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Enquête

L’ardoise de la réforme

Enquête | publié le : 09.11.2010 | A. D.

Le relèvement de l’âge du départ en retraite de 60 à 62 ans générera un coût financier inévitable pour les entreprises, par ailleurs visées par un PLFSS 2011 à la recherche de nouvelles sources de liquidités.

Au cours des dix prochaines années, les réformes successives des retraites devraient se traduire par des reports de départs estimés à 6,3 % de l’ensemble des salariés (3,8 % au titre de la réforme Fillon et 2,5 % à l’issue de l’entrée en vigueur des dispositifs de la nouvelle réforme). Au vieillissement de la population active “par le haut” s’ajoutera un vieillissement “par le bas”, les embauches de jeunes salariés étant susceptibles de ralentir, notamment dans les entreprises dans lesquelles chaque retraité était remplacé. « Du fait de la présence d’une population plus exposée aux risques de vie, l’accroissement de l’âge moyen de la population des entreprises entraînera un coût du travail potentiellement alourdi par des cotisations additionnelles », reconnaît Véronique Rouzaud, directrice générale RH de Veolia Environnement.

Selon les estimations du courtier Gras Savoye, l’allongement de la carrière du fait de la réforme devrait générer une dérive supplémentaire de 1,11 % par an de consommation médicale ainsi qu’une hausse de 1 % du nombre de jours d’absence par mois. « Les salariés âgés s’arrêtent moins souvent que les plus jeunes. En revanche, leurs absences durent plus longtemps », souligne Philippe Maximin, directeur du département prévoyance et retraite de Gras Savoye, qui estime que la réforme engendrera une augmentation des dépenses de santé de l’ordre de 2,5 % à 3 %.

Le recul de l’âge de la retraite à 62 ans impactera aussi sévèrement les régimes de prévoyance collective, puisque les prestations d’invalidité devront être versées pendant deux années supplémentaires. Un amendement adopté par les sénateurs offrant aux assureurs un délai de six ans, à compter de l’exercice 2010, pour provisionner les charges induites estimées à 4 milliards d’euros, la sénatrice UMP Isabelle Debré les a invités, en contrepartie, à « faire preuve de la plus grande modération sur les tarifs applicables aux entreprises clientes ». Sur le marché, on parle malgré tout de hausses de cotisations de l’ordre de 5 % à 7 % dès 2011.

Vers des dispositifs moins coûteux

La réforme des retraites bousculera également les prévisions des entreprises ayant mis en place des cessations anticipées d’activité. Toutes n’ont pas, à l’instar de Sanofi-Aventis (lire p. 28), provisionné le coût induit par une éventuelle révision à la hausse de la durée de portage. « Il est probable que ce dernier impact financier incite les entreprises à s’orienter vers des dispositifs de fin de carrière moins coûteux, notamment en favorisant le temps partiel », remarque Denis Falcimagne, de l’association Entreprise & Personnel.

Nouvelles taxes

Au-delà des effets directs de la réforme, les entreprises sont également sollicitées pour apporter de nouvelles ressources à l’actuel régime de retraite. En cours d’examen au Sénat, le PLFSS 2011 prévoit ainsi un certain nombre de nouvelles taxes - hausse des prélèvements sur les stock-options et les retraites chapeaux, augmentation du forfait sur l’épargne salariale, qui passe de 4 % à 6 %, etc. - destinées à injecter 4 milliards d’euros dans le régime des retraites. « Cette logique devrait se poursuivre, prédit Matthieu O’neill, de Hay Group. Pour apporter les ressources nécessaires à l’équilibre du système, les entreprises seront très vraisemblablement sollicitées de nouveau par des hausses de cotisation des régimes complémentaires (Arrco-Agirc) ainsi que par d’autres prélèvements ou taxes de type CSG, CRDS, forfait social ou prélèvement sur les pensions. »

Report de l’âge de départ en retraite de 60 à 62 ans : quel impact sur les engagements et passifs sociaux ?

→ Article 39 (régimes à prestations définies) : le recul du départ à la retraite allonge la durée d’amortissement de l’engagement de la société (pour un niveau de passif fonction du dernier salaire fixé) et d’une baisse du prix de l’annuité. Par exemple, pour une charge unitaire, le passage de 60 à 62 ans induit une baisse de 3 % (5 % de 62 à 65 ans)

→ Article 83 (régimes à cotisations définies) : il n’y a généralement pas de passif social pour un régime à cotisations définies. Cependant, l’entreprise devra payer les cotisations patronales deux ans de plus en moyenne.

→ Indemnités de fin de carrière (IFC) : une fois le droit maximum atteint, les anciennetés supplémentaires, du fait du recul de la retraite, sont sans effets. En conséquence, la dette actuarielle à la date de l’évaluation diminue.

Estimations réalisées par Gras Savoye.

Auteur

  • A. D.