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L’organisation du travail, grande absente des accords stress

L’actualité | publié le : 19.04.2011 | VIRGINIE LEBLANC

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L’organisation du travail, grande absente des accords stress

Crédit photo VIRGINIE LEBLANC

Xavier Bertrand devait présenter ce jour devant le Conseil d’orientation des conditions de travail (Coct), un bilan qualitatif des accords sur le stress conclus dans les entreprises de plus de 1 000 salariés. Des négociations très suivies tant par les organisations syndicales que par les experts, qui relèvent l’absence d’actions touchant à l’organisation du travail.

Plus d’un an après l’échéance fixée aux entreprises – le 1er février 2010 – pour négocier un accord sur la prévention des risques psychosociaux ou élaborer un plan d’actions, Xavier Bertrand présente ce jour devant le Coct un bilan qualitatif portant sur 234 accords. A l’heure où nous bouclons, ce document n’avait pas été dévoilé.

La logique du name and shame initialement retenue par le précédent ministre du Travail Xavier Darcos, qui avait retiré, à peine mise en ligne, la liste rouge des entreprises mauvaises élèves n’ayant pas négocié sur le sujet, est bel et bien oubliée. Le bilan d’aujourd’hui s’en tient à des données anonymisées, passe au crible les accords autour de douze thèmes et ne porte « aucun jugement », selon la Direction générale du travail.

Accords de méthode

Sans surprise, 80 % des textes analysés, dont 65 % ont été conclus au premier trimestre 2010, sont des accords de méthode, ce qui était d’ailleurs conseillé aux entreprises en fonction de leur degré de maturité sur ces sujets. Et 59 % ont été signés à l’unanimité.

« Nous avons assisté à une forte mobilisation des entreprises autour de la négociation, qui s’est poursuivie après février 2010, observe Philippe Douillet, chargé de mission à l’Anact. Il y a eu un vrai enjeu de dialogue social : certains syndicats pouvaient être réservés pour conclure des accords, puisque l’employeur a de toute façon une obligation de prévenir le risque “santé mentale”, et leur signature pouvait être interprétée comme une caution de l’organisation du travail. »

Mais les accords ont été formalisés et, pour la plupart d’entre eux, ont centré leurs engagements sur trois points : la formation, un diagnostic partagé et les modalités de pilotage et de suivi des accords.

« La formation du management, et notamment du management de proximité, revient de façon récurrente », signale Hervé Lanouzière, conseiller technique à la DGT en charge du pilotage de la cellule prévention des risques psychosociaux. Un sujet si omniprésent qu’il suscite des mises en garde multiples : « Les efforts sont à porter sur le management, mais il faut leur donner le temps de conduire leurs équipes », souligne Jean-Ange Lallican, président de la commission nationale sur le stress à l’ANDRH.

Diagnostic partagé

Tous les accords comportent aussi un volet relatif à la nécessité d’un diagnostic partagé sur le stress. « Ils demeurent très centrés sur l’évaluation quantitative, ce qui s’explique notamment par le manque de maturité des partenaires sociaux sur le sujet au cours des toutes premières négociations », commente Hervé Lanouzière. « Il est dommage que les entreprises aient tendance à repartir de zéro sans regarder ce dont elles disposent déjà en termes de diagnostic grâce au travail des CHSCT ou de la médecine du travail », regrette Philippe Douillet. Beaucoup d’accords font référence à des questionnaires, mais il peut être compliqué de les choisir, et ce n’est pas un hasard si l’INRS a publié de premières fiches d’analyse de ces outils (à consulter sur le site <www.dmt-prevention.fr>).

Prévention tertiaire et structures d’écoute

« Le contenu des accords est plus limité quant aux actions elles-mêmes, remarque Henri Forest, secrétaire confédéral de la CFDT. La prévention ne porte pas assez sur la prévention primaire. La plupart des textes comportent des indications sur la prévention tertiaire et les structures d’écoute. Certains prévoient des dispositifs de repérage des salariés en difficulté, dispositifs sur lesquels nous avons des réserves éthiques : nos militants sont alertés sur le fait que ce n’est pas leur rôle de s’engager dans cette voie, qui implique une intrusion dans la vie privée. De même que ce n’est pas le rôle des managers. »

Situation de travail

Le sujet de l’organisation du travail est peu abordé. Seuls quelques accords se distinguent sur ce point, comme celui de Danone (lire p. 6). « Le travail est le grand absent de la majorité des accords, regrette Jocelyne Chabert, chargée de mission à l’activité travail-santé de la CGT : on y parle de la fragilité individuelle, mais pas tellement de la qualité du travail. » « Les entreprises sont de plus en plus soumises à des démarches qualité et à une logique de remontée permanente de l’information, reconnaît Jean-Ange Lallican. Elles doivent faire une pause pour regarder les situations de travail. Toutefois, ce ne sont pas forcément les organisations qu’il faut remettre en cause, mais la manière de les conduire, notamment en redonnant de l’autonomie aux salariés et en leur accordant de la confiance. »

« Nous souhaitons développer un axe inscrit dans quelques accords, avance Henri Forest : la possibilité pour les salariés d’avoir des espaces d’expression sur le contenu de leur travail avec la hiérarchie. » L’accord de la société Acticall prévoit par exemple des groupes de travail participatifs chargés de proposer des actions et de réfléchir sur les évolutions organisationnelles. Une exception.

Douze thèmes analysés par la DGT

→ Les préambules.

→ Le niveau de négociation (entreprise, groupe, établissement).

→ L’engagement de la direction générale.

→ Le pilotage et le suivi.

→ Le niveau d’information des salariés.

→ Les indicateurs de prédiagnostic.

→ Les diagnostics prévus.

→ Les programmes d’actions.

→ Les dispositions relatives à l’encadrement.

→ L’expression des salariés.

→ La prise en compte des problématiques de réorganisation et de changement.

→ Le suivi de l’accord lui-même.

Auteur

  • VIRGINIE LEBLANC