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Enquête

UN ENJEU DE PLUS DE 6 MILLIARDS D’EUROS

Enquête | publié le : 25.10.2011 | LAURENT GERARD

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UN ENJEU DE PLUS DE 6 MILLIARDS D’EUROS

Crédit photo LAURENT GERARD

La collecte des Opca et des FAF, en augmentation de 2,63 % cette année, s’est déroulée sous tension. Les conséquences de la réforme de la formation professionnelle sur la gestion des fonds collectés ont ouvert de vifs débats entre partisans du paritarisme et ceux favorables à l’intervention de l’État.

C’est la dernière ! La dernière collecte des Opca (organismes paritaires collecteurs agréés) dans la configuration que nous connaissons depuis la réforme de la loi quinquennale de 1993. Depuis plus de dix ans, Entreprise & Carrières donne rendez-vous à ses lecteurs lors d’un dossier annuel sur les chiffres de la collecte. Et si, au début, certains Opca ont hésité à répondre à nos questions, cette année, un seul sur les 41 manque à l’appel. Selon nos calculs, 6,271 milliards d’euros ont été collectés cette année auprès des entreprises françaises par les Opca et les FAF (fonds d’assurance formation) de branche, les Opca interprofessionnels et interbranches, ainsi que par les Fongecif-Agecif-Opacif, entre le 1er janvier 2010 et mars 2011, sur les masses salariales 2010, contre 6,119 milliards d’euros l’année précédente, soit une augmentation de 2,48 %.

Hors CIF collectés par les Fongecif, cette dernière collecte témoigne, toujours selon nos calculs, d’un accroissement de 2,63 %, suite à une croissance de 2,77 % en 2010*. C’est la septième collecte intervenue suite à la réforme de 2004 des fonds de la formation professionnelle, alors que les partenaires sociaux sont dans la dernière ligne droite pour restructurer une nouvelle fois le paysage des Opca avant le 1er janvier 2012.

Mutualisation

Ces fonds qui transitent par les collecteurs représentent depuis plusieurs années la moitié de l’ensemble de l’effort déclaré des entreprises en matière de formation continue. D’ailleurs, celles de 10 salariés ou plus confient aux Opca une part croissante de leur contribution au plan de formation, notamment du fait de l’intérêt qu’elles y trouvent pour externaliser la gestion des conventions avec les organismes de formation.

Le principe de cette collecte est important, car il constitue la base du circuit financier qui organise la mutualisation d’une partie des fonds permettant d’engager et de financer des politiques de formation de branche ou d’entreprise. Quand on constate que le versement moyen d’une entreprise de moins de 10 salariés au plan formation est de 300 euros, celui d’une entreprise de plus de 10 salariés est de 15 000 euros, et le versement “alternance-professionnalisation” d’une entreprise, quelle que soit sa taille, s’élève à moins de 1 400 euros, on comprend mieux l’intérêt des mécanismes de mutualisation. Pourtant, depuis toujours, tout ce qui touche de près ou de loin aux Opca – leur paritarisme, leur mutualisation, leurs frais de gestion… – est critiqué par certains acteurs politiques ou par des chercheurs.

Et c’est dans une ambiance bien particulière qu’intervient cette collecte ancienne formule. La réforme de la formation professionnelle initiée voilà quatre ans bat son plein : fusion des collecteurs, critères d’agréments stricts, préparation des conventions d’objectifs et de moyens… Tout cela dessine le chemin vers une forme d’étatisation que les partenaires sociaux, créateurs et gestionnaires des Opca, dénoncent. Les partisans d’un interventionnisme plus fort de l’État partent du principe que celui-ci sera meilleur juge et arbitre que les partenaires sociaux dans la répartition de cette “richesse”. Le débat n’est pas nouveau, mais il est posé dans une ambiance particulièrement tendue.

