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Les pratiques

CanadaLe multiculturalisme, ADN de l’entreprise

Les pratiques | publié le : 18.01.2011 | LUDOVIC HIRTZMANN, GUILLAUME LE NAGARD

Au Canada, où une part importante de la population provient de l’immigration, les entreprises ont embauché des gestionnaires de la diversité.Si elles gèrent cette obligation avec succès, la discrimination positive est parfois contestée.

Le multiculturalisme, institué dès les années 1970 comme un des éléments de la société canadienne, est devenu une réalité constitutionnelle et légale pour les entreprises. Une caractéristique qui, associée à l’évolution de la population, dont les minorités visibles représentent 18 % aujourd’hui contre 4,7 % en 1981, fait des entreprises un terrain d’observation privilégié des politiques de diversité. Le Canada a été d’ailleurs l’une des dernières destinations de Jeannette Bougrab en tant que présidente de la Halde, en novembre dernier, quelques semaines avant que celle-ci quitte la Haute Autorité. Dans les entreprises d’Etat comme la Société de transport de Montréal, un quart des embauches doivent provenir des minorités visibles. Dans le privé, une loi de 1995 sur l’équité en matière d’emploi impose des contraintes aux entreprises fédérales (590 sociétés dans les secteurs des banques, des transports, des télécommunications, de l’agroalimentaire, etc.). Elle exige en effet des employeurs qu’ils lèvent les obstacles que pourraient rencontrer en milieu de travail quatre groupes désignés par ce texte : les minorités visibles, les femmes, les autochtones et les personnes handicapées. La loi vise à faire correspondre la représentation de ces groupes au sein de l’entreprise avec celle de la population active. Au quotidien, la gestion de la diversité se traduit par l’aménagement d’accommodements religieux (congés et lieux de prière), ou permettant la participation à des activités communautaires ethniques.

Egal accès aux promotions

Certaines entreprises vont plus loin… et y trouvent leur compte. Raymond Chouinard, directeur des affaires publiques de la Banque royale du Canada (RBC), confie ainsi : « Dans chacune de nos agences, nous pouvons servir les clients en 15 langues. » La RBC compte 27 % de minorités visibles et s’assure de l’égalité d’accès aux promotions. Ces minorités constituent 26 % de l’encadrement.

La loi, qui prévoit des évaluations préliminaires de la situation et de la conformité des dispositifs mis en œuvre, puis des évaluations de progrès, est complexe. Elle impose notamment neuf exigences, allant de la collecte de données sur l’effectif à la consultation des IRP, en passant par le suivi de plan d’équité. Certaines entreprises choisissent de se doter d’un gestionnaire de la diversité. C’est le cas de la Banque nationale du Canada. « Cet expert se consacre spécifiquement à la diversité, indique Claude Breton, porte-parole. Il s’assure que les politiques de RH sont exemptes de discrimination. Il doit informer les salariés sur la diversité, mais aussi effectuer une veille, afin que l’entreprise soit toujours à la pointe dans le domaine. » Et pour maintenir l’efficacité du dispositif dans une société en évolution constante.

Remise en question

Depuis peu cependant, cette conception de la diversité et du multiculturalisme a du plomb dans l’aile. Le ministre de la Citoyenneté, de l’Immigration et du Multiculturalisme Jason Kenney déclarait récemment : « Nous devons veiller à ce que tous les Canadiens aient des chances égales de travailler pour leur gouvernement en fonction de leur mérite, peu importe leur race ou leur origine ethnique. » Sauf qu’il ne prenait pas la défense d’une travailleuse noire ou asiatique écartée d’un emploi dans l’administration en raison de sa couleur de peau, mais d’une mère de famille dont la candidature avait été refusée par l’administration fédérale parce qu’elle était blanche. « J’étais scandalisée. Parce que je suis blanche, je ne peux pas soumettre ma candidature ? », s’est insurgée la candidate, Sara Landriault. Depuis, Ottawa a corrigé le tir… et la discrimination positive assise sur des quotas dans le secteur public est sur la sellette.

Auteur

  • LUDOVIC HIRTZMANN, GUILLAUME LE NAGARD