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Tous les salariés français évalués d’ici à fin 2012

Pratiques | RETOUR SUR… | publié le : 05.07.2011 | FLORENCE ROUX

Le dispositif de gestion du stress de PSA Peugeot Citroën Automobiles est expérimenté depuis 2007. Formalisé en 2009 par un accord d’entreprise, il combine évaluation, suivi et plans d’action. Quelque 30 000 personnes ont déjà répondu au questionnaire du dispositif d’évaluation et de suivi du stress professionnel (DESSP).

Début 2007, PSA Peugeot Citroën Automobiles est touché par le suicide de 6 salariés, dont 4 à Mulhouse (10 000 salariés sur 80 000 en France). « Ce fut un électrochoc, se rappelle le Dr Nicolas Brosset, qui est alors médecin du travail du site, aujourd’hui coordinateur de la région Est et référent du groupe pour les risques psychosociaux(1). Il fallait trouver des solutions, en sortant de l’opposition entre déni et stigmatisation du stress professionnel. En mettant la direction et le personnel autour d’une table. » Sans négliger l’action.

Un grand inventaire du stress

Dès l’été, l’entreprise installe des cellules de veille sur les sites, avec médecin du travail, RH et CHSCT. Un recueil des plaintes pour harcèlement moral est ouvert sur l’intranet, sous la responsabilité des RH. Un numéro vert est créé, qui permet aux salariés de dialoguer anonymement avec un psychologue du prestataire Psya. « En 2007, nous avons aussi et surtout lancé un grand inventaire du stress, ajoute Jean Sevagen, chargé de la sécurité et des conditions de travail corporate. Nous voulions savoir de quoi nous parlions, avant de passer à l’action. »

En mars 2008, une enquête menée par le cabinet Stimulus auprès de 3 600 salariés révèle qu’un salarié sur cinq est « dans un état de stress trop élevé », surtout les opérateurs de ligne et les femmes à la fabrication. Le questionnaire prend en compte trois dimensions du stress : son niveau, ses conséquences pathologiques et 29 facteurs professionnels déclenchant (charge de travail, ambiguïté des rôles, restructuration, reconnaissance de la hiérarchie, etc.).

Construire des analyses collectives

Toujours proposé par les médecins du travail durant la visite de routine, ce questionnaire permet de repérer et d’aider les personnes en souffrance sous le sceau du secret médical. Les données individuelles, une fois anonymisées et adressées au prestataire extérieur, permettent de construire des analyses collectives sur le stress, qui sont à leur tour retransmises aux acteurs de terrain. « Dès le premier audit, rapporte le Dr Brosset, nous avons constaté qu’après objectivation des données, les équipes réunies en groupes de travail pouvaient agir sur les facteurs de stress et, éventuellement, sur des dysfonctionnements dans leur organisation, puis passer ensemble, concrètement, de l’analyse au plan d’action. »

Fin 2009, alors que 40 méde– cins du travail du groupe avaient déjà rempli 6 500 questionnaires, les organisations syndicales ont souhaité contractualiser ce travail dans un accord, signé le 12 octobre par l’ensemble d’entre elles(2) sauf la CGT. Sous le terme de dispositif d’évaluation et de suivi du stress professionnel (DESSP), le texte de l’accord institutionnalise la formule déjà expérimentée depuis 2007, qui combine le recueil de données individuelles, l’analyse collective et des plans d’action locaux.

« L’accord reconnaît l’impact du travail sur le stress, se félicite Robert Calvet, délégué syndical CFDT à PSA Mulhouse. Il permet d’aider des salariés individuellement et de former les managers. Mais si la parole s’est libérée, on n’a pas remis en question la philosophie qui veut qu’on produise toujours plus vite en augmentant la rentabilité. » Pour Julien Wostyn, délégué du personnel (DP) CGT à Mulhouse, aucune mesure concrète ne s’attaque à l’origine du stress : l’organisation du travail. Les rythmes de travail se sont intensifiés, la charge a augmenté, alors qu’en cinq ans, on compte 17 500 salariés de moins.

Intensification des rythmes de travail

Quelque 30 000 personnes ont déjà répondu au questionnaire du DEPSS et, en 2010, 500 entités du groupe ont appliqué la même méthode de travail à leur problématique singulière. Chaque fois, le manager, assisté par la fonction RH, formé et informé des données sur le stress dans son atelier ou son secteur, est chargé de créer un groupe de travail avec des salariés, un membre du CHSCT et un médecin du travail.

Ensemble, ils recherchent comment s’expriment, les trois facteurs de stress les plus importants pour eux dans le quotidien, puis ils déterminent trois actions prioritaires pour le limiter et résoudre d’éventuels dysfonctionnements. « A Mulhouse, nous avons ainsi créé un pool de remplaçants pour pallier les absences qui déstabilisent les équipes, relève Patrick Rummelhart, DP CFE-CGC, qui a soutenu la démarche depuis le début. Et aujourd’hui, cette mesure prise sur un site pour répondre à une problématique locale inspire la RH au plan national. » Pour le Dr Brosset, « agir sur les facteurs de stress amène souvent à améliorer l’organisation ».

Objectif de l’entreprise d’ici à la fin 2012 : que la majorité des salariés français se soient vu proposer le questionnaire, avant – l’initiative ayant démarré en Espagne – de l’étendre à l’ensemble des sites du groupe dans le monde.

(1) Propos recueillis lors des premières rencontres de Divonne-les-Bains sur le stress au travail en avril 2011.

(2) CFDT, CFE-CGC, CFTC, FO et le Groupement des syndicats européens de l’automobile.

DATES CLÉS

Été 2007 : mise en place de cellules de veille et création d’un numéro vert suite au suicide de six salariés en France.

Fin 2007 : enquête sur le stress professionnel auprès de 3 600 personnes sur trois sites.

Mars 2008 : cartographie du stress. Résultats : un salarié sur cinq est stressé.

12 octobre 2009 : signature d’un accord sur le stress professionnel, qui contractualise la mise en place d’un dispositif d’évaluation et de plans d’action.

2010-2012 : application de l’accord aux 25 sites français du groupe.

Auteur

  • FLORENCE ROUX