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DANONE PREND SOIN de ses salariés, partout dans le monde

Pratiques | publié le : 08.11.2011 | VIRGINIE LEBLANC

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DANONE PREND SOIN de ses salariés, partout dans le monde

Crédit photo VIRGINIE LEBLANC

Le groupe Danone a récemment signé avec l’UITA (Union internationale des travailleurs de l’alimentation) le premier accord mondial sur la santé, la sécurité, les conditions de travail et le stress. Un texte ambitieux et novateur par le périmètre et le thème retenus.

« Danone a cinq ans d’avance sur le dialogue social international », n’hésite pas à affirmer Ron Oswald, secrétaire général de l’UITA (1), signataire avec le groupe alimentaire, le 29 septembre, d’un accord mondial sur la santé, la sécurité, les conditions de travail et le stress (2). Une première sur un périmètre si vaste. « L’intégration du sujet du stress était primordiale pour nous, et Danone ne s’y est pas opposé, poursuit Ron Oswald. Dans beaucoup de pays, le stress peut être une manifestation cachée d’une situation difficile dans laquelle se trouvent certains salariés, et avec ce texte, ils ont un support qui leur permet de rendre compte de cette difficulté. »

Le texte international élaboré s’est inspiré des bonnes pratiques observées dans tous les pays, et notamment de l’accord-cadre français sur le stress et les risques psychosociaux signé en mars 2010 (lire Entreprise & Carrières n° 1045). Danone et l’UITA ont choisi de « développer la vigilance collective » sur ce sujet, et recommandent par exemple, en plus des formations au stress et aux facteurs de stress, que les rôles de référents et d’identification des salariés en souffrance soient tenus par les acteurs des sites.

60 % des effectifs dans les pays émergents

Avec 101 000 collaborateurs dans 90 pays (voir le graphe p. 18), dont 60 % travaillent dans les pays émergents, Muriel Pénicaud, DGRH du groupe, refuse de « faire du social à deux vitesses : tous les salariés de Danone ont des droits fondamentaux qui sont identiques, même si les contextes législatifs sont différents. Pas question de faire de différence entre les pays émergents et les pays matures », plaide-t-elle.

Avec cette politique volontariste, Danone a déjà obtenu des résultats, puisque le taux de fréquence des accidents avec arrêt a baissé de 22 % depuis août 2010, s’élevant à 2,2 accidents par million d’heures travaillées. « Depuis trois ans, 1 000 salariés en moins par an sont victimes d’accidents du travail », se félicite Muriel Pénicaud.

Persuadé de trouver tout son intérêt dans la prévention des atteintes à la santé de ses salariés, Danone affiche clairement que « la survie et le développement de l’entreprise nécessitent de continuer à gagner en productivité. Mais cela ne doit pas se faire au détriment des conditions de travail ».

L’accord sur la santé affirme aussi « la prise en compte des conséquences humaines du changement, en amont des transformations d’organisation », souligne la DGRH. « La prévention des risques doit se faire le plus en amont possible dans la mise en œuvre des projets - dès la définition du cahier des charges - et dans les processus d’achat - de matériel, d’équipements, etc. - en concertation avec les organisations syndicales et/ou les instances de représentation des salariés et les salariés intéressés par ces différents projets », indique le texte. La consultation et la participation des salariés sont un élément clé de l’accord. « En Amérique latine, illustre Muriel Pénicaud, nous avons beaucoup développé ce type de démarche : des groupes de 5 à 10 opérateurs sont responsables d’unité de production. Ils ont trouvé des solutions pour améliorer le fonctionnement des lignes de production, ils ont gagné en efficacité et en bien-être. »

Prévention des accidents routiers

Au chapitre de la sécurité, la participation aux actions de prévention et la formation des salariés et des personnes intervenant sur les sites figurent en bonne place. Exemple local qui a déjà porté ses fruits : « en Arabie saoudite, un des pays où il y a le plus d’accidents de la route et où la notion de prévention routière n’existe pas, nous avons créé un permis de conduire interne, rapporte la DGRH. Les accidents de la route ont été divisés par deux. » Au Mexique et en Argentine, ce sont 8 000 conducteurs qui sont exposés au risque de vols, de chantage et de kidnapping. Ils sont formés sur les attitudes à adopter et, tous les jours, dix minutes sont consacrées au rappel des consignes de sécurité.

