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Sanction et licenciement disciplinaires dans le règlement intérieur

Enjeux | Chronique juridique par AVOSIAL | publié le : 12.04.2011 |

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Sanction et licenciement disciplinaires dans le règlement intérieur

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Un salarié a été sanctionné par une mise à pied disciplinaire de cinq jours ouvrés pour avoir tenu des propos diffamatoires. Il demande l’annulation de cette sanction disciplinaire au motif que le règlement intérieur de l’entreprise ne prévoit que le principe de la sanction sans en fixer la durée maximale.

La cour d’appel de Rennes refuse d’annuler cette sanction. Mais, dans une décision du 26 octobre 2010 (n° 09-42740), la Cour de cassation censure l’arrêt d’appel sur le fondement des articles L. 1321 1 et L. 1331-1 du Code du travail au motif que :

• « Dès lors que le règlement intérieur fixe les règles générales et permanentes relatives à la discipline, notamment la nature et l’échelle des sanctions que peut prendre l’employeur, une sanction ne peut être prononcée contre un salarié que si elle est prévue par ce règlement intérieur ;

• Une mise à pied prévue par le règlement intérieur n’est licite que si ce règlement précise sa durée maximale. »

Cet arrêt apporte deux précisions importantes sur le pouvoir disciplinaire : pour être prononcée, une sanction disciplinaire doit être prévue par le règlement intérieur et la durée maximale de la mise à pied doit être également prévue par ce règlement intérieur.

La sanction disciplinaire prononcée doit être prévue par le règlement intérieur

Pour la première fois à notre connaissance, la Cour de cassation subordonne le pouvoir disciplinaire de l’employeur à l’obligation préalable de fixer la nature des sanctions dans le règlement intérieur.

Qu’en est-il lorsqu’il n’existe pas de règlement intérieur, alors que celui-ci est obligatoire ? Autrement dit, dans une entreprise de 20 salariés au moins, en l’absence de règlement intérieur ou en présence d’un règlement intérieur qui ne fixerait pas les différentes sanctions applicables, l’employeur perd-il tout pouvoir disciplinaire ?

La réponse est positive : dans une telle hypothèse, il est notamment privé de la faculté de prononcer un avertissement, une mise à pied, une rétrogradation, une mutation. Faute de règlement intérieur les prévoyant, ces sanctions sont nulles.

Cela signifie-t-il que l’employeur serait également privé de la possibilité de prononcer un licenciement pour motif disciplinaire ? A première vue, cette question peut surprendre, notamment au regard du principe selon lequel toute convention à durée indéterminée doit pouvoir être rompue. Ce qui est le cas avec le contrat de travail à durée indéterminée (article L. 1231-1) ; principe ayant une valeur constitutionnelle selon le Conseil constitutionnel.

Toutefois, l’employeur ne pourrait se retrancher derrière ce principe, car « les accords collectifs peuvent valablement limiter les possibilités de licenciement aux causes et aux conditions qu’ils déterminent et qui ne rendent pas impossible toute rupture de contrat de travail » (Cass. soc., 3 décembre 2002, n° 00-46055, 01-40182, 01-44021).

Pour autant, à défaut de texte prescrivant sa nullité, le licenciement pour motif disciplinaire notifié en l’absence de règlement intérieur ne serait pas nul, à notre sens, mais il serait privé de cause réelle et sérieuse.

Le règlement intérieur doit préciser la durée maximale de la mise à pied disciplinaire

Pour la première fois aussi à notre connaissance, la Cour de cassation impose au règlement intérieur de fixer la durée maximale de la mise à pied. Mais la Haute cour ne fixe pas de maximum à cette durée. Faute de durée maximale fixée par le règlement intérieur, la mise à pied est nulle.

Conséquence de cet arrêt sur le pouvoir disciplinaire dans les entreprises de moins de 20 salariés

En application de l’article L. 1311-2 du Code du travail, le règlement intérieur est facultatif dans les établissements ou les entreprises de moins de 20 salariés. Dans ces entreprises, l’employeur conserve son pouvoir disciplinaire en l’absence de règlement intérieur. Si, toutefois, il décide de mettre en place un règlement intérieur, l’employeur sera tenu par la nature et l’échelle des sanctions qu’il aura fixées.

Ce raisonnement nous paraît inévitable dans la mesure où la Cour de cassation ne vise pas l’article L. 1311-2 du Code du travail relatif au champ d’application du règlement intérieur. Mais elle vise l’article L. 1321-1 relatif au contenu du règlement intérieur.

Gérard Kesztenbaum, directeur du département droit et gestion sociale au cabinet Fidal, membre d’Avosial, le syndicat des avocats en droit social.