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Derrière les évidences

Enquête | publié le : 02.11.2010 | L. G.

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Derrière les évidences

Crédit photo L. G.

Les entreprises et les branches professionnelles ne vivent pas toutes la même relation avec leur Opca. Envisager la réforme sous cet angle malmène la logique de la fusion pure et dure.

La restructuration des Opca en cours a fixé un niveau de collecte minimal à 100 millions d’euros. Mais la loi dit aussi qu’elle doit prendre en compte « la capacité à assurer une représentation aux niveaux régional, interrégional ou territorial », « la réponse à une logique de filière économique », « le mode de gestion paritaire », « leur capacité financière et leurs performances de gestion », « l’aptitude à assurer leurs missions compte tenu de leurs moyens », « l’aptitude à assurer des services de proximité pour les TPE et PME », « la transparence de la gouvernance »… Le cumul des toutes ces variables peut s’avérer délicat, comme le montre le tableau ci-contre.

D’une lecture complexe, il mérite des explications. Première colonne : en bleu, les Opca de branche du champ des trois organisations patronales Medef, CGPME et UPA ; en jaune, les Opca de branche hors champ, dépendant d’autres organisations patronales ; en orange, l’Opca interprofessionnel-interrégionnal-interbranches du Medef et des cinq confédérations syndicales de salariés (Opcalia); en vert, l’Opca interprofessionnel-interrégionnal-inter-branches de la CGPME et des cinq confédérations syndicales de salariés (Agefos-PME).

Colonnes suivantes : en rose, les Opca réunissant aujourd’hui plus de 100 millions d’euros de collecte ; en gris, ceux qui font moins et qui doivent, dans la logique de l’actuelle réforme, se restructurer.

Rapport plan/professionnalisation

Comment sont classés les Opca ? Tels qu’ils apparaissent dans l’avant-dernière colonne de droite : pourcentage de la collecte plan par rapport à la collecte professionnalisation. Pourquoi ? Parce que la collecte professionnalisation est obligatoire et que ses taux sont définis par la loi, alors que la collecte plan dépend de la capacité d’initiatives des partenaires sociaux qui gèrent l’Opca.

Le niveau de collecte professionnalisation est en effet fixe et encadré, il ne dépend pas de la volonté des partenaires sociaux de l’Opca. Son usage, en revanche, dépend de leurs choix. D’où la multitude de débats dans tous les Opca sur la ventilation du 0,5 % professionnalisation entre DIF, DIF portable, période et contrat de professionnalisation, voire financement de l’apprentissage.

A l’inverse, la collecte plan d’un Opca dépend d’autres variables que la loi : part d’entreprises de moins de 10 salariés devant verser obligatoirement leur plan de formation ; accords de branche fixant des montants de collecte conventionnelle obligatoire pour les entreprises de plus de 10 ou de plus de 20 salariés ; pratiques des entreprises versant des parts libres de leur plan, voire au-delà ; qualité des prestations et services offerts par l’Opca…

Ainsi, la collecte plan dépend, elle, pour partie, de l’intensité de la construction paritaire de l’Opca (signature d’accords, rôle de la CPNEF, volonté de se forger un destin commun…), et, pour l’autre, du sentiment de service rendu par l’Opca auprès des entreprises (qualité des prestations, capacité de cofinancement, politique de services…).

Le rapport plan/professionnalisation exprime donc une forme « d’intensité d’engagement financier et paritaire » des entreprises et des partenaires sociaux des branches vis-à-vis de leur Opca, et témoigne ainsi d’une culture, d’un historique, et d’habitudes spécifiques. Les entreprises d’une branche et les partenaires sociaux qui l’animent sont, ainsi, plus ou moins “attentifs” ou “concentrés” autour de l’outil Opca.

Montant de la collecte

Les deux autres colonnes rappellent le montant de collecte totale 2010 et son classement ; ainsi que le rapport plan/total et son classement. Le rapport plan/total est également un témoin de l’engagement d’une branche autour de son Opca, mais il peut être parasité par la collecte CIF. Plus la collecte CIF est importante, plus le total augmente et plus le rapport plan/total est faussé. Les Opacif de branche estiment néanmoins que le fait de garder la collecte CIF, plutôt que de la voir transférée aux Fongecif du fait de la réforme, est un de leurs combats.

Quatre familles d’Opca

A quoi aboutit le croisement de ces variables ? A l’identification (discutable, bien sûr) de quatre familles d’Opca selon leur ­rapport plan/professionnalisation.

Première famille : ceux dont la collecte plan vaut plus de trois fois celle de la professionnalisation (Fafsea, Unifaf, Opca2).

Deuxième famille : ceux dont le montant de la collecte plan atteint entre deux et trois fois celui de la collecte professionnalisation (de Opcams à Formahp). Troisième : ceux dont le montant de la collecte plan atteint entre une et deux fois celui de la collecte professionnalisation (de Forcemat à Opcaim). Et quatrième : ceux dont la collecte plan est inférieure à la collecte professionnalisation (de Opcassur à Opca-Banques).

Ce classement permet de voir que le mot Opca n’a pas partout le même sens. Entre un Opca atteignant plus de 200 millions d’euros de collecte, mais ayant un rapport plan/professionnalisation de moins de 80 %, et un Opca frôlant à peine les 55 millions d’euros de collecte, mais affichant un rapport plan/professionnalisation de près de 280 %, il y a bien des différences. Au sens de la réforme actuelle, le premier vivra, le second disparaîtra, ce qui a de quoi laisser songeur.

Comment, dans ces conditions, faire le reproche aux « petits Opca qui fonctionnent bien » de tenter de préserver leurs particularités dans un ensemble plus vaste ?

Auteur

  • L. G.