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« L’environnement social constitue la clé de l’individualisation du déploiement des parcours e-learning auprès des salariés »

Enquête | publié le : 08.03.2011 | L. G.

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« L’environnement social constitue la clé de l’individualisation du déploiement des parcours e-learning auprès des salariés »

Crédit photo L. G.

E & C : Vous concluez dans votre thèse sur les facteurs d’engagement et les apprentissages des salariés dans des parcours de e-learning(1) que « l’environnement social constitue la clé de l’individualisation des parcours e-learning déployés auprès des salariés ». Que voulez-vous dire ?

E. B. : J’ai étudié quatre parcours e-learning chez un constructeur automobile ; 81 entretiens ont été conduits : 13 lors de la phase pré-exploratoire, 20 lors de la phase exploratoire et 48 lors de la phase intensive, dont 44 entretiens avec des salariés.

Le constat est double. D’une part, les salariés apprennent des éléments différents face à un même contenu de formation : certains acquièrent des informations, d’autres développent des niveaux de compréhension par rapport à leur travail. D’autre part, certains salariés sont très autonomes par rapport à cette modalité de formation, alors que d’autres y sont très réticents.

En conséquence, les salariés n’ont pas besoin des mêmes environnements e-learning, ni de la même interaction sociale. Les entreprises doivent donc tendre vers une individualisation des modes de déploiement des parcours e-learning auprès des salariés, si elles souhaitent améliorer les taux de suivi de ces parcours et les apprentissages.

E & C : Les modes de déploiement du e-learning ne tendent-ils pas au contraire à lisser ce qui est donné aux salariés ?

E. B. : Ils ne définissent jamais totalement les environnements dans lesquels les salariés se retrouvent, même s’ils y concourent fortement. L’enjeu pour une entreprise est de créer des environnements d’apprentissage facilitants pour les salariés. Cependant, si ces principes sont relativement simples à énoncer, ils sont difficiles à mettre en œuvre du fait des impératifs économiques et du manque de ressources dans la mise en œuvre de la formation en entreprise.

E & C : Quels sont les éléments fondamentaux d’un déploiement e-learning ?

E. B. : Tout d’abord, l’incontournable infrastructure technologique. Le débit du réseau informatique, l’uniformité et la disponibilité de certains logiciels informatiques pour lire les contenus multimédias, la capacité de les mettre à jour automatiquement et à distance sur les postes des salariés, l’existence d’une plate-forme e-learning facile d’accès et d’utilisation par les salariés sont autant de points d’attention. Les salariés rencontrés soulignent tous l’importance de l’utilité, de la facilité d’utilisation pour expliquer leur acte d’engagement. Par ailleurs, plusieurs responsables techniques e-learning désignent les problèmes liés à l’infrastructure technologique comme la première source d’abandon des apprenants.

Viennent ensuite : la conception multimédia et pédagogique, qui a une répercussion directe sur l’utilité et la qualité du contenu perçues par les salariés, et l’environnement spatial et temporel. Certains salariés ont totalement intégré cet environnement par rapport au e-learning et sont capables de se former de manière flexible par rapport à leur agenda, à leur poste de travail ou dans une salle de réunion. D’autres, au contraire, rencontrent des difficultés à rester à leur poste de travail.

E & C : C’est un problème en effet souvent évoqué. Quelles en sont les causes ?

E. B. : On peut citer les problèmes de concentration occasionnés par le bruit ambiantet l’image de manque de sérieux que peut renvoyer le fait de se former par e-learning pendant son temps de travail. Certains salariés rencontrent également des difficultés à donner la priorité au suivi de modules e-learning par rapport à des tâches jugées plus urgentes. La création d’un espace dédié et l’exemplaritédes supérieurs hiérarchiques sont alors des leviers d’action. Au final, par rapport aux questions de temps, deux points sont importants : la date du déploiement des parcours e-learning et la définition avec le supérieur hiérarchique de la période de suivi des modules. Cependant, des effets négatifs générés par l’environnement spatial et temporel peuvent être compensés par l’environnement social.

E & C : Cet environnement social, qui est le 4e pilier d’un déploiement e-learning selon vous, est aussi le plus important.

E. B. : En effet. Les salariés ayant intégré le e-learning comme une modalité de formation parmi d’autres n’auront globalement besoin que d’un accompagnement humain minimal : être informés de l’existence des modules d’autoformation au moment où ils en auront potentiellement besoin. A l’inverse, des salariés anxieux face à l’outil technologique ou plus traditionnels dans leur approche de la formation auront besoin d’un cadre social plus engageant avec une présence plus forte de leur supérieur hiérarchique, du service formation et/ou du formateur.

Prendre en compte cette diversité des réactions passe par une multiplication des modes de déploiement auprès des salariés. Certains seront plus réceptifs à un mode de déploiement moins humanisé, où la réception d’un courriel d’information sur l’existence de contenu e-learning sera suffisante. D’autres auront besoin d’une présence humaine lors de leur démarche d’entrée et de suivi en formation, d’où l’importance des interactions sociales.

Tout ceci devrait pousser les entreprises à travailler sur un autopositionnement des salariés avant de commencer leur parcours e-learning, et à déterminer l’imbrication nécessaire du e-learning avec d’autres modalités d’apprentissage.

(1) Thèse soutenue à l’université Paris-Dauphine en décembre 2010.

Auteur

  • L. G.