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L’ASSURANCE DÉPENDANCE, un nouvel avantage encore rare

Pratiques | publié le : 15.11.2011 | SÉVERINE CHARON

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L’ASSURANCE DÉPENDANCE, un nouvel avantage encore rare

Crédit photo SÉVERINE CHARON

Les entreprises qui instaurent une assurance dépendance complètent volontairement la protection sociale de leurs salariés, alors que le gouvernement a reporté sa réforme. Ces garanties facilitent aussi la vie des actifs confrontés à la perte d’autonomie d’un parent.

Fin août, le gouvernement a reporté à début 2012 la réforme du financement de la dépendance, pourtant présenté dès 2007 par Nicolas Sarkozy comme un des grands chantiers du quinquennat. Vu la conjoncture, elle attendra certainement l’issue de la présidentielle. La très longue préparation de la réforme a eu pour effet de ralentir les initiatives des entreprises et des branches professionnelles déjà sensibilisées, qui attendaient la décision sur le financement de la dépendance pour se lancer. Néanmoins, elle a mis le sujet à l’agenda des partenaires sociaux. L’édition 2010 du baromètre Ocirp montrait que 60 % des DRH et 84 % des délégués syndicaux estimaient que la renégociation des garanties prévoyance était un moment opportun pour réfléchir sur la dépendance.

Six cent mille salariés couverts

Aujourd’hui, l’assurance dépendance reste extrêmement rare dans les entreprises. Néanmoins, quelques grandes firmes et huit branches professionnelles (poissonnerie, horlogerie, bijouterie-joaillerie, expertise automobile, notariat, cabinets d’avocats – avocats et clercs de notaires –, commissaires-priseurs et jeux et jouets), ont mis en place une garantie dépendance. Au total, 600 000 salariés du privé sont couverts et 19 millions d’euros de primes collectées.

Parmi les initiatives notables figure celle du groupe Thales. C’est dans le cadre d’un accord groupe qui revisitait l’ensemble des dispositions de protection sociale que le contrat dépendance a été mis en place fin 2006. Inclure la dépendance apportait ainsi la dernière pierre à l’édifice des garanties offertes par l’entreprise. Mais elle était aussi une source d’inquiétude, car cette approche était très innovante. « Nous avions quelques craintes quant à la perception que pouvaient en avoir nos collaborateurs et plus particulièrement les plus jeunes, indique Pierre Groisy, DRH de Thales France. Dans les faits, cette nouvelle garantie a renforcé la solidarité intergénérationnelle et permet à tous, au-delà de Thales, de conserver à titre individuel ce nouveau dispositif. »

Souscrit via le groupe de protection sociale Novalis Taitbout (assureur traditionnel de Thales) auprès de l’Ocirp, c’est un contrat à cotisations définies, dont le taux est unique et indépendant de l’âge et de l’état de santé du salarié, et qui ne crée donc pas de passif social. Le montant de la cotisation mensuelle reste modeste (0,30 % du PMSS, soit 9 euros). Il se partage entre salarié (68 %) et employeur (35 % jusqu’à la retraite), pour une rente mensuelle minimum de 286 euros en 2012. Le salarié peut souscrire à titre volontaire une garantie complémentaire pour lui ou pour son conjoint et peut aussi continuer à cotiser s’il quitte le groupe.

Des syndicats favorables

Du côté des partenaires sociaux, l’initiative a été bien accueillie. « Sur le principe, c’est bien. Il faut seulement se donner du temps pour voir comment le dispositif évolue et comment l’Ocirp gère la garantie », juge Guy Henri (CFDT). Marc de Raphélis-Soissan (CFTC), également négociateur de l’accord de 2006, est lui aussi favorable à cette garantie mais regrette qu’elle n’ait pas été davantage détaillée lors de sa mise en place. Autre réserve du syndicaliste : le niveau très élevé des frais de gestion prélevés sur les cotisations (13 %), alors que le contrat est encore en phase de décollage. Il a été mis en place en 2007 chez des salariés actifs et l’âge de la dépendance se situe autour de 80 ans.

