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Enquête

La convention collective redessinée

Enquête | publié le : 15.03.2011 | MARIETTE KAMMERER

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La convention collective redessinée

Crédit photo MARIETTE KAMMERER

La Fédération nationale de l’habillement a tenu compte de l’arrêt de la Cour de cassation du 1er juillet 2009 à l’occasion de la négociation d’un avenant sur les indemnités de départ en retraite des cadres. Elle a également préparé un argumentaire pour justifier d’autres avantages déjà accordés.

Quand la jurisprudence du 1er juillet 2009 est tombée, la Fédération nationale de l’habillement a regardé à la loupe la convention collective du commerce de détail afin de recenser toutes les différences de traitement entre cadres et non-cadres et de vérifier si elles étaient justifiées ou justifiables. « Nous devions justement renégocier un avenant sur les indemnités de départ en retraite dans un sens qui avantageait beaucoup les cadres, explique Sophie Jami, responsable juridique des affaires sociales. Nous avons donc trouvé des arguments objectifs – une entrée plus tardive sur le marché du travail et un taux de remplacement plus faible entre salaire et retraite – pour justifier par écrit cette différence. »

Risque de dénonciation de la convention

Les syndicats, qui découvraient cette jurisprudence, ont d’abord demandé que tous les salariés bénéficient de l’ensemble des avantages accordés aux cadres. « Nous avons expliqué que ce n’était pas tenable financièrement pour les employeurs et avons menacé de dénoncer l’accord », ajoute Sophie Jami. Les syndicats se sont finalement inclinés, moyennant une augmentation de l’indemnité de départ en retraite. Et l’avenant a été étendu sans réserve par le ministère du Travail.

Justifications

La convention collective comporte d’autres différences de traitement qui mériteraient des justifications. C’est pourquoi la fédération, sans toucher au texte, a préparé un argumentaire qu’elle pourra utiliser en cas de contentieux. Ainsi, une prime d’ancienneté plus élevée peut s’expliquer parce que le cadre est plus difficile à fidéliser ; un préavis de départ plus long se justifie car le remplacement d’un cadre prend plus de temps ; des prestations décès et invalidités plus avantageuses sont liées à une cotisation plus élevée ; des indemnités maladie plus favorables pour compenser le plafonnement de la sécurité sociale, etc.

Pour autant, la fédération ne souhaite pas renégocier l’ensemble du texte afin d’y inscrire ces justifications comme le lui conseillait son cabinet d’avocats : « Les syndicats ne l’auraient pas accepté. D’autre part, on ne sait pas si nos arguments seraient validés par le juge comme des raisons objectives et pertinentes. » En effet, dans ses derniers arrêts, la cour d’appel de Montpellier a estimé fin 2009 que la difficulté de remplacer un cadre n’est pas une « raison objective » à un préavis plus long, de même qu’un salaire plus élevé n’est pas une « raison objective » à des indemnités de licenciement plus avantageuses.

« Cette situation crée une insécurité juridique pour les employeurs de la branche, déplore Sophie Jami, ils ne sont pas à l’abri de contentieux individuels, de salariés réclamant un rappel de prime d’ancienneté ou un alignement sur les indemnités de licenciement des cadres. » Rien de tel ne s’est produit pour l’instant, et la fédération n’a pas communiqué auprès des employeurs sur cet épineux problème, préférant attendre les prochains arrêts de la Cour de cassation.

Par chance, la question des avantages catégoriels ne s’est pas posée lors des récentes négociations de branche sur les salaires. « Mais une chose est sûre, à l’avenir, nous serons attentifs à ne pas créer de nouvelles différences, même si cela a pour conséquence de donner un peu moins aux cadres pour pouvoir donner plus à tous », ajoute la responsable juridique.

Auteur

  • MARIETTE KAMMERER