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UNE GARANTIE DE QUALITÉ RH ?

Enquête | publié le : 18.10.2011 | EMMANUEL FRANCK

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UNE GARANTIE DE QUALITÉ RH ?

Crédit photo EMMANUEL FRANCK

Les entreprises ne veulent plus se contenter de communiquer sur la qualité de leur politique RH, elles veulent la faire reconnaître par des tiers “objectifs”. Cette démarche a d’abord pour but d’améliorer la cohésion interne de l’entreprise, et plus rarement d’orienter les choix d’investisseurs ou de candidats.

Le dire, c’est bien, le prouver, c’est mieux. Fortes de cette conviction de bon sens, de plus en plus d’entreprises veulent faire reconnaître les vertus de leur politique RH par des tiers. C’est ainsi que, sur le champ de la responsabilité sociale, s’est développée une offre foisonnante de labels, de prix, de trophées, de palmarès, de diagnostics et de notations proposés par des cabinets de conseil en RH ou en RSE. Palmarès Great place to work ; Top employeurs ; label Diversité ; label Égalité ; label Lucie ; audits RSE de Vigeo ; Gender equality-european standard ; Trophées de la diversité ; Trophées du capital humain… Les référentiels sont innombrables et il s’en crée chaque semaine. Mais le principe reste le même : une structure extérieure à l’entreprise, supposée objective, atteste la responsabilité sociale de sa GRH et éventuellement la compare à celle d’autres entreprises.

Les entreprises raffolent de ces outils. Plus de 270 sont à ce jour labellisées Diversité ; 45 labellisées Égalité ; 33 figurent au palmarès Top employeurs 2011 ; 30 à celui de Great place to work…

Cohésion sociale

Les entreprises que nous avons interrogées concourent d’abord dans le but d’améliorer leur cohésion interne : implication et fidélisation des salariés, mesure du climat social et formalisation des process RH. À Pepsico France par exemple, le palmarès Great place to work, dont le distri­buteur de boissons occupe la première place depuis deux ans, est devenu le principal outil de GRH : un défi pour la direction des RH, un outil d’évaluation du climat social interne et, dans une moindre mesure, une contribution à l’attractivité (lire p. 25).

Chez le fabricant et distributeur de peintures Zolpan, véritable collectionneur de reconnaissances sociales et environnementales, il s’agit de renforcer la culture d’entreprise et de réduire le turnover des commerciaux (lire p. 27). Ce sont les mêmes raisons qui poussent le distributeur de voitures Aramisauto.com vers le Great place to work, auquel l’entreprise prévoit de participer dès qu’elle s’estimera prête (lire p. 29).

Pour sa part, Subsea7, un concepteur d’infrastructures pétrolières sous-marines, veut fidéliser ses salariés et se mesurer à ses concurrents directs dans le palmarès Top employeurs (lire p. 26). C’est pour officialiser une politique d’accès des femmes à des métiers masculins que le Centre ambulancier Sud-Manche a postulé au label Égalité (lire p. 28). Finalement, parmi les entreprises rencontrées, l’exception est celle qui, comme le cabinet de conseils en organisation A2 Consulting, revendique avoir visé le label Diversité pour afficher son engagement vis-à-vis de ses clients, et ainsi gagner de nouveaux contrats (lire p. 28). Cette façon d’utiliser la reconnaissance sociale comme un avantage concurrentiel pour attirer des clients et des “talents” est-elle amenée à se développer ? Beaucoup y croient, à commencer par les salariés et les chefs d’entreprise (lire les encadrés p. 25). Mais aussi, bien sûr, les prestataires spécialisés dans la réputation sociale comme Didier Pitelet, Pdg du cabinet DreamGroup, qui estime que les DRH disposent là d’un moyen de contribuer directement au compte d’exploitation de l’entreprise (lire son interview p. 29).

Argument d’attractivité et de vente

« Être un employeur socialement responsable est un argument d’attractivité, déclare de son côté Sophie Thiéry, directrice de Vigeo Enterprise, cabinet de notation extrafinancière. Mais je ne suis pas certaine qu’un candidat refuserait un poste au prétexte que l’entreprise n’est pas éco-citoyenne. » Un emploi n’est pas exactement un bien substituable. Pour preuve, malgré la vague de suicides de salariés fortement médiatisée à partir de 2009, France Télécom se situe tout de même, cette année, 36e du classement annuel des employeurs préférés des étudiants ingénieurs français publié par Universum (24e en 2008 et en 2009 ; 30e en 2010).

