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Enquête

UN ARTISTE POUR RECREER DU LIEN ET DU PLAISIR

Enquête | publié le : 19.07.2011 | MARIETTE KAMMERER

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UN ARTISTE POUR RECREER DU LIEN ET DU PLAISIR

Crédit photo MARIETTE KAMMERER

Une résidence d’artiste pendant trois mois dans une entreprise en pleine mutation, voilà une idée pour le moins originale, qui a bousculé les salariés mais a su susciter curiosité et échanges.

Dans un contexte de bouleversements exceptionnels pour les salariés, lié au projet de relance de la Camif par Matelsom – un déménagement du siège social de Nanterre à Niort, un changement de tous les systèmes informatiques et la recomposition d’une équipe avec des salariés de cultures différentes : ex-Camif, Matelsom et nouvelles recrues –, la direction a eu l’audace de tenter l’expérience de l’accueil d’un artiste en résidence.

Retrouver du plaisir sur le lieu de travail

« Les objectifs étaient de créer du lien entre les gens et qu’ils retrouvent du plaisir sur le lieu de travail, explique Émery Jacquillat, Pdg de l’entreprise. C’était une période très difficile, les salariés avaient beaucoup de travail, et j’ai pensé qu’une méthode classique de coaching n’aurait aucun résultat. » D’où l’idée de faire appel à une artiste, Anne-Laure Maison, qui avait déjà réalisé une carte de vœux pour l’entreprise et dont le travail est axé sur le thème de la maison, tout comme l’activité du groupe Matelsom. « L’artiste a été séduite par le projet, je lui ai exposé mes deux objectifs et je lui ai donné carte blanche, ajoute le Pdg. L’agence Art affaire a été un intermédiaire essentiel pour organiser la résidence, guider ou recadrer l’artiste par rapport aux objectifs fixés. »

Anne-Laure Maison a commencé par des portraits de salariés devant chez eux et une photo d’une pièce de leur maison. « Cela dévoilait sur le lieu de travail une partie de leur vie privée, certains ont refusé, d’autres ont joué le jeu et l’ont invitée chez eux. L’équipe de direction a elle aussi découvert les collaborateurs sous un autre angle », ajoute Émery Jacquillat. Ensuite, la série de portraits a été affichée sur l’autre site de l’entreprise, près de Dreux, comme un lien entre tous les salariés qui ne se connaissaient pas.

Une autre fois, l’artiste a modifié une enseigne sur le bâtiment, en changeant le sens d’un mot. « Mais, pris dans la routine, les salariés ne l’avaient même pas remarqué. Ce manque d’observation les a interpellés. Ils cherchaient ensuite tous les jours ce que l’artiste avait pu changer dans l’entreprise », raconte le Pdg.

Un matin, ils ont découvert des noms d’artistes tagués à la peinture devant chaque place de parking, un clin d’œil aux ex-Camif, nostalgiques de leur place de parking attitrée. « Cela a suscité des discussions, les gens lui demandaient qui étaient ces artistes, allaient voir leurs œuvres sur Internet. Il y a donc eu des échanges et du plaisir », observe Émery Jacquillat.

Un autre jour, l’artiste a scotché des bandes roses au sol, au milieu de l’open space. Frappée par le manque de communication directe entre les gens, elle matérialisait chaque déplacement d’un collaborateur vers un autre. Dans certains endroits, il n’y avait pas du tout de rose, cela a fait prendre conscience aux salariés, sur le mode humoristique, de l’importance d’échanger.

« Le travail de l’artiste était une bouffée d’oxygène dans notre quotidien, une découverte permanente qui nous a ouvert les yeux, nous a réveillés et surpris », témoigne un cadre de l’entreprise. Cela a aussi accéléré le processus de deuil nécessaire à l’intégration des ex-Camif.

Une culture commune

« Au niveau de l’ambiance de travail, j’ai clairement senti un avant et un après, note le Pdg. L’artiste a aussi cassé certains codes de l’entreprise, ce qui a décomplexé les salariés et les a poussés à oser davantage. »

Cette expérience unique a aidé à passer une période difficile et a créé le début d’une culture commune valorisante. L’entreprise y a gagné en termes d’image – sympathique et innovante –, ce qui est un atout pour le recrutement.

Pourtant, au début, le projet n’a pas soulevé l’enthousiasme. Au contraire, tant les salariés que le comité de direction étaient plus que sceptiques, et le fait d’investir 25 000 euros dans cette expérience a fait débat.

« Il a fallu un mois et demi pour que les salariés s’ouvrent, d’où l’importance d’avoir du temps – trois mois – et une agence qui soutient l’artiste sur la durée, ajoute Émery Jacquillat. Bien sûr, il y a une prise de risque, mais j’ai bien fait de le prendre, car les résultats sont étonnants. »

* Cette initiative a valu au groupe Matelsom une nomination aux Espoirs du management 2011.

MATELSOM

• Activité : vente de mobilier par correspondance.

• Effectif : 100 personnes.

• Chiffre d’affaires : non communiqué.

Auteur

  • MARIETTE KAMMERER

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