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LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION

Pourquoi la fusion des Opca est-elle si difficile ?

LE RENDEZ-VOUS DE LA FORMATION | Analyse | publié le : 12.07.2011 | L. G.

Alain Druelles, chef du service de la formation continue du Medef, a expliqué les raisons de la complexité de la fusion des Opca, lors du séminaire Sémaphores-Luttringer du 18 mai.

« L’ANI du 7 janvier 2009 ne dit rien sur la fusion des Opca ; c’est une lettre paritaire du 27 mai qui précise le sens d’un possible rapprochement. Très clairement, dans l’esprit des partenaires sociaux, les Opca ne sont pas vus comme de simples financeurs, mais comme des acteurs devant jouer un rôle d’accompagnement, au travers des services qu’ils doivent rendre aux branches et aux entreprises : les politiques de branche sont véritablement l’épicentre de cette réforme, et les Opca en sont les outils d’application.

Une des sources de complication du dossier réside dans le fait que le gouvernement n’a jamais été explicite sur le sens politique qu’il donnait à cette fusion, alors même qu’il a été particulièrement moteur et exigeant dans ce domaine.

Du point de vue du Medef, quels étaient les effets positifs attendus ? Soyons clairs, les attentes en termes d’économie d’échelle sont mineures : les frais de collecte sont très faibles, et ils n’y pas grand chose à attendre de ce côté. En revanche, la véritable attente du Medef tient plutôt dans les possibilités de mutualisation des services d’ingénierie et l’amélioration de la proximité avec les plus petites entreprises, afin de gérer et d’accompagner les mobilités professionnelles.

Pourquoi la situation est-elle si complexe aujourd’hui ? Parce que chaque Opca est un cas d’espèce ! Chacun a une histoire, une géographie, une ou des politiques, et des analyses sur les problèmes de formation qui lui sont propres. Plus exactement, qui sont propres à chaque partenaire social créateur et gestionnaire de ces Opca. C’est, en conséquence, le plus complexe de tous les dossiers ; car il touche aux aspects formation, mais aussi sociaux de telle ou telle branche ou secteur de chaque Opca.

La proximité est une notion fréquemment mise en avant pour justifier de la nécessité de fusionner les Opca. Mais de quoi parle-t-on au juste ? La proximité peut s’entendre au sens intersectoriel des branches et branches annexes ; mais aussi au sens local du territoire immédiat. On voit bien que beaucoup de reconversions vécues aujourd’hui par des salariés s’exercent dans leur environnement géographique proche et pas forcément dans la branche d’appartenance d’origine. Quelle notion de proximité doit alors prévaloir dans les négociations de rapprochement ? Ce n’est pas simple, et le Medef n’est pas en position d’infléchir le choix de ses branches adhérentes.

Un des autres problèmes de cette réforme-fusion est le désir du gouvernement de rapprocher le droit de la formation professionnelle du droit commun, et de nier les spécificités de la formation professionnelle continue. Est-ce bon ou pas ? Et si on se rapproche du droit commun, doit-on aller vers du droit public ou du droit privé ?

Ce type de débat est fondamental, car il touche à la question de l’obligation légale d’origine fiscale qui finance la formation professionnelle en France. Parce que la ressource est d’origine fiscale, les fonds doivent-ils obligatoirement être considérés comme des fonds publics ? Et les Opca doivent-ils, en conséquence, prendre un statut et une posture d’opérateur public comme semble le souhaiter le gouvernement depuis plusieurs mois ? Cette question est centrale, car selon qu’elle sera tranchée dans un sens ou dans l’autre, le décideur ne sera pas le même.

Les négociations parfois très tendues entre Opca butent aujourd’hui sur la question de la régulation et de la culture de régulation de chacun. Quel est le niveau de transparence dans les décisions de gestion des fonds ? Quelle peut être l’opposabilité à telle ou telle décision ? Les pratiques héritées d’années de fonctionnement sont très différentes, et c’est un vrai problème pour les fusions.

Ainsi, la gestion de la future section rassemblant les entreprises de 10 à 49 salariés contient d’énormes conflits potentiels. Qu’advient-il des versements libres des entreprises ? Qui les gère ? Sont-ils perdus au profit de la mutualisation ? Quelles sont les règles de sortie ? Une section professionnelle paritaire ne peut-elle intervenir sur ces questions ? Seul le CA de l’Opca le peut-il ? Tout cela pose la question de la publicité des décisions et des débats, donc de la responsabilité politique de chacun. »

Auteur

  • L. G.