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LOGEMENT DES SALARIÉS : des entreprises se portent garantes

Pratiques | publié le : 05.07.2011 | CHRISTIAN ROBISCHON

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LOGEMENT DES SALARIÉS : des entreprises se portent garantes

Crédit photo CHRISTIAN ROBISCHON

En ces temps de crise du logement, les employeurs retrouvent un moyen d’agir directement en faveur de leurs salariés pour la location privée grâce à la garantie des risques locatifs (GRL), universalisée l’année dernière.

L’image d’Épinal du patron paternaliste qui loge ses salariés est encore bien ancrée, mais ce n’est plus qu’une image. Voilà bien longtemps que les entreprises ont, sauf exception, cédé la propriété de leurs logements au profit d’une mutualisation. En versant à un ou plusieurs collecteurs un pourcentage de leur masse salariale, initialement égal à 1 %, mais ramené depuis plusieurs années à 0,45 %, les entreprises de plus de 20 salariés réservent des places à leur personnel dans le parc de logements sociaux que gèrent les sociétés d’HLM filiales des collecteurs. Ces droits de réservation concernent environ 800 000 logements. Par ailleurs, le “1 %” permet d’apporter un coup de pouce au financement du prêt du salarié désireux d’acheter son appartement ou sa maison. Ceci n’exclut pas des mesures supplémentaires. Ainsi, Pro BTP, l’organisme de prévoyance de la construction, propose aux salariés de la branche un prêt au taux très réduit de 1,25 % tout compris.

Garantir contre les risques locatifs pour dynamiser le marché

Mais un autre cas de figure reste moins couvert : la location auprès d’un propriétaire privé, qui concerne plus de 6 millions de logements en France. « Or le besoin est particulièrement criant dans les régions en pénurie de logement social, comme en Provence-Alpes-Côte d’Azur, une partie de Rhône-Alpes, sur la façade Atlantique et en Ile-de-France, où se greffe plus qu’ailleurs le problème du coût du loyer », souligne Jean-Luc Berho, vice-président d’Action Logement, la structure qui fédère le monde du 1 % logement, né il y a 50 ans.

Pour dynamiser ce marché du locatif privé, le gouvernement a mis en place début 2010 le mécanisme de GRL : garantie des risques locatifs. Un dispositif renforcé par l’accord interprofessionnel du 29 avril 2011 sur « l’accompagnement des jeunes dans leur accès au logement afin de favoriser leur accès à l’emploi ».

Il s’agit d’une prime d’assurance assortie d’un avantage fiscal, que le bailleur souscrit pour se garantir que le loyer lui sera versé même en cas de difficulté momentanée du locataire (lire l’encadré p. 14). L’idée est d’inciter le propriétaire à accepter un locataire même si celui-ci ne présente pas un profil sécurisé : celui du salarié en CDI ou du fonctionnaire n’engageant pas plus du tiers de son revenu dans le loyer (un « taux d’effort » inférieur à 33 %, en langage technique). Ce locataire vu comme « idéal » se fait de plus en plus rare à l’heure de la montée des contrats temporaires et du nombre de travailleurs pauvres.

Le sujet relativement récent de la garantie des risques locatifs donne l’occasion aux entreprises de jouer à nouveau un rôle plus direct dans la politique de logement. Comment ? En souscrivant la GRL à la place du bailleur, en contrepartie de quoi ils obtiennent qu’elle joue en faveur de leurs salariés.

Cinq employeurs sont engagés dans ce processus à ce jour : une filiale de BNP Paribas (Securities Services-Fund Services), pionnière en décembre 2010 ; l’établissement d’Eiffage Travaux Publics dans le Var, qui devait contracter le 4 juillet ; l’établissement public de santé Perray-Vaucluse en région parisienne, qui travaille à la mise en place d’une offre, et deux mairies. Dans les deux premiers cas, c’est le CE qui a pris l’affaire en main.

« Même si elle ne concernera qu’un nombre limité de salariés d’Eiffage TP Var – entre 5 et 10 par an par rapport à un effectif de 300 personnes –, la GRL lève de nombreux obstacles : elle dispense de trouver une personne physique qui se porte caution et elle ouvre une solution, notamment à de jeunes ouvriers pas très bien payés, qui ne peuvent accéder au logement social, trop rare par chez nous. Avec la crise, plusieurs cas de difficultés de logement nous sont remontés », souligne Philippe Luppo, secrétaire CFDT du CE d’Eiffage TP Var, qui espère déployer l’initiative dans d’autres sites du groupe de BTP.

Pour l’établissement Perray-Vaucluse, la GRL fait partie des moyens pour attirer et fidéliser le personnel de santé, les infirmiers en particulier, très courtisés en Ile-de-France pour cause de pénurie de main-d’œuvre.

Public francilien également, mais issu de la classe moyenne, que celui de la filiale de BNP Paribas employant 2 500 personnes. Les salaires y sont plutôt confortables (30 000 euros brut annuels en moyenne), mais le coût de l’immobilier peut vite grever le pouvoir d’achat. « Le dispositif peut bénéficier en priorité aux jeunes en recherche d’un premier logement ou aux victimes d’accidents de la vie qui doivent retrouver un nouveau toit. Nous évaluons le potentiel à 100 personnes », expose Martine Fernandez, responsable de la commission logement au CE.

De son côté, la branche de l’intérim a créé une GRL de branche, initiée par le Fonds d’action sociale du travail temporaire (Fastt). Lancée en 2010, elle a bénéficié à 3 000 intérimaires en un an. Elle s’ajoute à une série d’actions en faveur de l’accès au logement, comme locataire ou comme propriétaire. « Nous incitons les intérimaires à préparer leur candidature à un logement de la même manière qu’on prépare un entretien d’embauche », souligne Daniel Lascols, directeur du Fastt. Ainsi, l’an dernier, 5 400 intérimaires ont suivi un coaching destiné à cibler les loyers et zones géographiques de recherche, puis à constituer un dossier qui soit d’emblée complet. Le Fastt entend ainsi contrer l’objection de l’instabilité que ne manque pas d’opposer un bailleur à la candidature d’un intérimaire.

Garantie supplémentaire

En complément de la GRL, le fond a instauré une garantie supplémentaire de risque de vacance, par laquelle il indemnise à 80 % le propriétaire qui se retrouve un temps sans locataire entre le départ d’un intérimaire et l’arrivée du suivant. « Nous nous efforçons également de convaincre un bailleur d’accepter une montée temporaire du taux d’effort, durant le temps mort entre deux missions. Et nous avons identifié 5 000 agents immobiliers en France prêts à loger des intérimaires », ajoute Daniel Lascols.

L’ESSENTIEL

1 Le 1 % logement couvre largement la location en HLM et le coup de pouce à l’accession à la propriété.

2 Il a moins investi le domaine de la location auprès de propriétaires privés, qui concerne 6 millions de logements en France.

3 Les employeurs, eux, peuvent agir directement en faveur de leurs salariés à faibles revenus ou en contrat précaire en souscrivant une garantie contre les risques d’impayés de loyer.

Auteur

  • CHRISTIAN ROBISCHON