Aider les salariés confrontés à la dépendance d’un proche

Axa, qui vend des assurances dépendance et qui s’est doté lui-même du dispositif en 2009, décide de mettre l’accent sur un aspect qui touche plus directement ses salariés : le contrat devra faciliter la vie de ceux qui, autour de la cinquantaine, sont confrontés à la perte d’autonomie d’un parent. Axa Assistance permet ainsi de les aiguiller vers les bons interlocuteurs pour demander aides et assistances. Une aide financière pour les aménagements du domicile du parent malade est également prévue. Une manière de soulager le salarié et de prévenir l’absentéisme. « Mettre en place une couverture dépendance avec un volet “aide aux aidants” est un moyen pour l’employeur d’aider ses salariés à faire face à la dépendance d’un proche », confirme Claudine Brom, directrice dépendance chez Axa. Ce dispositif, jugé incomplet par les syndicats, a été assorti d’une garantie viagère. La rente peut atteindre 400 euros mensuels en cas de dépendance totale du salarié. « Ce sont les partenaires sociaux qui ont été demandeurs de la constitution d’une rente pour le salarié qui risque de devenir lui-même dépendant pendant sa retraite », précise Claudine Brom.

La cotisation, qui dépend du salaire, est financée à 50 % par Axa et à 50 % par le salarié. Payée sur une longue durée, son montant est d’environ 8 euros pour un salarié gagnant 40 000 euros par an (dont 4 euros financés par son employeur jusqu’à la retraite).

Reste que ces contrat sont rares dans les entreprises et encore à un stade expérimental. En effet, peu de salariés couverts sont devenus dépendants. Le visage de la future réforme dépendance – si elle voit le jour – aura un effet décisif sur l’évolution de cette garantie dans les entreprises.

L’ESSENTIEL

1 Les concertations menées ces dernières années dans la perspective d’une réforme du financement de la dépendance ont fait prendre conscience aux partenaires sociaux de l’enjeu de ce sujet de société.

2 Quelques branches et de rares grands groupes se sont équipés d’une garantie dépendance. Les représentants des salariés accueillent avec satisfaction ce type d’initiative, peu coûteuse pour l’employeur.

3 Un service d’aide aux aidants peut être inclus dans la garantie et permet de réduire l’absentéisme des salariés confrontés à la situation de dépendance d’un proche.

Panorama des garanties existantes

Avec la couverture en points, comme celle de l’Ocirp, les cotisations permettent d’acquérir des points dépendance alimentant un compte personnel. Ces points sont transformés en rente viagère mensuelle en cas de dépendance. Si le salarié quitte l’entreprise ou part à la retraite, il continue à bénéficier d’une garantie en fonction des points inscrits à son compte personnel et de la valeur du point. Il peut poursuivre l’alimentation de son compte à titre individuel ou dans le cadre de sa nouvelle entreprise. Cette garantie a été adoptée par Thales, mais aussi par Lafarge.

La couverture viagère prévoit le versement d’une rente, acquise jusqu’au décès de l’assuré. C’est la garantie que propose Axa, mais aussi le groupe AG2R depuis 2010 – pionnier sur le marché de l’assurance dépendance en France, avec une garantie individuelle lancée dès 1985 –, membre de l’Ocirp. Pour ce régime à prestations définies, les cotisations, calculées selon la pyramide des âges de l’entreprise, sont prélevées tant que les salariés sont en activité. Le salarié part à la retraite avec un droit défini quelle que soit sa durée de cotisation. Une partie des droits est maintenue pour les salariés quittant l’entreprise mais ayant cotisé pendant une durée minimale (huit ans dans le cas de la garantie Axa). Cette garantie proposée et adoptée par Axa a aussi été souscrite par Novartis.

La garantie proposée par Axa peut inclure un volet aide aux aidants en plus de la rente, ainsi que le versement d’un capital de 3000 à 10000 euros en cas de reconnaissance d’une dépendance partielle d’un parent, en fonction du choix de l’entreprise. Les institutions de prévoyance n’incluent pas l’aide aux aidants dans leurs garanties, mais l’offrent plutôt dans le cadre de leurs œuvres sociales.

Auteur

  • SÉVERINE CHARON