Chez Orange, le réseau social Plazza est clairement affiché comme une déclinaison du plan stratégique Conquête 2015 visant à repositionner l’humain au centre de l’entreprise. « Nous avons commencé à réfléchir à la mise en place d’un réseau social interne il y a deux ans, rapporte Thierry Flury, directeur des applicatifs RH groupe et réseaux sociaux à la DRH d’Orange. Nous disposions à l’époque de sept réseaux sociaux intervenant sur différents périmètres de métiers comme le marketing ou les systèmes d’information. De plus en plus d’entités nous demandaient de disposer d’un réseau social, nous avons alors opté pour une démarche globale sur l’ensemble du groupe et l’abandon du fonctionnement en silos pour laisser place aux échanges transversaux. »

Lancé en décembre 2010, le premier objectif de Plazza est en effet de créer du lien social, de favoriser la communication interpersonnelle et de libérer la parole des salariés. Second objectif : partager des informations, des documents, de l’expertise, autour de communautés d’intérêt. « Nous avons voulu un dispositif ouvert, sans validation managériale ni modération, mais, de facto, il existe une forme d’autorégulation, dans la mesure où les salariés se connectent sous leur propre identité, sans pseudo, et qu’ils acceptent les termes d’une charte de bon usage », énonce Thierry Flury. Celle-ci définit les règles du jeu dans l’ensemble des pays. Est par exemple proscrite toute référence à la religion ou à la politique et il est interdit de faire du prosélytisme.

Plazza n’est pas non plus le lieu pour évoquer le délicat sujet des suicides. Un autre espace Web existe, le blog de Stéphane Richard, où lui-même et les membres du comité exécutif sont interpellés sur les conditions de travail, et où il existe une modération.

« Au moment du lancement, nous avons eu beaucoup de questions sur les garanties que les actions menées sur le réseau ne seraient pas prises en compte par les RH. Le réseau Plazza n’a aucun lien avec les applications RH, ce n’est pas un outil de process métiers. Les services RH ont leurs propres outils pour gérer l’évaluation des compétences, la formation ou encore le recrutement. » Un choix que regrette Sébastien Crozier, président du syndicat CFE-CGC Unsa de France Télécom Orange, qui estime que Plazza « a raté sa vocation ». Il aurait été en effet possible, selon lui, « de valoriser les parcours et de reconstituer une base de données de compétences ».

Dans les champs de l’annuaire, chaque collaborateur maîtrise le niveau de confidentialité des informations qu’il diffuse. L’intitulé du poste et le lien hiérarchique ne sont pas automatiquement indiqués. Joël Leconte, représentant de SUD au CCUES, s’inquiète toutefois de « l’utilisation managériale » qui pourrait être faite, et souhaiterait discuter du contenu de la charte, soulignant par exemple que la conservation des échanges en archive est prévue sans précision de durée. La direction signale toutefois qu’ils sont conservés jusqu’à ce que le salarié quitte l’entreprise.

De son côté, Laurent Riche, DSC CFDT, ne sent pas un engouement extrême pour Plazza, et estime que « les salariés sont peut-être un peu saturés d’informations électroniques ». Le syndicat y a toutefois ouvert un compte, comme la CFE-CGC/Unsa, « pour ne pas être absent ».

Vingt-sept mille membres sont inscrits à ce jour (sur 90 000 salariés qui y ont potentiellement accès) et 1 000 communautés d’intérêt ont été créées. Certaines sont initiées par l’entreprise, mais 90 % sont spontanées et 70 % ont un caractère professionnel, selon Thierry Flury.

Quatre grands types de sujets sont répertoriés : les communautés autour de métiers, d’expertises technologiques, celles d’entraide et de hobbies. Le plus fort taux d’adhésion (54 %) à Plazza revient aux métiers du service informatique, tandis que 44 % des salariés de la communication y sont présents et 36 % des collaborateurs de la DRH, avec une communauté des formateurs particulièrement active.

Pour accompagner le déploiement du réseau, Orange a mis en place des didacticiels, des vidéos courtes où les fonctionnalités basiques sont décrites : comment créer un réseau de contacts, pourquoi et comment publier et accéder à une communauté, etc. Une centaine d’animateurs de communautés ont suivi des formations au community management, réalisées par le cabinet Human Connect.

Deux consultants du groupe animent les 500 à 600 community managers. Ces derniers étant les salariés à l’initiative des communautés. Un budget de 600 000 euros a été alloué au lancement en 2011, dont un tiers dédié à l’accompagnement au changement confié à Orange Consulting.

Aucun objectif de productivité ou de ROI pour le groupe ; le but est d’avoir de nouveaux membres : 60 000 d’ici à fin 2015. Et, « pour l’avenir, nous voulons disposer d’un outil de recherche sémantique, faciliter les fils de discussion et faire un suivi plus qualitatif des usages du RSE, indique Thierry Flury. Nous ­souhaitons également ouvrir progressivement le réseau dans d’autres pays en nous assurant de l’engagement d’un sponsor local. Une version mobile est également prévue pour début 2012 ».

• Activité : opérateur de télécommunications.

• Effectifs : 170 000 collaborateurs dans le monde, 102 000 en France.

• Chiffre d’affaires 2010 : 45,5 milliards d’euros.