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RECRUTER DES SENIORS : LE DÉFI DE DECATHLON

Pratiques | publié le : 05.07.2011 | VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE

L’enseigne d’articles de sport peine à tenir les objectifs de recrutement de son accord seniors. Mais la direction expérimente en Rhône-Alpes une convention avec Pôle emploi, qui lui apporte des leviers supplémentaires.

Sur les affiches, des visages jeunes, épanouis par le sport. Dans les rayons, des vendeurs encore étudiants ou à peine entrés dans la vie active. Mais l’atout commercial de l’image du jeune devient un handicap quand il s’agit de recruter des candidats âgés : « Nous ne recevons pas de candidatures de seniors », constate Marie Pinel, responsable diversité, chargée de faire vivre l’accord sur cette population, signé en décembre 2009 par deux des cinq organisations syndicales présentes (Unsa et CFTC). Celui-ci prévoit l’embauche de 120 personnes de plus de 50 ans dans toute la France, dont la moitié en contrat à durée indéterminée (CDI); 80 % en magasin et 20 % en entrepôts.

« La direction a bien embrayé sur le volet maintien dans l’emploi, commente Frank Martinez, délégué syndical Unsa, avec des entretiens de milieu de carrière, des bilans de compétences, des informations sur la retraite et l’adaptation de postes par un ergonome. Mais, si le volet recrutement était ambitieux, en un an, il n’a rien produit. » Le syndicat n’a cependant pas dénoncé l’accord au bout d’un an, parce qu’il voulait « encore donner du temps à la DRH, très mobilisée sur le handicap ».

Du côté de la CFDT, le constat est plus sévère : son délégué central Christophe Levier dénonce « une quantité infime de postes proposés » et craint qu’ils ne le soient qu’à temps partiel.

Pour obtenir de meilleurs résultats en matière de recrutement de seniors, le distributeur d’articles de sport a signé récemment avec Pôle emploi une convention expérimentale en Rhône-Alpes, qui pourrait, à terme, être étendue à d’autres régions. Pôle emploi aide l’entreprise à recruter tous les publics dans ces 8 départements, en communiquant largement sur ses offres, voire en aidant à l’organisation de la sélection (choix des méthodes, appui logistique…). Il incite tout particulièrement les seniors à postuler.

La convention autorise aussi Decathlon à utiliser dans ses annonces d’offre d’emploi, “le cas échéant”, la mention : “Dans le cadre du plan senior, à compétences égales, priorité aux personnes de 50 ans et plus”. Des évaluations en milieu de travail (EMT) simples ou préalables à l’embauche peuvent aussi être mobilisées.

Un vrai changement culturel

« Ce plan est un vrai changement culturel pour nous, assure Marie Pinel, car actuellement, nos recrutements en CDI concernent surtout des étudiants qui ont effectué des CDD durant l’été ». Si la direction ne souhaite pas encore communiquer de résultats, les premières embauches de seniors citées par les organisations syndicales porteraient pour l’heure principalement sur des CDD.

Pour accompagner ce plan de recrutement, Decathlon agit sur un levier important : le management. Car intégrer un vendeur de plus de 50 ans peut être compliqué pour « des responsables de rayon de 23-24 ans, préoccupés d’abord par la productivité », reconnaît la responsable diversité.

Apprendre à accepter les plus de 50 ans

Un module “animation des seniors” est donc désormais intégré à la formation au management de tout nouveau responsable de rayon ou directeur de magasin et d’entrepôt, et à la formation complémentaire de ceux qui sont en poste. Si la communication, notamment, a permis de réussir l’intégration de travailleurs handicapés (4,5 % de l’effectif), « elle est plus difficile sur le sujet des seniors », constate Marie Pinel.

Outre l’image “jeune” de Decathlon, les critères d’embauches peuvent aussi rebuter les seniors. Il y a d’abord l’obligation de pratiquer le sport du rayon auquel on postule.? Il faut aussi être mobile. Enfin, le salaire de base reste modeste : environ 1 400 euros brut (salaire plus prime) pour un vendeur et 2 000 euros pour un responsable de rayon. La responsable diversité a conscience de ces limites et admet que son entreprise « devra encore s’armer pour attirer des candidats aux CV intéressants ».

Auteur

  • VÉRONIQUE VIGNE-LEPAGE