L’adoption d’un mode de vie centré sur la consommation et le travail entraîne dans nos sociétés laborieuses des troubles liés à des types de fonctionnement acquis et valorisés par l’entreprise. L’homme supposé “entrepreneur de lui-même” tend non seulement à vivre pour acheter les produits dont nous inonde le marché, mais encore à adapter ses comportements, ses valeurs et sa vision du monde à la sphère du travail. Pour reprendre ou garder le contrôle sur leur destinée, les travailleurs en viennent à vouloir la “gérer”, dans une logique de performance : gestion de son poids, de son alimentation, de son temps de veille ou de sommeil, de son budget ou de ses enfants, dans un souci constant d’optimisation de son quotidien. Ne parle-t-on pas aujourd’hui de coaching jusque dans la sphère privée ? Mais la maladie transmise par l’entreprise va plus loin. Incapable de concilier les plaisirs de leur vie personnelle et les contraintes de la vie professionnelle, nombre d’individus sont atteints de “formatite”. Ils auront tendance à se remettre sans cesse en question pour tenter de devenir de meilleures personnes et s’engageront dans une kyrielle de résolutions, voire de formations destinées à améliorer leur vie privée dans une logique de promotion personnelle incessante.

Docteur en psychologie, enseignant et chercheur au Canada, Michel Perreault, non sans humour, propose à tous ces malades du boulot des solutions apparemment calquées sur les théories du développement personnel promues dans l’entreprise, mais qui sont en fait un vibrant appel à critiquer l’hégémonie de ses valeurs au nom d’un véritable humanisme.

Je ne suis pas une entreprise !

Michel Perreault, La Découverte, 224 pages, 17,50 euros.