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SUISSEL’HORLOGERIE BICHONNE SES SALARIÉS

Pratiques | International | publié le : 17.05.2011 | CHRISTIAN ROBISCHON

La demande mondiale d’horlogerie haut de gamme explose de nouveau. Pour s’assurer une main-d’œuvre très qualifiée, le secteur élargit son recrutement et multiplie les avantages sociaux.

La crise est déjà passée pour l’horlogerie suisse. Le salon annuel de Bâle, en mars dernier, a connu une fréquentation et des ventes en forte hausse, notamment grâce aux acheteurs de pays émergents. Le groupe Swatch (Breguet, Blancpain, Omega, Longines…), leader du secteur, s’attend à un exercice 2011 « extraordinaire ». Dans cette branche, le recul des effectifs de 4 000 salariés en 2009 devrait rester une exception dans un mouvement de croissance de long terme. De 2004 à 2008, les emplois sont passés de 40 000 à leur pic historique de 53 000 salariés, dont 20 % de frontaliers français. Ce sommet devrait être atteint de nouveau en 2011.

À ce rythme, l’industrie horlogère pourrait craindre une pénurie de main-d’œuvre : elle n’est pas la seule à recruter dans la Suisse toujours prospère au taux de chômage inférieur à 4 %. Mais les fabricants d’horlogerie ont su se rendre plus attractifs que d’autres. Malgré un confortable niveau médian de 5 883 francs suisses brut (4 500 euros), ce n’est pas le salaire qui fait la différence. « La chimie-pharmacie propose davantage et la mécanique autant », estime Jean-Claude Rennwald, le responsable du secteur horloger pour le syndicat majoritaire Unia.

Le “plus” se trouve d’abord dans la convention collective, renouvelée en 2007 pour la dernière, et dont la prochaine doit prendre effet en janvier 2012, les négociations commençant sous peu. Représentants syndicaux et patronaux s’accordent à la reconnaître comme l’une des plus avantageuses du pays. Elle fixe un salaire minimal d’embauche par région et un 13e mois sans condition d’ancienneté. Elle ramène le temps de travail hebdomadaire à 40 heures au lieu de plus de 42 de moyenne nationale, ajoute jusqu’à deux semaines de congés aux quatre légales et deux semaines de congé de maternité au régime de droit commun, elle multiplie les participations patronales aux frais personnels : charge d’enfants, dépenses médicales…

De précieuses recrues

D’application volontaire, cette généreuse convention s’impose en fait aux employeurs, au risque de voir filer une précieuse recrue chez le concurrent : « 85 % des salariés en relèvent, le pourcentage augmente régulièrement. Toutes les grandes marques l’ont adoptée. Reste à convaincre des PME qui peuvent être dissuadées par le coût des dispositions… ou tentées de pratiquer un dumping », analyse Jean-Claude Rennwald. Les grandes entreprises ajoutent leurs propres avantages sociaux, dont les primes pour résultats, en l’absence de dispositif légal d’intéressement et de participation.

Équipements dernier cri

Parmi les autres facteurs d’attractivité, la Convention patronale de l’industrie horlogère, qui représente les employeurs, relève « l’excellent environnement de travail, fruit de plusieurs centaines de millions d’euros investis par les entreprises pour construire des usines agréables, aux équipements de production dernier cri et au management moderne », souligne son secrétaire général François Matile.

Le souci de conserver la main-d’œuvre s’est manifesté lors de la dernière crise : au lieu de licencier par réflexe comme par le passé, les fabricants ont avant tout recouru au chômage technique. Ils n’ont supprimé que 8 % de leurs effectifs en 2009, alors qu’ils ont perdu 25 % de chiffre d’affaires. Désormais, l’enjeu est d’embaucher de nouveau. Le réseau des écoles techniques – 318 jeunes diplômés l’an dernier – n’y suffit pas.

Depuis huit ans, Tag-Heuer (groupe LVMH, 320 salariés) réalise ainsi une partie de ses embauches sur un critère sans rapport avec la qualification horlogère : le « couple dextérité personnalité », celle-ci désignant la capacité à appréhender un mécanisme complexe et la propension à rester fidèle à un employeur. « Nous recevons certes des candidats venus de la bijouterie ou de la mécanique, mais nous avons aussi recruté des boulangers, des pizzaïolos ou des adeptes du maquettisme, de la couture, du piano », expose Florence Richardin, responsable du développement RH. Ces neuf derniers mois, Tag Heuer a présélectionné une centaine de ces candidats au parcours atypique et en a recruté 10, qu’il forme en interne.

Auteur

  • CHRISTIAN ROBISCHON