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Enquête

LA DRH, COPILOTE D’UN CHANGEMENT D’ORGANISATION

Enquête | publié le : 30.08.2011 | V. Q.

Dans son usine d’Annecy, le sous-traitant automobile a transformé l’organisation pour améliorer la performance et la motivation. Le copilotage du changement a été un facteur de succès.

Dans les années 2000-2005, le modèle organisationnel des EAP (équipes autonomes de production) s’est déployé dans le secteur automobile. Le sous-traitant GGB France n’y a pas échappé. Mais, dans cette entreprise à la culture paternaliste, laissant peu de place à la responsabilisation, l’introduction de ce modèle s’est soldée par un échec.

« Comme le mentionne l’acronyme EAP, c’était devenu les équipes anarchiques de production ! », se souvient Magali Eyraud, RRH de GGB France. Principal problème : un défaut d’encadrement de proximité, avec un manager seulement pour 30 opérateurs. Conséquences : une productivité en berne, des défauts qualité en hausse et une démotivation des équipes. « L’insuffisance de management ne permettait ni de faire respecter les règles ni de reconnaître le travail accompli. Ceux qui aimaient le travail bien fait et qui étaient impliqués dans l’entreprise ont beaucoup souffert, car ils n’étaient pas reconnus à leur juste valeur », relate Cyrille Trupiano, directeur de la production. Avec la DRH, il planche alors sur la production d’un nouveau modèle d’organisation, dite par “chaîne de valeur” : des petites équipes de huit personnes, pluridisciplinaires, placées sous l’autorité d’un opérateur leader.

Une démarche participative

Cela représente un changement majeur, qui ouvre un énorme chantier de RH, puisqu’il faut sélectionner et former parmi les opérateurs ceux qui deviendront leaders, mettre en place des responsables de chaînes de valeur (encadrant trois équipes) et leur donner les moyens de les animer. Démarche participative, aussi : toutes les parties prenantes, production comme métiers supports – logistique, méthodes, qualité, amélioration continue –, intervenant sur la chaîne de valeur sont associées à la construction du projet. « Nous sommes venus avec une organisation cible. Mais les modes opératoires ont été définis par les opérateurs leaders lors de séminaires de travail collectif », illustre Magali Eyraud. Des séminaires ont aussi été consacrés aux méthodes de travail collaboratif.

Depuis sa mise en place en 2010, la nouvelle organisation produit déjà ses effets. Tous les indicateurs, industriels et RH, s’améliorent. Le taux de service client (nombre de pièces livrées en temps et qualité voulus) est passé de 78 % en 2008 à 97 % en 2010 et les réclamations clients ont été divisées par deux. Les accidents du travail ont nettement diminué, passant dans la même période de 3,99 à 2,6 (pour les accidents avec arrêt), l’absentéisme décline.

La formation a évidemment fait un saut qualitatif et quantitatif (passant de 1,83 % à 4,14 % de la masse salariale). La DRH est particulièrement fière du bond spectaculaire du taux d’entretiens annuels de progrès, passé de 48 % à 100 %. Pour Cyrille le Trupiano, c’est la preuve que l’organisation en équipes à taille humaine est la bonne : « Le 100 %, c’est à la fois du quantitatif et du qualitatif. Prendre le temps de faire le bilan, fixer les objectifs d’avenir : on ne peut le faire que si on manage moins de 10 personnes. »

Les nouveaux opérateurs leaders et les responsables RCV n’ont d’ailleurs pas hésité à solliciter l’aide de la DRH pour formuler les objectifs fixés aux salariés de leur équipe ou à les faire valider. « Un travail d’échange et de confiance s’est instauré entre la fonction RH et les managers », se félicite Magali Eyraud.

La nouvelle organisation est plutôt bien appréciée, « même si certains y voient une réintroduction du contrôle », constate Michel Bauquis, élu CFDT. Lui-même est devenu, à sa grande satisfaction, opérateur leader. Il note cependant que des marges de progrès existent encore pour travailler en partenariat avec les services supports : « Nous sommes encore deux mondes séparés. »

RH-production, un binôme gagnant

Peu banal, le binôme RH-Production mis en place pour réaliser ce changement organisationnel a été un facteur de succès. « Ce processus de travail a pris deux ans : pour les opérationnels, c’est long. L’association en binôme est fructueuse : la fonction RH joue un rôle privilégié de promoteur, d’animateur pour que le projet aboutisse. Le responsable de production appuie le plan d’action défini par le groupe et le fait vivre. » L’apport de la DRH selon Cyrille Trupiano ? « Un grand ballon d’oxygène : elle nous a donné le support et les moyens nécessaires pour construire cette organisation. Le catalyseur de l’organisation, c’est elle. »

Aujourd’hui, la DRH assure le suivi de la nouvelle organisation. Principal point de vigilance : le développement des opérateurs dans leur fonction de manager, car ils n’ont pas encore tous acquis les différentes facettes de leur emploi. Elle prête ainsi une attention constante aux retours du terrain pour pouvoir, s’il le faut, apporter rapidement les solutions.

GGB France

• Activité : équipementier automobile de second rang (fabrication de paliers autolubrifiants).

• Effectifs (France) : 345 salariés, dont 240 à Annecy.

• Chiffre d’affaires (2010) : 55 millions d’euros.

Auteur

  • V. Q.