L’explosion de l’usine AZF, le 21 septembre 2001, a suscité la stupeur et ouvert, dans la foulée de la recherche pénale, une mise en accusation des acteurs censés gérer la sécurité. Or le problème de la sécurité de l’usine AZF, comme de celle de tous les sites industriels dangereux, était bien plus complexe qu’il y paraissait de prime abord. Loin d’avoir été négligée, la sécurité à AZF était progressivement devenue l’une des préoccupations majeures de l’organisation depuis les années 1980.

Par ailleurs, contrairement à ce qu’a tendance à croire la société civile, les questions de sécurité dans l’entreprise n’ont pas tant à voir avec la discipline et la sanction qu’avec le compromis. L’expérience a montré qu’à l’exception des violations flagrantes et volontaires des procédures, il est contre-productif de sanctionner les erreurs, puisque cela conduit à les dissimuler. Il est préférable de créer les conditions propices à de véritables retours d’expériences en garantissant que les collectifs de travail impliqués dans un dysfonctionnement pourront s’exprimer librement. La sécurité résulte toujours d’un arbitrage entre les différentes contraintes du travail : productivité, innovation, préservation de la paix sociale, etc.

Sans vouloir se mêler d’une affaire judiciaire qui n’est pas encore complètement élucidée, Gilbert de Terssac, sociologue, et Jacques Mignard, ancien syndicaliste, animateur sécurité à AZF, cherchent à expliquer les enjeux organisationnels de la sécurité d’une usine ou d’une entreprise. Ils posent aussi la question de savoir s’il est légitime que la sécurité soit de la seule responsabilité de l’entreprise quand le risque encouru, à l’évidence, ne s’arrête pas à son enceinte.

Les Paradoxes de la sécurité, le cas d’AZF

Gilbert de Terssac et Jacques Mignard, PUF, 272 pages, 29 euros.