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Pas si simple d’être vertueux

Enquête | publié le : 25.01.2011 | LAURENT POILLOT

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Pas si simple d’être vertueux

Crédit photo LAURENT POILLOT

Le chocolatier drômois Valrhona a négocié sur tous les sujets exposés à des pénalités sociales. Il doit cependant provisionner une majoration apprentissage, faute de candidats. L’entreprise veut la compenser par d’autres actions, notamment liées au handicap.

Le cumul des mesures risquant de grever la gestion sociale des entreprises n’affole pas la direction de Valrhona. « Ces pénalités, nous avons toujours préféré les anticiper », affirme Catherine Riffard, responsable des relations sociales de cette entreprise qui emploie 504 salariés permanents, auxquels s’ajoutent 230 intérimaires entre mai et janvier.

Depuis la mise en place d’une politique de responsabilité sociale, en 2005, pour remédier à l’absentéisme, le fabricant drômois de chocolat fin fait plutôt figure de bon élève. Son taux d’emploi de travailleurs handicapés est de 5,8 %, et son protocole de maintien dans l’emploi, déclenché après chaque arrêt de travail de plus de quinze jours, a réduit à peau de chagrin les licenciements pour inaptitude, grâce à la mobilisation d’un attelage manager-RRH. Ces derniers s’enquièrent de l’état de forme du salarié – notamment vis-à-vis du port de charges – et préparent son retour en poste.

L’entreprise a en outre signé un accord seniors avec les deux syndicats FO et CFDT avant la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2009 instaurant une pénalité de 1 % de la masse salariale.

Une sage-femme pour les jeunes mères

Valrhona mène également un partenariat ancien avec les écoles locales, qui lui amènent quelques apprentis chaque année. Enfin, elle s’est dotée d’une “charte de la parentalité”. Conçue avec l’aide d’une stagiaire sage-femme en 2009, cette charte vise à protéger les jeunes mères. Son opportunité sera commentée au cours des prochaines NAO, dont l’ordre du jour prévoit la négociation d’un accord sur l’égalité hommes-femmes. Sur le handicap, les seniors, l’égalité professionnelle, Valrhona n’est donc pratiquement pas exposé aux pénalités sociales.

Dans cette entreprise, la moyenne d’âge est de 38 ans. « Depuis mon embauche en 1987, j’ai toujours vu arriver une vingtaine de nouveaux chaque année, raconte Pascal Rodillon, le délégué CFDT, qui a aussi un mandat dans la branche agroalimentaire. Nous avons aujourd’hui autant d’hommes que de femmes, dans tous les métiers et niveaux de responsabilité, ce qui est rare dans notre secteur. »

En revanche, la direction a dû se résoudre à provisionner un surcroît de taxe d’apprentissage, dont le budget n’est pas communiqué.

Trois apprentis au lieu de trente

« Nous accueillons trois apprentis par an, alors qu’il en faudrait une trentaine. Nous n’y arriverons pas, explique Valérie Monier, la RRH. Ce n’est pas faute de les chercher. Au contraire, nous menons des opérations séduction depuis le CAP jusqu’au niveau ingénieur. Mais les écoles ne forment plus aux métiers de l’agroalimentaire, tandis que les jeunes se détournent des métiers de production en horaires postés, où sont nos besoins. » Selon elle, il faudra compenser cette majoration « en redoublant d’efficacité dans les domaines où nous avons des résultats ».

Celui du handicap, par exemple : « Notre dernière contribution s’est élevée à 1 300 euros – sachant que le changement de loi [en 2005] représentait pour nous un enjeu de 180 000 euros, poursuit Valérie Monier. Il faudra que nous fassions en sorte de l’annuler et que nous cherchions de nouvelles subventions Agefiph. Toutes nos actions RH, qu’elles soient motivées ou non par des taxes parafiscales, devront nous apporter une meilleure rentabilité. »

Le groupement d’employeurs que Valrhona a cofondé en mai dernier avec sept autres entreprises pourrait l’y aider : « A terme, il nous permettra de réduire nos coûts cachés de recrutement et d’intégration des publics prioritaires. » Autre enjeu : le taux d’absentéisme. Selon la CFDT, ce taux oscille entre 6 et 8 jours par an et par salarié, contre 19 jours en 2004. « Nous osons croire que nos actions donneront envie de venir travailler chez nous », s’encouragent Valérie Monier et Catherine Riffard.

Même si les pénalités sociales ont manifestement incité Valrhona à agir, leurs vertus, s’agissant notamment des seniors, laissent les deux femmes perplexes : outre que la pyramide des âges de l’entreprise ne requiert pas d’actions particulières, « les mesures liées aux seniors ne répondent pas aux besoins des intéressés, disent-elles. Nos invitations aux entretiens de mi-carrière ont été mal perçues par des salariés qui, à 45 ans, ne se voient pas âgés. Quant aux dispositifs de formation pour les 50 ans et plus, ils ne correspondent pas aux attentes de personnes qui, en fin de carrière, imaginent plutôt préparer leur retraite. »

VALRHONA (GROUPE BONGRAIN)

• Activité : fabrication de chocolats et de confiseries pour les professionnels et artisans.

• Effectif : 504 salariés.

• Chiffre d’affaires : non communiqué.

Auteur

  • LAURENT POILLOT