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Enquête

YALTA SYNDICAL

Enquête | publié le : 28.06.2011 | E. F.

La négociation collective d’Eurocopter est organisée traditionnellement autour de trois populations : les cadres, les non-cadres et les pilotes. La loi du 20 août 2008 ne devrait pas faire évoluer cette pratique, pour peu que les syndicats restent dans leur pré carré.

A la suite d’un accord datant des années 1970, les droits des salariés d’Eurocopter sont encadrés par deux socles sociaux, l’un pour les cadres, l’autre pour les non-cadres. De leur côté, la quarantaine de pilotes d’essai sont couverts par la convention collective des personnels navigants.

Sur le plan de la représentation du personnel, les salariés élisent, classiquement, des délégués du personnel (DP) et deux comités d’entreprise ; leurs délégués syndicaux (DS) sont issus des 5 confédérations. Toutefois, les pilotes disposent, comme le prévoit leur convention collective, de leurs propres DP et de leurs propres DS. Le syndicat national du personnel navigant de l’aviation civile (SNPAC) est le syndicat unique. Il ne présente pas de candidats dans les autres collèges que le sien et les 5 confédérations ne s’aventurent pas chez les pilotes.

Quant à la négociation collective, « elle fonctionne selon une sorte de Yalta syndical, explique Philippe Pezet, DRH France d’Eurocopter. Le syndicat de pilotes négocie seul pour tout ce qui ne concerne que leur profession, et les syndicats confédérés sont les seuls à traiter des sujets intéressant l’ensemble du personnel. »

Concrètement, cela signifie que seuls les 5 syndicats représentatifs de droit négocient un accord sur le stress ou sur la participation. Tandis qu’un accord sur les primes de vol ne concerne que le SNPAC. En général, ce dernier reprend ce qui a été décidé nationalement au niveau du Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales (Gifas).

Accord de portée générale

Un accord de portée générale peut donner lieu à deux avenants, l’un pour les cadres, l’autre pour les non-cadres, dans le cas d’un accord salarial par exemple. Les cinq syndicats affiliés à une confédération sont invités à négocier, « puisqu’ils bénéficient de la présomption irréfragable de représentativité », explique Philippe Pezet. La loi du 20 août 2008 ayant remplacé la présomption de représentativité par une représentativité démontrée par l’audience, quelle sera l’incidence de ce changement à l’issue du cycle électoral d’Eurocopter, à l’automne 2011 ?

Maintien légal de la représentativité des pilotes

Rien ne devrait changer pour les pilotes. Ces derniers ont obtenu, « après un lobbying d’autant plus efficace que leur pouvoir de nuisance est grand », dixit Philippe Pezet, le maintien légal (loi du 8 décembre 2009) de leur représentativité spécifique : collège de droit, calcul de l’audience dans ce collège… « Si le législateur n’avait pas statué sur la représentation des pilotes, le système aurait pu être remis en cause, mais pas dans l’état actuel du droit », estime le DRH.

Pour les autres syndicats, soumis au droit commun, les élections feront vraisemblablement évoluer leur représentativité, tant au niveau de l’entreprise que par collège (lire l’encadré ci-contre). Dans ce cas, Philippe Pezet souhaite appliquer deux principes. D’une part, l’ouverture aux syndicats non représentatifs : « Je demanderai aux syndicats représentatifs s’ils sont d’accord pour inviter les non-représentatifs à assister aux négociations, sans pouvoir de signature », explique-t-il. D’autre part, il estime que « seuls les syndicats ayant obtenu 10 % dans les collèges concernés par un accord pourront négocier cet accord ». Concrètement, « si la CFE-CGC obtient plus de 10 % tous collèges confondus, elle est invitée à négocier un accord intercatégoriel ; si la CGT est représentative au niveau de l’entreprise mais qu’elle obtient moins de 10 % dans le collège cadres, elle ne peut pas signer un accord ne concernant que les cadres, explique Philippe Pezet. Cela peut donner lieu à un débat qui sera tranché en interne le cas échéant. »

Pour le premier cas de figure, la jurisprudence est claire : la CFE-CGC doit être invitée à la négociation d’un accord intercatégoriel. En revanche, il n’existe pas de jurisprudence pour le second cas. Franck Greuse, délégué syndical central adjoint CFE-CGC, rejoint la position du DRH : « Pour le moment, nous débroussaillons la jurisprudence. Cela dit, politiquement, j’ai intérêt à ce que ne soient invités à un accord spécifique cadres que des syndicats ayant obtenu plus de 10 % dans le troisième collège. Et ce d’autant plus que les autres syndicats voudront sans doute exclure la CFE-CGC de négociations ne concernant que le premier collège, où la CFE-CGC ne se présente pas. »

Retrouvez les accords de dialogue social d’EADS et d’Eurocopter sur www.wk-rh.fr ; rubrique Entreprise & Carrières, “docuthèque”.

Un paysage syndical en voie de simplification

Le cycle électoral d’Eurocopter comporte deux élections : celle du site de Marignane (13), qui s’est déroulée au mois de mars, et celle du site de La Courneuve (93), qui aura lieu aux alentours du mois d’octobre. C’est donc seulement à partir de cette date que l’audience définitive des syndicats et leur représentativité seront connues. Mais comme Marignane emploie 90 % des salariés, ses résultats sont assez proches du résultat final.

Or FO y a obtenu 33 % des suffrages ; la CFE-CGC 27,5 % ; la CFDT 21,4 %, la CGT 9,3 % et la CFTC 8,7 %. Par ailleurs, la CFE-CGC, qui se présente dans les collèges 2 et 3, a obtenu la majorité absolue dans le 3e collège. FO et la CFDT sont également au-dessus de 10 % dans le collège cadres, selon la direction. En revanche, la CGT et la CFTC sont en dessous.

À EADS, L’AGRÉGATION DES RÉSULTATS PASSE PAR LE DEUXIÈME COLLÈGE !

Comment agréger les résultats des élections professionnelles d’un groupe qui compte en France plus de 30 sociétés, certaines comportant un collège, d’autres deux, et d’autres trois ? C’est l’une des questions auxquelles les partenaires sociaux d’EADS, maison mère d’Eurocopter, ont eu à répondre.

La convention à laquelle ils sont parvenus figure dans l’accord de dialogue social d’EADS France de 2009. Lorsqu’il existe un collège unique, les résultats sont agrégés dans le 2e collège ; idem lorsqu’il n’y a qu’un collège cadres et un collège non-cadres. « Il fallait bien trouver une règle pour affecter les votes ; celle-ci a été relativement consensuelle », relate Philippe Pezet.

Auteur

  • E. F.