L’idée de faire de la reconnaissance de la responsabilité sociale un argument de vente pour un produit ou une prestation commence à faire son chemin. Yazid Sabeg, commissaire à la Diversité, a souhaité, au cours des Rencontres internationales de la diversité des 29 et 30 septembre derniers, que « l’accès aux marchés publics soit conditionné à l’obtention du label Diversité ».

Au cours de ces mêmes rencontres, Alain Gavand, Pdg du cabinet de recrutement du même nom, a présenté un projet de notation des cabinets de recrutement sur leur capacité à ne pas discriminer et à favoriser la diversité afin de les distinguer les uns des autres aux yeux des clients. Une première expérimentation devrait s’achever en décembre.

Déjà, certains donneurs d’ordres de centres d’appels exigent que ces derniers aient le label Responsabilité sociale, un référentiel mis en place pour le secteur sous l’égide des pouvoirs publics.

Peu de transparence

Dans cette perspective, où les référentiels RH ne servent plus seulement à la cohésion interne mais à orienter des choix de consommation, il y a un problème. Il est en effet difficile pour le candidat ou l’investisseur de se faire une idée exacte de la réputation sociale des entreprises à partir des labels et des trophées, tant l’offre est pléthorique, les méthodes hétérogènes (déclaratif, audit, mixe des deux) et la communication peu transparente. Ainsi, il n’y a jamais de perdants. Seuls les noms des cinq ou dix premiers d’un palmarès sont connus, jamais les suivants. C’est écrit noir sur blanc dans le règlement de Great place to work : « GPTW publiera uniquement des informations sur les entreprises qui sont classées [dans le palmarès] et publiera uniquement les informations positives relatives à chaque entreprise. » De même, les noms des firmes qui obtiennent un label sont publiés, mais jamais ceux des entreprises qui le perdent ou qui ne parviennent pas à l’obtenir. Sauf quand un syndicat fait savoir, comme en 2008, que Téléperformance perd son label Responsabilité sociale dans les centres d’appels.

Enfin, la montée en puissance des réseaux sociaux, sur lesquels les salariés peuvent diffuser ce qu’ils pensent de leur employeur, relativise encore la valeur de ce que disent les référentiels sociaux. C’est pourquoi Didier Pitelet ­insiste sur le fait que les entreprises postulantes aux labels et trophées devraient être « irréprochables ».

L’ESSENTIEL

1 Les outils attestant les vertus sociales des entreprises se sont multipliés ces dernières années, sous forme de labels, de prix ou de trophées.

2 Les entreprises y ont de plus en plus recours avec pour premier objectif d’améliorer leur cohésion interne et de formaliser leurs processus ; et marginalement de faire connaître la qualité de leur GRH à l’extérieur.

3 Mais il existe un risque de réputation si le décalage entre ce que communique l’entreprise et ce qui s’y passe est trop grand. D’autant qu’aujourd’hui, les réseaux sociaux donnent de la visibilité à l’expression des salariés en poste.

La réputation sociale a une incidence sur le business, estiment les salariés

→ 96 % des salariés, des représentants du personnel et des chefs d’entreprise estiment qu’une mauvaise image sociale a un impact important sur l’implication des salariés dans leur travail.

→ 96 % des chefs d’entreprise pensent qu’une mauvaise image sociale pénalise l’attractivité de l’entreprise vis-à-vis des candidats.

→ 90 % des salariés et 74 % des chefs d’entreprise pensent que l’image sociale de l’entreprise a un impact sur l’attractivité de ses produits.

Source : BVA pour Vivienne16, mai 2010.

Les étudiants font confiance aux salariés en poste

→ 44 % des étudiants se déclarent influencés par ce qu’ils entendent dire d’une entreprise.

→ 62 % des étudiants pensent que les salariés en poste sont la source la plus crédible pour juger un employeur.

→ 29 % utilisent les réseaux sociaux pour s’informer sur une entreprise, mais seulement la moitié les jugent fiables.

Source : agence Quatre Vents, étude auprès de 100 000 étudiants et jeunes diplômés, avril 2011.

Auteur

  • EMMANUEL FRANCK