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La chute de l’archétype parent-enfant

Enjeux | Chronique de Meryem Le Saget | publié le : 08.02.2011 | <aut/>

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La chute de l’archétype parent-enfant

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L’anthropologue américain Joseph Campbell prévoyait de grands bouleversements au 21e siècle, avec notamment le déclin universel de l’archétype parent-enfant. Ce modèle, qui gouverne depuis des centaines d’années la plupart de nos rapports professionnels et sociétaux, est pourtant bien vivace, quel que soit le pays : le manager se considère meilleur que ses collaborateurs et a tendance à donner des ordres, le médecin garde le pouvoir derrière son jargon médical et n’explique pas à son patient ce qu’il a, le gouvernement prend des décisions unilatérales sans concerter avec les parties prenantes, de multiples conseillers « se prennent pour le roi » et escomptent être obéis servilement, les agents du contrôle des frontières considèrent a priori le voyageur comme suspect… C’est détestable et tellement dépassé.

Joseph Campbell disait que le citoyen moderne le tolérerait de moins en moins. Cela commencerait par des réactions et manifestations de désapprobation, des votes qui sanctionneraient ceux qui se comportent en « parent » traitant leurs interlocuteurs en « enfant »; mais si rien ne changeait, la société civile prendrait elle-même les choses en main. Ne voit-on pas certains pays se confronter au sujet ? Il ne s’agit en rien d’un phénomène local, mais bien d’un changement d’époque, d’un mouvement planétaire à la recherche de relations adulte-adulte et d’échanges responsables.

Pour être à l’aise dans ce 21e siècle,il va falloir transformer en profondeur nos façons de gérer et de décider ! Fini les administrateurs et les administrés, les décideurs et les exécutants, les seigneurs et les vassaux, et même les managers et les managés : l’archétype parent-enfant vit son inexorable déclin. Au lieu de « Je sais mieux que vous et vous devez suivre ce que je dis », la nouvelle donne instaure un rapport différent : « Construisons ensemble nos solutions ». La cocréation prend la place du positionnement supérieur-inférieur. Les parents d’élèves sont appelés à participer au fonctionnement de l’école, les habitants sont consultés sur les évolutions de leur cité, les patients demandent l’accès à leur dossier médical et veulent décider… Les institutions vont devoir s’expliquer davantage au lieu d’imposer ! Partout, la communication, la pédagogie et le respect mutuel devront remplacer la domination ou la condescendance.

Ceci suppose de nouvelles compétences : savoir communiquer en adulte, en dépassant le réflexe de positionnement, le confort du statut, le désir d’avoir raison et même le besoin d’aller vite. Qui dit cocréation dit également méthodes efficaces de construction de solutions en commun et attitude profonde de collaboration. En effet, le piège serait de se leurrer en croyant « faire de la collaboration » mais en ne produisant rien qui y ressemble : juste des réunions stériles et chronophages, un semblant de dialogue, quelques consensus mous, pour finalement revenir à des décisions hiérarchiques traditionnelles.

Dans notre vie professionnelle et personnelle,où avons-nous remplacé l’archétype « parent-enfant » par une authentique cocréation ? Les pistes sont multiples : mieux écouter et partager, parler vrai, décider ensemble, travailler en équipe, encourager l’initiative autour de soi. Ce n’est pas si simple de coconstruire avec d’autres quand on pourrait facilement dire « c’est moi qui décide ».

Mais l’Histoire ne revient pas en arrière. Alors, qui est prêt pour le 21e siècle ?

Meryem Le Saget est conseil en entreprise à Paris. <www.lesaget.com>

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