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Enquête

RÉPARTIR LA VALEUR ENTRE CEUX QUI LA PRODUISENT

Enquête | publié le : 31.05.2011 | JOSÉ GARCIA LOPEZ

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RÉPARTIR LA VALEUR ENTRE CEUX QUI LA PRODUISENT

Crédit photo JOSÉ GARCIA LOPEZ

La Scop (société coopérative et participative) spécialisée dans la conception de logiciels et les services informatiques ne se contente pas d’un partage égalitaire des bénéfices entre ses salariés actionnaires. Comme beaucoup de Scop, elle applique aussi une échelle des salaires resserrée.

« Ce que l’on gagne, on le partage. Mais on ne peut partager que ce que l’on gagne. » Christophe Lacôte, gérant d’Alma, résume ainsi le principe de la répartition des richesses au sein de sa SSII. Dans cette Scop basée près de Grenoble (Isère) et spécialisée notamment dans l’édition de logiciels pour la découpe de tôlerie, le salaire ne représente qu’une partie de la rémunération globale des employés. Cette dernière comprend une importante partie variable liée aux entités autonomes de la société. Alma est en effet organisée en “scopettes” aux activités spécifiques (création de logiciels, applications Internet, infogérance…) et disposant chacune de leur propre résultat d’exploitation.

Performance collective privilégiée

Tous les six mois, 15 % des bénéfices sont redistribués sous forme de primes individuelles. Si ces sommes varient sensiblement en fonction de la rentabilité des structures, dans les faits, « la répartition s’avère assez égalitaire », assure la directrice générale, Laurence Ruffin. Alma privilégie en effet la performance collective à la variable individualisée. L’accord de participation redistribue 50 % du résultat de l’entreprise aux salariés. Les quotes-parts dépendent pour une moitié du salaire et pour l’autre de l’ancienneté, plafonnée à douze ans. Dans les années fastes, le personnel a pu empocher des sommes rondelettes. En 2008, 800 000 euros ont été répartis entre les quelque 70 salariés. Pendant la crise, le retour de balancier a été brutal : le chiffre d’affaires de la PME, très lié à l’investissement industriel, a fondu de 20 %. Et la rémunération globale des salariés d’autant.

Autre élément variable de la rétribution des “almatiens”, les dividendes. En tant qu’actionnaires, tous les coopérateurs perçoivent 10 % du résultat net. « Ce taux est faible pour une Scop, remarque la directrice. En moyenne, il atteint plutôt les 20 %. »

Inégalités salariales estompées

L’intéressement représente quant à lui 10 % des résultats d’exploitation. Tout le personnel touche la même somme, au prorata de son temps de travail. Une façon d’aplanir les différences salariales aux yeux de Christophe Lacôte. Dans la société, le salaire moyen – 31 000 euros brut annuels – est d’ailleurs inférieur à celui pratiqué dans les SSII, 35 000 euros à l’embauche en 2010 selon l’Apec. Avec un éventail des rémunérations resserré – de 1 à 3,5 – Alma cherche surtout à estomper les inégalités entre les hauts et les bas salaires. Revers de la médaille, si les paies les plus modestes, celles des employés les moins qualifiés et des jeunes ingénieurs, sont au-dessus du marché, les plus hautes sont en revanche inférieures à celles pratiquées dans le secteur informatique. Conséquence : embaucher des cadres expérimentés relève de la gageure pour la Scop. « Un senior qualifié vient chez nous par conviction plutôt que pour le salaire », admet le gérant.

Dans chaque département, les responsables fixent les augmentations individuelles en respectant l’enveloppe globale et la règle statutaire selon laquelle il ne peut y avoir plus de 20 % de différence salariale entre deux postes équivalents. Les augmentations collectives sont, elles, discutées en assemblée générale. Stéphane Gutting, chef de projet informatique, apprécie cette transparence : « Notre fonctionnement est démocratique, juge-t-il. Les demandes d’augmentation sont raisonnées, discutées et votées. » Et ces deux dernières années, malgré les baisses de revenus, les débats internes n’ont pas modifié les règles de répartition des richesses. La part finale des bénéfices allant aux réserves – 40 % – demeure inchangée. Alma dispose ainsi de 10 millions d’euros en fonds propres. Une somme importante pour une PME de cette taille. L’enjeu de cette disposition qui tient au statut des Scop ? « Ces réserves impartageables assurent la pérennité des emplois », répond Christophe Lacôte.

Continuer à investir

Le groupe coopératif mène en effet une politique d’extension dynamique vers l’étranger. Au plus fort de la crise, il a poursuivi son soutien financier à ses filiales chinoise et brésilienne récemment créées. « Même si notre entreprise est solide, il faut continuer à investir, prévient Laurence Ruffin. Les salariés recherchent la rentabilité. C’est normal, elle leur assure une partie de leurs revenus. Mais cela ne doit pas nuire à l’investissement. Il faut être pédagogue pour expliquer qu’investir prépare l’avenir, même si cela diminue la rentabilité à court terme. » Un message entendu par Stéphane Gutting, pour qui il s’agit de rester réaliste dans ses demandes de rentabilité, « afin de ne pas casser son outil de travail ». De son point de vue, il fait plutôt bon être employé par une entreprise où la valeur revient à ceux qui la produisent : « Personne n’a de parachute doré. Alma ne s’enrichit pas sur le dos de ses salariés », lance-t-il.

Une opinion positive que partagent visiblement ses collègues : en 2010, la PME a affiché un turn-over inférieur à 9 %, moitié moindre que celui généralement constaté dans les autres SSII.

ALMA

• Activité : édition de logiciels et services informatiques.

• Effectif : 74 salariés.

• Chiffres d’affaires 2010 : 8,5 millions d’euros.

Auteur

  • JOSÉ GARCIA LOPEZ