Examen des dossiers par l’état

L’État a déjà remporté le premier round de la phase d’agrément. Le gouvernement, via la DGEFP, examine les dossiers de candidature des Opca restructurés pour atteindre le seuil minimum de 100 millions d’euros de collecte, et en a déjà agréé une dizaine (lire p. 33) ainsi qu’une vingtaine de Fongecif et d’Opacif. En revanche, le dossier emblématique de l’Opcabaia, c’est-à-dire des banques-assurances, a été retoqué deux fois (par la DGEFP, puis par Xavier Bertrand). Opcabaia prévoyait des délégations de gestion à des associations paritaires spécifiques par branche pour mieux piloter les particularités des politiques de chacune (lire p. 30). La même logique oblige le réseau Opcalia du Medef à revoir son montage (lire p. 31). Bertrand Martinot, délégué à l’emploi et à la formation professionnelle, dit fermement et depuis longtemps qu’« il n’y aura pas d’Opca à l’intérieur des Opca » : il tient parole. Le deuxième round portera sur les conventions d’objectifs et de moyens (lire l’encadré p. 33) que les Opca devront signer avant la fin de l’année avec l’État sous peine de ne pouvoir fonctionner.

* 4,2 % en 2009 ; 5,07 % en 2008 ; 6,27 % en 2007 ; 5,64 % en 2006 ; 11 % en 2005 ; 7 % en 2004 ; près de 5 % en 2003. Soit une augmentation de 61 % sur la période 2003-2011.

L’ESSENTIEL

1 La collecte des Opca est en hausse, notamment parce que les entreprises leur versent volontairement davantage de fonds libres sur le plan de formation.

2 Cette collecte se réalise dans une ambiance très tendue, l’État souhaitant prendre le contrôle de la gestion des fonds.

3 Dans ce contexte, un rapport préconise une totale étatisation du système de collecte et de redistribution. Au risque d’une guerre ouverte avec les partenaires sociaux et les branches.

La collecte des Opca et des FAF

Le tableau en page 24 présente les collectes des Opca et des fonds d’assurance formation (FAF) de branche (champ des organisations patronales Medef, CGPME et UPA, et hors champ) ; ainsi que celles des deux réseaux interprofessionnels interbranches Agefos-PME/CGPME et Opcalia-Medef.L’Afdas collecte, en plus des contributions classiques, une contribution spécifique “plan de formation des intermittents du spectacle”, basée sur une cotisation particulière. Dans le tableau, cette collecte est agglomérée avec celle du plan de formation des entreprises de plus de 10 salariés. Unifaf inclut dans sa collecte un versement spécifique dû à une convention signée avec la DGAS pour les travailleurs handicapés travaillant en Esat.

• En bleu, les collecteurs de branche du champ des trois organisations patronales Medef, CGPME, UPA.

• En jaune, les collecteurs de branche du champ d’autres organisations patronales.

• En vert, le collecteur interprofessionnel CGPME-cinq confédérations syndicales, Agefos-PME.

• En orange, le collecteur interprofessionnel Medef-cinq confédérations syndicales, Opcalia.

Les montants sont exprimés hors taxe et en millions d’euros. Le total par colonne diffère du total par ligne du fait des arrondis.

Collectes Agefos-PME et Opcalia

Le tableau ci-contre précise les collectes de l’Agefos-PME (réseau de collecte interprofessionnel géré par la CGPME et les cinq confédérations de salariés) et celles d’Opcalia (réseau de collecte interprofessionnel géré par le Medef et les cinq confédérations de salariés).

Une partie de la collecte d’Opcalia est réalisée par trois opérateurs spécifiques (Adagio pour le transport aérien, la manutention aéroportuaire en Île-de-France, la manutention ferroviaire ; opérateur national pour les secteurs funéraire, prévention-sécurité, bijouterie-orfèvrerie-joaillerie-cadeaux et jeu-jouet-puériculture ; et OME pour les secteurs eau-assainissement-déchets-énergie), a été reventilée dans toutes les régions. Ces trois opérateurs sont remis en cause par l’État (lire p. 31).

Auteur

  • LAURENT GERARD