Autre point clé de l’accord : le droit de retrait. « Il est clairement indiqué que, si un salarié se sent en danger, il peut se retirer de son poste de travail, explique Ron Oswald. Dans quelques pays, cela peut sembler normal mais, dans de nombreux autres, c’est une grande avancée pour la protection de la santé et de la vie des travailleurs. » Mais « cela nécessite la présence de syndicats sur place, afin de garantir ce droit », souligne le secrétaire général de l’UITA. Dans certains pays, un salarié pourrait en effet risquer d’être licencié pour avoir exercé ce droit.

Négocier localement

L’accord insiste sur la nécessité de négocier sur place avec les représentants et les directions locaux, sinon le texte restera un « bout de papier », selon la formule de Ron Oswald. D’une manière générale, Danone est un groupe très syndiqué, trois usines sur quatre aux États-Unis accueillent des syndicats, par exemple. Mais, dans les pays où il n’en existe pas, l’application sera probablement plus compliquée. En Chine, des syndicats indépendants n’ont pas le droit d’exister. Et il n’est pas toujours possible de compter exclusivement sur la bonne volonté des directions locales…

Audits conjoints avec l’UITA

« À travers nos organisations nationales, nous avons de bonnes informations qui remontent, remarque Ron Oswald. Nous avons notamment des auditeurs vigilants quant à l’application des accords et aux conditions de travail dans les usines. » Et, depuis 2009 déjà, Danone et l’UITA ont également organisé des audits conjoints dans dix-huit pays.

Concernant l’application de cet accord, un comité de pilotage Danone-UITA assurera au moins une fois par an son suivi. Une réunion dédiée du comité de pilotage est prévue afin d’analyser toute une série d’indicateurs économiques et sociaux (lire l’encadré p. 17). Une mine de renseignements pas forcément évidents à collecter partout. Les usines n’auront en effet pas le même niveau d’enregistrement des données ni les mêmes pratiques. « Les statistiques ne seront pas forcément comparables », remarque le secrétaire général de l’UITA. Un accroissement chiffré des accidents du travail en Asie pourra être lié à une meilleure collecte des données, et non à une dégradation de la prévention… « Il y aura un énorme travail sur ce sujet », prévoit Ron Oswald.

(1) L’Union internationale des travailleurs de l’alimentation, de l’agriculture, de l’hôtellerie-restauration, du tabac et des branches connexes est une fédération internationale regroupant 383 organisations syndicales affiliées dans 120 pays, pour un effectif de plus de 2,6 millions de membres.

(2) Neuf accords mondiaux ont déjà été signés par Danone.

L’ESSENTIEL

1 Danone vient de signer avec l’UITA le premier accord mondial sur la santé, la sécurité, les conditions de travail et le stress. Il s’appuie sur de bonnes pratiques repérées dans tous les pays.

2 Il insiste notamment sur la prise en compte des conséquences humaines du changement, sur l’association des salariés aux pistes d’amélioration, et il instaure un droit de retrait.

3 Reste maintenant à le déployer localement. Un suivi de son application est prévu, avecde multiples indicateurs à fournir.

Les indicateurs de suivi de l’accord

→ Nombre d’accidents par métier.

→ Taux de fréquence des accidents.

→ Taux de gravité.

→ Taux de couverture sociale.

→ Nombre de cas de maladies professionnelles.

→ Pourcentage d’entretiens annuels réalisés.

→ Pourcentage de sites disposant d’une structure spécifique santé, sécurité, conditions de travail comportant une représentation du personnel.

→ Pourcentage de sites disposant d’une structure de surveillance médicale.

→ Nombre de sociétés disposant d’un accord ou d’un plan de prévention contre le stress et les risques psychosociaux.

Auteur

  • VIRGINIE LEBLANC