E & C : Le Comité européen des droits sociaux (CEDS) a déclaré la législation sur les forfaits en jours non conforme à la Charte européenne des droits sociaux fondamentaux ratifiée en 1999 par la France. De quoi s’agit-il ?

S. N. : La CFE-CGC et la CGT ont déposé une réclamation auprès du CEDS qui a abouti à cet avis. Il conclut que, pour les cadres relevant du système des forfaits jours sur l’année, la durée hebdomadaire de travail autorisée est excessive et que les garanties juridiques offertes par le système de conventions collectives sont insuffisantes. Et ce, alors que la loi de 2008 sur la démocratie sociale et la réforme du temps de travail avait assorti le forfait jours de la tenue d’un entretien annuel portant sur la charge de travail.

E & C : Quelles conséquences pour les entreprises ?

S. N. : Les avis du CEDS ne peuvent s’appliquer aux entreprises sans qu’un juge français ne vienne, à travers une décision, imposer le respect de cette charte européenne. Je précise toutefois que l’un des conseillers de la chambre sociale de la Cour de cassation s’est récemment prononcé clairement en faveur de la décision du CEDS. Aussi, les forfaits jours risquent d’être déclarés non conformes, ce qui permettrait aux cadres autonomes de demander en justice le paiement d’heures supplémentaires.

E & C : Que conseillez-vous aux DRH ?

S. N. : De réviser leur accord collectif pour prévoir des durées maximales journalières et hebdomadaires. Le CEDS conclut à l’insuffisance des garanties offertes par l’accord collectif et pas à la non-conformité de la loi française. Si ces forfaits jours sont issus d’un accord de branche, les dirigeants attendront que la branche révise son accord. Dans tous les cas, l’ajout de la phrase « en aucun cas, la durée hebdomadaire d’un cadre ne peut excéder 50 heures, et 10 heures par jour » pourrait suffire.