontré d’autres qui avaient pris, il y a quelques semaines, des décisions de gestion avec des incidences substantielles sur le niveau des frais afférents.

Il a fallu par ailleurs rappeler que chaque organisme ne pouvait pas financer son propre système d’information sur le CIF ou sur le contrat de professionnalisation, alors même que la gestion administrative de ces dossiers n’a pas à être traitée différemment d’un organisme à un autre. Sur ce point, il faut qu’ils réfléchissent à la définition d’une architecture système commune, quitte à pouvoir ajouter des spécificités en fonction de leur agrément. Le traitement administratif d’un CIF n’a pas à être différent d’une région à une autre.

E & C : Parvenez-vous, avec les Opca, à dépasser le seul côté arithmétique de ces documents et à dégager des objectifs qualitatifs ?

M. M. : Je pense sincèrement que oui. Comparer la COM à un exercice d’arithmétique est d’ailleurs bien réducteur. Il ne faut pas passer du tout au rien : les données chiffrées et indicateurs constituent des repères, des bases de discussion garantissant l’égalité de traitement. Ces données sont un moyen et non une fin en soi.

Les objectifs fixés dans la COM sont tous destinés à améliorer le service rendu aux adhérents et aux bénéficiaires finaux, qu’ils soient salariés ou demandeurs d’emploi. C’est vrai pour le coût moyen de la collecte et la dématérialisation attachée à ce process, mais c’est aussi vrai quand on détermine le délai maximal de traitement d’un dossier, le programme d’activités des études et recherches ou celui des observatoires, ou encore le taux de réalisation des appels à projets financés par le FPSPP.

De même, l’objectif portant sur le conseil aux entreprises n’ayant bénéficié d’aucune prise en charge au cours des trois dernières années répond clairement au souhait du législateur de ne pas laisser les salariés de ces entreprises au bord du chemin mais de favoriser leur accès à la formation.

Tous ces points ne sont pas de l’arithmétique mais bien des indicateurs permettant, à la base et sur la durée de la COM, d’attester de l’efficience de l’organisme.

Auteur

  • VALÉRIE GRASSET-MOREL