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Enquête

LES OUTILS DE L’ETATISATION

Enquête | publié le : 25.10.2011 | L. G.

La fin des délégations de branche et les conventions d’objectifs et de moyens renforcent le contrôle d’État sur les Opca.

Agefos-PME (collecteur interprofessionnel et interbranches de la CGPME et des 5 confédérations syndicales), Opca Défi (plasturgie, chimie, pharmacie et pétrole), Opca 3 + (bois-ameublement, papier-carton et matériaux pour la construction et l’industrie), Opcalim (industries alimentaires et coopération agricole), FAF.TT (travail temporaire), Fafih (industries hôtelières), Intergros (commerce de gros) et Opcaim (métallurgie) sont les premiers Opca nouvellement agréés dans le cadre de la réforme en cours. À cela une raison importante : ils ne comptent pas formellement de délégations de branches à des opérateurs ayant une personnalité morale.

La question de ces délégations paritaires ou patronales de branche a vu s’opposer durement la DGEFP et les partenaires sociaux. La Délégation à l’emploi a proposé, en septembre, au Conseil national pour la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV, instance de concertation réunissant les partenaires sociaux, les consulaires, l’État et les régions) un projet de décret autorisant uniquement les délégations territoriales ou nationales, mais interdisant formellement celles de branche : ce projet n’a évidemment pas rencontré l’enthousiasme des partenaires sociaux et il n’a recueilli que 9 voix pour, 17 abstentions et 10 voix contre.

Le Medef, particulièrement opposé à la suppression des délégations de branches, a pris publiquement position, estimant que, depuis 1994 (date de création des Opca et notamment des Opcareg, ancêtres des Opcalia), ces délégations de gestion (qu’elles soient patronales, paritaires, territoriales ou de branches professionnelles) sont autorisées, et que, sur cette base, ont été agréés et re-agréés de nombreux Opca, sans objection de la part de l’administration. Le Medef voit donc dans cette interdiction « un changement inadmissible et préjudiciable des règles de fonctionnement ». Il estime que « ces conventions de délégation permettent d’assurer au meilleur coût un service de proximité spécifique et de qualité aux entreprises relevant des branches concernées et ne leur donne en aucun cas un rôle politique, qui relève du seul conseil d’administration et des sections paritaires professionnelles ». La DGEFP n’est pas d’accord et ne laisse rien passer. Conséquences : les partenaires sociaux dénoncent une mainmise de l’État sur leurs outils et leurs financements, et s’interrogent sur leur avenir et celui des politiques de branches.

Comptabilité analytique

Un autre instrument de mise en observation fine des financements de la formation professionnelle inquiète les partenaires sociaux : la convention d’objectifs et de moyens (COM) que chacun des futurs Opca devront signer avec l’État sous peine de ne pouvoir fonctionner.

La DGEFP a présenté ses textes et structures statistiques en mai dernier, et cela ressemble à la mise en place d’une grande comptabilité analytique sous l’œil de l’État. Ces COM prendront effet le 1er janvier 2012 (ou en février, vu le travail à mener) et expireront le 31 décembre 2014. Officiellement, elles visent à « renforcer les capacités d’intervention de l’Opca en matière de conseil auprès des petites et moyennes entreprises, à développer la dématérialisation de l’information et des opérations de gestion dans la perspective de l’amélioration du service rendu, à optimiser les fonds collectés dans le cadre de frais de gestion maîtrisés et de frais de mission définis en adéquation avec l’offre de services déployée par l’Opca et, enfin, à accroître la transparence de la gestion en créant les conditions d’un dialogue régulier avec l’État dans le cadre du suivi de la convention ».

Les premiers Opca agréés viennent d’être invités par la DGEFP à lui adresser les informations afin de débuter au plus vite les négociations. Mais les directions d’Opca avouent ne pas savoir comment bien remplir certaines cases.

La précision horlogère des conventions d’objectifs et de moyens (COM)

Les COM dessineront un chemin très balisé de l’usage des fonds des Opca.

Premièrement : « Un diagnostic partagé » sera mené entre l’Opca et l’État. Une multitude d’indicateurs leur sont demandés pour établir les spécificités des entreprises adhérentes, une représentation de l’activité de l’Opca, ses modalités d’organisation et de fonctionnement, les orientations emploi-formation de ses branches, les priorités en matière d’offre de services et son plan d’action pour les trois ans à venir.

Deuxièmement : la COM prévoit une série de frais de fonctionnement fixés selon des objectifs chiffrés, sur lesquels doivent s’engager les partenaires sociaux. Une part fixe pour les frais de collecte et le Fongefor (rémunération directe du paritarisme exercé par le Medef, la CGPME, l’UPA et les confédérations syndicales) ; une part variable pour les frais de gestion administrative et paritaire et les frais d’information ; et une part négociée avec l’État pour les frais de missions (observatoire, étude et recherche et coûts de diagnostic seront plafonnés individuellement ; alors que le service de proximité, le conseil de 1er niveau, le pilotage de projets, l’accompagnement des entreprises dans l’analyse et la définition des besoins en formation feront l’objet d’une définition prévisionnelle individuelle dans la COM).

Globalement, le taux de frais reste de 9,9 %, mais la part financée sur les décaissements avérés (donc le réalisé) augmente, au détriment d’un financement sur la collecte encaissée.

Dans cette logique, il est inévitable que le troisième pilier des COM prenne la forme d’un suivi au plus près : rencontre au moins une fois par an pour suivre l’exécution de la convention sur la base des indicateurs, appréciation du respect des niveaux de frais… S’il est constaté un dépassement des plafonds définis, l’Opca sera « invité », après une mise en demeure « motivée », à présenter aux services de l’État la justification de ce dépassement dans un délai d’un mois. À défaut de justifications utiles dans le délai imparti, l’Opca versera au Trésor public un montant égal au dépassement constaté.

Toutes les COM seront évaluées à la fin de la période triennale par l’État, qui en produira un rapport synthétique remis au Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie, qui réunit l’État, les partenaires économiques et sociaux et les conseils régionaux.

LG

Auteur

  • L. G.